Monster -NamGi-

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Il était assis, là, face à ce miroir. Et il avait du mal à se voir réellement. Dans le reflet, il pouvait voir le corps encore endormi de son amant, enroulé entre les draps, un bras replié sous l'oreiller. Cette vision lui arracha un sourire, puis son visage reprit cette expression triste, maussade, alors qu'il croisait son propre reflet.

Machinalement, il écarta une mèche blanche lui tombant sur le front puis tâtonna sur sa coiffeuse pour trouver son pot de crème. Transparente, imperceptible sur son visage. Il ouvrit la petite jarre, et prit une noisette de gel qu'il frotta entre ses mains pour le réchauffer, avant de l'étaler sur son visage dans des mouvements méticuleux.

Venait ensuite le flacon de fond de teint. Une pompe, puis deux, et enfin trois sur le dos de sa main. Dans un geste lent et automatique, il referma la fiole en verre et la reposa à sa place avant d'attraper son pinceau. Il tapota une fois, puis deux avant d'appliquer consciencieusement la matière couleur caramel. Il était fier de l'avoir travaillé si longtemps, elle se fond parfaitement avec le teint si particulier de sa peau.

La première couche sécha. Il en profita pour observer le jeune homme. Il était tellement parfait ainsi, les cheveux en désordre d'une nuit délicieusement trop agitée. Les rayons du soleil se reflétaient sur sa peau pâle, apportant l'harmonie manquante à ce tableau journalier.

Une pompe, deux pompes, trois pompes, sur le dos de sa main. Dans un geste lent et automatique, il referma la fiole en verre et la reposa à sa place avant d'attraper son pinceau. Il tapota une fois, puis deux avant d'appliquer consciencieusement la matière couleur caramel. La couvrance sembla enfin lui convenir et il reposa son matériel dans la petite boîte comportant en comportant encore une bonne dizaine d'autres.

Dans le tiroir à sa droite, il prit un petit tube qu'il dévissa puis appliqua en deux triangles identiques sous ses yeux. Du bout de son majeur, il tapota longuement jusqu'à ce que ses cernes ne soient définitivement plus visibles. Il les trouvaient laides, vestiges de ses nuits sans chaleur ni sommeil. Et ce n'était pas à cause de son amant, loin de là. Souvenirs durement enfouis et cauchemars incessants étaient la cause de ses insomnies.

Un long soupire pourtant contenu lui échappa, puis il inspira profondément avant de tendre à nouveau la main jusqu'à une petite boîte ronde, fine aux inscriptions dorées. Il l'ouvrit et s'efforça de ne pas croiser son regard dans le petit miroir grossissant. S'observer tous les matins était déjà bien difficile, il n'avait pas besoin de voir la monstruosité en gros plan.

Un nouveau pinceau, et il effleura à plusieurs reprises la poudre compacte au couleur de la terre pour en prélever quelques pigments. Les secondes passes, puis il frappa l'embout de l'instrument contre son poignet pour retirer le surplus de produis. Les pellicules vinrent s'échouer sur la moquette. Qu'importe, l'aspirateur et tout disparaîtrait.

Il creusa ses joues, puis fit deux ou trois vas et viens à l'aide du pinceau avant d'estomper la matière, réchauffant quelque peu le teint morne et bien pâle qu'il arborait chaque matin au réveil. Le gémissement plaintif de son amant l'arrêta brusquement et il le regarda du coin de l'œil. Profondément endormit.

Il ferma un instant les yeux avant d'attraper une poudre à peine teinté qu'il déposa sur ses pommettes, apportant un peu plus d'éclats lorsque la lumière caressait son visage.

Son teint sembla enfin lui convenir. Il s'aspecte un moment, jamais trop longtemps. Deux de ses doigts effleurèrent sa peau douce. Il déglutit.

Une palette de couleur se retrouva entre ses mains. Il n'aimait pas vraiment cette partie, où il se sent obligé de se regarder de trop près. Nouveau pinceau, plus petit, plus fin. Il commença par le creux de sa paupière, avant de dégrader la couleur sombre vers l'extérieur. Le maquillage était une façon pour lui de se cacher, d'oublier le temps d'une journée le abominable qu'il était réellement. Même son petit-ami n'en savait rien, et c'était mieux ainsi.

Il était presque convenable, presque caché.

Un nouveau pot, une nouvelle crème gélatineuse sans odeur qu'il réchauffa entre ses mains avant de l'appliquer dans ses cheveux. Il modela quelques mèches. Puis il essuya ses mains sur un chiffon traînant non loin.

Sur un présentoir près de la lampe de bureau, d'innombrables bijoux. Il enfila quelques bagues sur son pouce, son index, puis met en place sa boucle d'oreille.

Il était prêt.

À ce moment là, NamJoon s'autorisa enfin un sourire.

Quittant le tabouret sur lequel il était installé, il s'approcha du lit où YoonGi reposait encore comme chaque matin, endormi. Il se pencha, et déposa ses lèvres au creux des siennes avant de se diriger vers la cuisine pour y préparer le thé et le café.

Il n'était plus le monstre.

𝙳𝚛𝚊𝚋𝚋𝚕𝚎𝚜Où les histoires vivent. Découvrez maintenant