45

6 1 0
                                    


Bordure du champ d' astéroïdes de Nerolupus.

La procédure de réveil s' activa. Les cryostases passèrent en phase de régénération. Nous étions à mi-chemin de notre voyage vers le quatrième Theluad.

— Nous sommes en approche de l' ancienne cité spatiale de Daü Cepp, Jaadhur.

— Nous allons y faire une halte pour recharger les jauges et nous restaurer. Il y a des risques, mais nous n' avons pas le choix. Ne sors de furtivité que lorsque nous serons en visuel. Je connais ce secteur, il foisonne de pillards.

Hoggar vint s' installer sur son siège de copilote. Il était toujours un peu maussade après un vol-lumière.

— Daü Cepp ! bougonna-t-il à la vue de la structure démesurée qui dérivait dans l' espace. Dès le réveil, voir un tel cloaque me donne envie de retourner dans la cryostase !

— Que fait Esval ? lui demandai-je.

— Sur l' aire de reconditionnement. Il bondit et virevolte comme un ouistiti, par Ojhmyr ! — Parfait.

La cité spatiale de Daü Cepp avait fait les heures de gloire des conglomérats marchands de l' empire alkorien. À la fin des guerres sombres, elle avait été laissée à l' abandon, livrée aux mains des contrebandiers de métaux qui la dépeçaient pièce après pièce depuis deux cyclocosmes sans jamais en voir la fin. Un relais d' approvisionnement et de réparation des plus irréguliers s' était greffé à un complexe destiné à accueillir les voyageurs aventureux.

Un droïde qui puait la rouille et les circuits grillés nous accosta dès que nous débarquâmes du vaisseau. Il émit un bourdonnement interrogatif et attendit que je lui parle pour reconnaître la langue qu' il devait employer afin de communiquer avec nous.

— Nous venons faire les niveaux de propulsion du vaisseau et nous restaurer. Avez-vous du fluide photonique et de quoi nous loger ?

— Tzzz... Nous pouvons faire cela. Pour restaurer et fluide photonique, c' est suivre moi.

Son humain était très approximatif. Je fis signe à Hoggar de rester près du vaisseau pour surveiller les opérations. Esval et moi suivîmes l' automate qui boitait en cliquetant. Nous entrâmes dans ce qui devait être le hall d' accueil du complexe. De lourdes chaînes tombaient des hauteurs de la salle ; parfois, au bout de celles-ci, tels des trophées de chasse, pendaient des pièces biomécaniques que je ne parvins pas à identifier. Accoudés à quelques tables improvisées, des pirates stellaires lorgnaient vers nous d' un air patibulaire. Plus loin, dans la pénombre, de grosses hôtesses dévêtues gloussaient lascivement. Un vrai cloaque, encore plus glauque que ceux des bas-fonds de Tsebora.

Un mastodonte, appartenant à la belliqueuse espèce des Surukks, vint à notre rencontre au guichet, alors que le droïde déglingué enregistrait notre astronef. Il beugla entre les deux défenses qui dépassaient de ses lèvres charnues :

— C' est fous faisseau jaffath vuste arrifé ?

Je me tournai vers lui et fixai ses deux petites pupilles rouges qui brillaient de convoitise.

— Oui, c' est nous, vaisseau jaffath. On peut faire quelque chose pour vous, l' ami ?

— Ouif. Combienf ?

— Combien quoi ?

— Combienf pour faisseau ?

— Il n' est pas à vendre, l' ami.

Les Forêts d'AcoraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant