J'étais complétement lessivée mais bon sang, qu'est-ce que ça faisait du bien de se défouler !
Rule était assis sur le bord de la fenêtre et fumait une nouvelle cigarette dans l'air frais de la nuit.
Il me regardait halletante, épuisée, reprendre mon souffle allongée sur le lit.
Et lui, pas plus fatigué qu'avant notre petite bagarre ou je m'étais évertuée à lui montrer - en vain - que je pouvais le maitriser à mains nues si je le voulais, s'amusait de la situation alors que sa respiration était des plus paisibles.
- Effectivement, faut vraiment que je t'apprenne à utiliser ton corps un peu plus efficacement.
- Te fatigue pas, lui répondis-je les yeux fermés et la voix résignée, j'ai une force de chaton. Tu n'arriveras pas à me faire devenir Wonder Woman.
- Y a pas besoin d'avoir beaucoup de muscles pour se défendre efficacement. Il suffit de connaitre les points vitaux. Et quelques méthodes.
- Mouais...
- Je te le garantie.
- Et toi, tu as tout appris grâce à ta formation militaire ?
- J'ai d'abord appris à me battre gentiment contre mon frère, puis dans la rue. La formation militaire est venue ensuite. Dans ce cadre, on m'a aussi incité à pratiquer le krav-maga.
- Le quoi ?
- Le krav-maga. C'est une méthode d'autodéfense d'origine israélo-tchécoslovaque. Simple et efficace. Maintenant, c'est utilisé dans le monde entier par des unités de forces spéciales.
- Tu est plein de ressources, à ce que je vois...
Rule étouffa un rire discret et tira sur sa cigarette alors que la fraise rouge se consumait sur fond de ciel noir.
- Tu ne m'as pas dit, Rule. Pourquoi tu est rentré dans les rangs de l'armée ?
- Parce que je partais en couilles. Genre, vraiment en couilles. Il me fallait un truc pour me cadrer et me canaliser, je le savais. Je voulais pas finir comme certains mecs du quartier qui ont plus que mal tourné ou nous ont quitté. J'avais pas envie qu'on appelle ma mère parce qu'on m'aurait retrouvé dans un sale état.
Je le regardais me parler une partie de son histoire. Il fixait la lueur chaude de sa cigarette sans tourner le regard vers moi. Je sentais que ce n'était pas évident pour lui de me parler, alors je me taisais et j'écoutais en silence.
- Depuis le début de l'adolescence, je pratiquais le streetball. C'est du basketball de rue, sur des terrains en goudron sauf qu'en gros, y a pas de règles. C'est parfois brutal mais j'aimais trop ce sport. Dès que je rentrais du collège, je venais sur le terrain. Quand je repartais, il faisait nuit depuis longtemps. Pareil le week-end. Toute ma vie tournait autour du streetball. Et je me suis fait répéré comme ça. Au début, je voulais pas quitter la rue mais je me suis laissé convaincre de rejoindre les parquets. Sur le terrain, j'étais meneur. Et le plus petit du terrain si bien que lors d'un tournois, le mec de la securité ne voulais pas me laisser accéder au terrain parce qu'il ne me croyait pas quand je lui disais que je faisais parti des joueurs. J'étais vraiment bon et on me prométait une carrière jusqu'au jour ou en montant au panier en même temps qu'un adversaire bien plus lourd que moi, on est tous les deux retombés au sol et son genou a explosé le mien contre le sol. Mon os était en morceaux. Ça faisait pleins de gravillons sous ma peau. J'ai été opéré et j'ai passé 6 mois en béquilles. Et pendant ce temps, alors que je pouvais plus me défouler au basket, j'ai perdu trois potes dans un accident. C'était pendant une soirée, ils étaient bourrés, ils ont pris la voiture d'un mec pour aller chercher de la musique et ils sont rentrés dans un mur. Intérieurement, j'ai dégoupillé. Et je suis rentré dans ce régime élitiste de l'armée parce que je voyais plus que ça pour pas faire plus de conneries que j'en faisais déjà.
Je regardais Rule avec de grands yeux humides. Du haut de nos 18 ans, ce mec avait déjà vécu plus de truc que certains vieillards. Et encore, j'étais loin de tout connaître de lui.
Il était fait de cicatrices qui semblaient l'avoir forgé. Il se dégageait de lui une force de caractère incroyable, une puissance de frappe qu'il n'aurait pas dû avoir à son âge.
Plus je le découvrais, lui et son passé, plus je le trouvais fascinant. Oui, c'était ça ; Rule me fascinait.
Rule sauta du bord de la fenêtre et me rejoingnit sur le lit alors que j'était désormais assise en tailleur.
Il se planta en face de moi, s'assit à son tour et passa mes jambes de part et d'autre de sa taille alors qu'ils glissait ses cuisses sous les miennes.
Ainsi enchevêtrés, nous n'avions jamais été aussi proches. Aussi intime l'un avec l'autre.
- Et toi, alors ? Qu'est-ce que je dois savoir sur toi ? me demanda-t-il avec curiosité.
- Rien de bien passionnant.
- Laisse-moi en juger.
- Et bien, voyons. Je suis fille unique et mes parents se sont séparés quand j'avais 10 ans.
- Et c'est une blessure pour toi ?
- La plus grande de ma vie. Mais c'est comme ça.
- Et après ? Parle-moi de toi, Angelina.
- J'ai toujours été douée a l'école mais j'ai la langue un peu trop pendue. J'ai un caractère très affirmé et après le divorce de mes parents, ça c'est traduit en insolence. Avec tout le monde. Mes parents, les professeurs, même des inconnus. En fait, je me fou un peu de tout et de tout le monde. Je m'attache difficilement au gens, sauf en amour. Là, c'est un peu le contraire. Peut-être pour compenser un vide. Ou une connerie d'explication psychologique dans le genre. Va savoir.
- Et bien finalement, il y a des choses à dire sur toi, tu vois.
- Sûrement.
- Et bien moi j'aime ce que je vois. Tu est une fille vraie et entière. Et j'aime cette bouche insolente.
- Parce que tu n'en a pas encore fait les frais.
- Je saurais faire avec, ne t'inquiète pas trop pour mon cas.
Sur ces mots, Rule approcha dangereusement ses lèvres des miennes et se les appropria tendrement, m'arrachant le plus grand frisson de toute mon existence.
___
"Le cœur a ses raisons que la raison ignore".
___
Pour respecter l'anonymat des personnes qui interviennent dans ce récit, leurs noms et les lieux de la véritable histoire ont été changé.
#romance #triangleamoureux #histoirevraie
VOUS LISEZ
Il était une fois Lui, Lui et Moi [Roman complet publié]
Ficção AdolescenteOn n'est jamais trop jeune pour tomber dans le piège d'une relation amoureuse toxique. A dix-huit ans à peine, l'enfer portait pour moi le doux prénom de mon petit ami. Lorsque mon M. Infidèle a rencontré M. Malpoli, il croyait s'être fait un allié...