Dead End (Terminé)

Chapitre 58

Point de vue : Louis

Seul le son des gouttes s'écrasant sur le sol me fit revenir à la réalité. Oui, j'étais bel et bien là avec Alan, le père d'Harry dans une cave, au fond de son jardin en pleine nuit. J'avais la gorge qui se bloquait d'un seul coup, et j'avais l'impression de ne plus avoir assez de salive pour l'humidifier, tellement que la situation était perturbante. Voire même irréaliste.

Alan fit entrer la clef dans la serrure, et la déverrouilla dans un silence d'église. Je dansais un pied sur l'autre, mal à l'aise. Que pouvait-il y avoir de si dangereux dans cette pièce ? La crainte d'Harry de me voir entrer là-dedans refit surface et je reculai d'un pas sans m'en rendre compte.

- Que se passe-t-il, Louis ?

Alan semblait avoir remarqué à quel point j'étais stressé. En même temps, il y avait de quoi.

- Rien.

Il savait pertinemment que je mentais mais il ne releva rien. Heureusement, d'ailleurs.

La porte s'ouvrit. Tellement doucement que j'avais l'impression que le temps ralentissait de quelques secondes.

- Louis, je ne vais pas te faire de mal, me prévint Alan. Je veux juste-

- Je sais.

Je déglutis nerveusement. Déjà que j'étais plus stressé qu'il ne le fallait, je ne voulais surtout pas qu'il enfonce le couteau de la plaie.
Je détestais cette situation...

- Merde.

Alan jura entre ses dents, alors qu'au loin, résonnait une alarme.

- Qu'est-ce que c'est ? je demandais en me tournant vers lui.

Il fit volte-face.

- C'est l'alarme incendie de la maison.

Sans un mot de plus, il me laissa seul et se précipite vers l'entrée de la cave.

L'alarme... incendie ?

Je mis quelques minutes à me rendre compte de toutes ces choses qui s'accumulaient. Le regard dans le vide, je sentis mon cœur peser tel une enclume à l'intérieur de moi.

Qu'est-ce qui m'arrive ?

Pourquoi est-ce que je ne bougeais pas d'un pouce, alors que la maison d'Harry était sans doute en train de brûler ?

Mes pieds étaient comme implantés dans le sol, ma respiration s'accélèrait et j'entendais déjà les camions des pompiers arriver. Des larmes coulaient sur mes joues sans que je ne m'en rende vraiment compte, puis, je fis demi-tour pour courir le plus vite vers la sortie.

Les bruits deviennaient de plus en plus bruyants, mes yeux étaient devenus lourds. La lumière qui éclairait la porte de la cave avait viré en un rouge sombre, presque effrayant.

- Putain !

Je hurlais en sortant de la cave, et j'aperçu enfin la maison d'Harry ensevelie sous les flammes. Tout s'écroulait et je pleure encore plus.

Pitié, faîtes qu'il ne soit pas à l'intérieur !

Je me précipitais à l'intérieur sans prendre le temps de boucher mon nez. Je me fichais de savoir si j'allais y rester ou pas, mais je voulais que lui s'en sorte vivant. Une partie du salon s'était déjà écroulée et la cuisine nageait dans les flammes. J'appellais Harry de toute mes forces, mais rien.

Il ne répondait pas.

Je montais à l'étage, une marche menaça de me faire tomber mais je me maintins à la rampe. Je vérifiais partout, mais aucune trace d'Harry.

- Harry bordel, réponds-moi !

J'entendais déjà la voix des pompiers ordonner qu'on éteigne ce putain de feu, et même, certains s'affoler en se demandant s'il y avait encore des gens à l'intérieur.

Je cherchais dans la salle de bains, puis dans la chambre de Gemma.

- Putain, Harry !

Je hurlais. Mes yeux me brûlaient à cause de la chaleur et je commençais à étouffer. Je continuais à avancer. L'air devint irrespirable. Au bout d'un moment, ma respiration se coupa d'un coup. Je suffoquais, cherchant de l'air mais c'était impossible.

- Har-

Je sentis mon corps me lâcher, puis mes yeux se fermer peu à peu alors que les flammes dansaient toujours autour de moi.

- Louis !

Je ne pus pas tourner la tête pour voir qui c'était qui se précipitait vers moi mais je reconnaissais sa voix.

C'était lui, c'était Harry.

- Louis, regarde-moi putain !

Il secouait mon corps dans tous les sens. Il paraîssait paniqué. Je peinais à ouvrir mes yeux pour le voir, et quand je vis enfin ses yeux verts plantés sur moi, quelque chose m'interpella.

- Harry, ton visage... On dirait qu'il est...

- On a pas le temps, putain ! il me coupa. Tu sais où est Gemma ?

Je hochais la tête de gauche à droite pour lui répondre et il me prit sur son dos. J'avais l'impression d'être minuscule contre lui.
Harry se dirigea en courant vers ce qui semblait être sa chambre.

Putain, j'y vois plus rien...

- Qu'est-ce qui... s'est passé ? je demandais péniblement en toussant, en gardant mon visage dans le cou tatoué du bouclé.

- On a pas...

Il allait encore repousser mais je n'en pouvais plus de tout ça.

- Harry... Je t'en prie... Dis-moi.

Je toussais, et mon cœur me fait mal.

- J'aurai jamais dû commencer de putain de jeu à la con !

Il hurla en ouvrant la fenêtre. Harry pleurait à chaudes larmes.

- Harry.

- J'aurai jamais dû t'impliquer là-dedans ! Tout est de ma faute, Louis ! J'ai ruiné ta vie dès que je t'ai rencontré !

J'allais répliquer mais je vis des tuiles. Nous étions sur le toit.

- Harry, tu n'y es pour rien...

- Si ! Si, putain ! J'ai tout fait pour te faire souffrir, pour te manipuler, pour que je puisse enfin en finir !

Il hurlait à s'en détruire les poumons. Il pleura encore plus alors qu'il s'approcha du bord.

- Attends, Harry ! je pleurais à chaudes larmes moi aussi. Qu'est-ce que tu veux dire ?

Avant qu'il n'ai pu répondre, je sentis mon corps flotter. Il venait de me laisser tomber. Le temps passait désormais au ralenti. De l'air chaud frôlait ma peau.

- Harry !

Je tendis mon bras. Comme si c'était la dernière fois que je le voyais. Mais je voyais son corps toujours debout, et ses yeux qui devaient me regarder tomber.

- Har-

J'atterris violemment dans des buissons. Des branches me traversaient le bas du dos, mais je n'y portai pas attention. Je m'éloignai de la maison pour voir le premier étage s'écrouler sans pouvoir rien faire.

- Harry, putain !

J'éclata en sanglot et quelques minutes plus tard, je m'endormis, replié sur moi-même en attendant que tout s'arrête.