Recevoir un ouragan dans les bras était une chose dont Bill avait l'habitude. Même deux, très souvent. Louise et Zoé étaient ses soeurs. Ses petites soeurs. Deux vraies piles électriques. Zoé, une jolie petite métisse avec de belles boucles brunes était la plus jeune. Elle n'avait que sept ans, tandis que Louise venait de passer la majorité. Si aucun des trois ne ressemblait à un autre, ils étaient pourtant très liés. Tous les trois. Bill était le seul enfant biologique de la famille, mais ça n'avait jamais eu une réelle importance. Même si, lorsque Louise était arrivée dans la famille, il avait eu du mal à comprendre pourquoi une étrangère devait devenir sa petite soeur, il avait vite craqué face à sa bouille effrayée. Louise avait vécu pas mal de mésaventures avant d'arriver chez lui. Calme, tremblante, constamment roulée en boule. Elle avait mis du temps à s'ouvrir à eux, accepter de parler ou même de manger à table. À huit ans, Bill avait eu cet instinct de protection avec elle, surtout à l'école où on se moquait d'eux parce qu'ils ne se ressemblaient pas. Il s'était défendu pour elle de nombreuses fois, sachant qu'à chaque fois c'était elle qui se sentait un peu plus mal. Il lui semblait que c'était à partir de là qu'il avait commencé à réfléchir à sa voie.
Zoé, elle, était arrivée à peine un an avant qu'il ne prenne son indépendance, mais ça ne l'avait pas empêché de s'y attacher tout aussi vite. Le contraire aurait été impossible.Une fois que Louise l'eut lâché, ce fut Zoé qui prit le relais et sauta pour s'accrocher à son cou. Bill dut alors la porter afin de pouvoir avancer. Il marcha jusqu'à la salle à manger avec la fillette dans les bras, souriant à ses parents qui l'attendaient.
« Comment vas-tu chéri ? » ; Bill avança pour aller déposer un baiser sur chacune de leurs joues, Zoé toujours suspendue à son cou.
« Bien, et vous ? »
« On est heureux de te voir. » ; souriant, Bill baissa les yeux vers Zoé. Quelques-unes de ses boucles retombaient devant ses yeux et il les poussa en arrière pour embrasser son front.
« Moi aussi, ça me change. En plus la cuisine ici changera de mes sandwichs et salades. »
« Mais pourquoi tu te prépares pas des petits plats à emporter ? » ; lui demanda sa mère, sourcils froncés. Bill haussa une épaule et alla les rejoindre à table en gardant la petite sur ses genoux.
« J'ai pas le courage. Quand je rentre je suis mort et le matin je dois déjà réunir tout mon courage pour émerger alors... »
« Pffff, flemmard. » ; le taquina Louise en piquant distraitement une chips au milieu de la table.
« Hé ! » ; la jeune fille fronça le nez au ton autoritaire et maternel. « Tu pourrais patienter un peu. On a même pas encore servi l'apéritif. »
Après quelques regards provocateurs échangés, les boissons furent servies et le grignotage enfin autorisé. Les filles s'en donnèrent à coeur joie pendant que Bill racontait distraitement sa semaine. Il était évident qu'il devait garder le secret mais pouvoir parler de la façon dont ça se passait en général lui faisait du bien. Ici, il pouvait tout dire. Personne ne le jugerait jamais même s'il balançait soudainement que ce boulot pour lequel il s'était tant battu n'était plus ce qu'il voulait. Contrairement à la majorité des personnes qu'il côtoyait, il pouvait s'estimer heureux. Sa famille était celle que tous ces gens devraient avoir.
« Y a des enfants aussi là-bas ? » ; lui demanda Zoé de sa petite voix. Bill hocha la tête.
« Pas beaucoup, mais oui. Il y a un garçon plus petit que toi. »
« Ah bon ? Pourquoi ?! » ; l'androgyne haussa une épaule, sachant qu'elle ne comprendrait pas et que, de toute façon, il ne pouvait rien dire.
