Zootopie

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Apolline

- Apolline ? Ils font quoi Ethan et Kate, là-bas, dans le jardin ?, me demande Esther en s'empiffrant de chips.

- Je ne sais pas, ils parlent. Ils n'ont pas eu beaucoup de temps tous les deux aujourd'hui. Et puis, au pire, ça ne me concerne pas trop.

- Tu ne veux pas leur proposer de venir avec nous ?, insiste-t-elle. On va regarder Zootopie avec Sacha en attendant que Maman et Papa finissent de préparer à manger.

- Bon, si tu veux, mais ils ont seize ans, tu sais, ils ont peut-être un peu passé l'âge.

Je quitte Esther et Sacha pour rejoindre ma cousine retrouvée, mais arrivée à la hauteur du bow window, je me fige. Kate est assise sur le canapé, la tête entre les mains, en pleurs, et Ethan se fait repousser violemment. Je ne devrais pas être là, pensé-je. J'essaie de faire demi-tour le plus discrètement possible, quand Ethan m'adresse un sourire penaud avant de partir à son tour. Ce n'est pas du tout la journée parfaite que j'avais prévue. Je suis désolée pour Kate, mais je ne peux pas transformer sa vie en conte de fées. J'ai fait de mon mieux, pourtant. Je ne suis pas une fée, encore moins une princesse, mais j'aimerais retrouver Kate, ma Kate, la vraie, l'authentique, celle avec qui je jouais enfant. Et je n'ai qu'un moyen de la retrouver : c'est d'aller la voir. Et c'est ce que je fais. Parce qu'à mes yeux Kate est une vraie princesse.

Je m'assois sur le canapé à côté d'elle en laissant un espace vide entre nous deux. C'est peut-être que je n'ose pas être si proche d'elle. C'est peut-être que, d'une certaine façon, Kate m'effraie. Je sais par Ethan qu'elle a été exposée à des choses beaucoup trop horribles pour une fille de seize ans. C'est peut-être ce qu'elle a vécu qui m'effraie. Non, je pense avoir mis le doigt dessus. C'est la maturité que Kate dégage. Elle est calme, posée, tout le contraire de moi. Ces évènements l'ont grandie, ça se voit. Elle en est sortie plus forte, bien qu'en ce moment elle semble aussi vulnérable qu'un chaton.

- Kate ? Ça va ?

Hochement de tête. Elle m'écoute et je parle à nouveau.

- Je ne voulais pas que ça se passe aussi mal pour toi aujourd'hui. Je ne sais pas ce qui s'est passé pour Ethan et toi, ni pourquoi il est parti, mais sois sûre d'une chose : il t'aime.

Mes joues rougissent sûrement tandis que je continue à parler, mais je n'en ai plus rien à faire.

- Il t'aime et ça se voit. Dans la manière qu'il a de te regarder. De t'embrasser. De te prendre la main. C'est beau, je trouve ça vraiment beau. J'aimerais bien qu'un jour un garçon me regarde de cette manière.

Kate m'interrompt.

- Je ne pense pas que ce soit ça le problème. Je sais, c'est un peu bête, mais j'ai pensé à ma vie. Je me suis fait plaquée par mon copain. J'ai rencontré à nouveau le fils des meilleurs amis de mes vrais parents par hasard. J'ai retrouvé mon parrain et ma marraine. J'ai découvert que mon oncle et ma tante n'avaient jamais été mes parents. Mes vrais parents ont été assassinés. J'ai soupçonné mon oncle, j'ai retrouvé la mémoire, j'ai revécu la scène du meurtre, mon meilleur ami a fait une tentative de suicide et m'a embrassée, mon oncle a voulu exiler Ethan et sa famille, nous avons fui, et mon oncle a fait un malaise en se rendant au commissariat et est toujours à l'hôpital. Non, vraiment, je pense que le problème, c'est moi.

- Tout ce qui t'est arrivé, Kate, ce n'est pas de ta faute. Tu n'y peux strictement rien, c'est indépendant de ta volonté. Ce n'est pas de ta faute.

Kate me prend la main.

- Apolline ? Merci.

- J'ai une question stupide.

Passons aux choses sérieuses...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant