XIV. Traversée des déserts d'Hoznaghir

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L'astre du jour perça l'horizon et vint éclairer le sentier rocailleux qui grimpait devant nous en serpentant le long des versants abrupts. En bas, Koreb s'effaçait derrière le voile de nuées matinales.

Nous passâmes le premier col balayé par les vents. Derrière les sables qui tourbillonnaient se dessinèrent peu à peu les contours de l'ancienne acropole. Abrités par une végétation qui formait un rempart naturel, les édifices se dressaient vers le ciel sombre. Le vent paraissait se lever encore. Nous traversâmes les allées désertées par les pèlerins. Ici avaient été érigés, au fil des millénaires, une multitude de sanctuaires consacrés à autant de cultes. Le sable nous aveuglait. L'air s'engouffrait dans les voûtes et entre les vieilles colonnes en de lugubres hurlements.

Hoggar cria pour se faire entendre :

— Par Odhmar, cette tempête va nous retarder. Continuons jusqu'aux mines. Nous nous abriterons une fois là-haut.

Esval donna de la voix à son tour :

— Hoggar a raison, il n'y a qu'une seule piste qui y mène, nous ne pouvons pas nous perdre.

— Allons-y, criai-je, si les vents devaient gagner en force ces ruines ne nous protègeraient pas, c'est certain. Esval, à combien sommes-nous des mines ?

— Deux heures environ. Moins si nous forçons la marche.

— Nous n'avons pas le choix, dis-je. En route !

Nous nous drapâmes dans les solides toiles que nous avait procurées Tuzlo le valet et, par vent de face, montâmes l'allée principale de l'acropole vers une porte de pierre tournée vers l'est.

Nous allions franchir l'enceinte quand nous aperçûmes sur notre droite deux silhouettes sous l'arche d'un autel, face à un mégalithe que nous devinions à peine dans les nuages de poussière. L'une d'elle parût nous faire un signe. Hoggar retroussa sa robe et garda une main sur le pommeau de son arme. Nous nous tenions prêts à combattre. Alors que nous approchions des deux ombres, je m'aperçus que l'une d'elle était agenouillée et paraissait se prosterner. Les similoïdes pouvaient user de tels subterfuges pour prendre l'ennemi par surprise, mais je les connaissais pour les avoir combattu à maintes reprises et mes sens étaient suffisamment développés pour les détecter, même à bonne distance. Alors que nous arrivions presque à leur hauteur, je ne pressentais pas de danger et aucune hostilité n'émanait des deux créatures. Nous restions sur nos gardes et guettions le moindre de leur gestes.

Hoggar lança d'une voix puissante :

— Hé ! Nous allons jusqu'aux mines de sel. Savez-vous à quelle distance elles se trouvent d'ici ?

Aucune réponse ne se fit entendre.

Nous approchâmes encore. Maintenant nous pouvions distinguer nettement les deux êtres. Leurs visages fins couverts d'écailles et leurs yeux verts étincelants fendus d'une pupille verticale évoquait leur ascendance reptilienne. Coiffés d'une pièce de cuir lacée et vêtus comme nous de toiles épaisses, ils laissaient voir à leur ceinture des sabres jōvoïdes du plus bel éclat.

Esval estima à voix basse :

— Des nomades Uddaki. Du moins... ils en ont l'apparence.

— Ce ne sont pas des répliquants, assurai-je.

— Nous n'allons pas tarder à être fixés, conclu Hoggar.

Une des deux créatures s'avança et parla d'une voix claire :

Les Forêts d'AcoraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant