Colère. 30

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J'ai les yeux dans le vide et je parais au bout de ma vie.
Je dois ressembler à une échappée d'asile psychiatrique.

Si on refait un bilan.
Non, vous aimez pas ça ?
Oké j'en fais pas.

Je me sens... Pathétique. J'ai l'impression d'avoir tout laissé tomber d'un coup, de plus avoir de force.

Nan, jsuis vraiment dans l'excès là.


Je me suis pas donné autant de mal pour chercher mon père et le voir de plus près pour le laisser partir comme ça, quand même ?

Non. C'est trop injuste.

Si c'est pour vivre ici avec une mère qui est brisée par mes actes, ça en vaut pas la peine. J'ai le droit de vivre normalement...

Je prends une grande décision.

Ni une ni deux je me lève, cherche dans mon armoire des affaires de rechange, agrippe mon chargeur de téléphone, mes affaires de cours, 200€ en liquide et fourre le tout dans un sac à dos. Ensuite je sors de ma chambre pour aller prendre ma trousse de toilette.

Une fois que tout est prêt, je passe en trombe dans le salon, histoire d'aller plus vite vers la porte et de quitter cet appart de merde.

J'ai pensé trop vite.

À peine suis je entrée dans le salon que ma mère me saute dessus.

- Tu vois, tu fuis là. Me dis pas que tu vas juste faire un tour.
- Bingo, je me casse, ça te va, là ?
- Au moins j'ai la vérité. Mais Alma... Me fais pas ça.
- Faudrait savoir. Un coup tu me sors que t'aurais dû avorter, et maintenant tu me demande de ne pas partir ? Apprends à retenir tout ce que tu dis, juste pour être crédible après.

J'essaie de me faufiler en direction de la sortie, mais elle me bloque encore le passage.

- Ma chérie... Je suis tellement désolée...
- T'as dit que lui et moi, on était pas des gens bien.
- J'ai parlé trop vite...
- Si tu m'avais tout dit directement, tout aurait été différent. Heureusement que mamie a été là.
- Parlons en, de mamie. Quand est ce qu'elle t'a dit ça ?
- Va lui parler toi, elle au moins a eu le courage de dire toute la vérité.

Elle pâlit.

Ça y est, j'ai touché la corde sensible.

- Elle t'a dit quoi, exactement ? me chuchote t elle.
- Que vous vous êtes rencontrés jeunes. Beaucoup trop jeunes. Que vous vous êtes installés très vite ensemble, que t'as fini par aller voir ailleurs, qu'il t'a plaquée, qu'il a fait une chanson sur toi qui s'appelle Sale pute et qui te va très bien. La suite tu la connais je pense.
- Wendy avait raison, susurre t elle. J'ai fait que des conneries...
- Wendy elle est plus là pour te faire regretter ce que t'as fait. Laisse les morts où ils sont.
- Wendy... Pourquoi je ne t'ai pas plus écoutée ?

Je la regarde, quelque peu interloquée.
Ça fait au moins trois ans qu'elle n'a pas reparlé de Wendy, son ancienne meilleure amie.
Sûrement une folie passagère.

- Maman ?

Elle secoue la tête et son attention se reporte sur moi. Ses yeux se plissent et elle se met à ricaner.

- Eh bien, puisque tu veux partir, pars. T'es presque majeure, tu peux faire ce que tu veux. Mais sache que si tu pars, je ne veux plus te revoir. Tu m'as fait tellement de mal...
- Toi aussi tu m'as fait du mal, je rétorque en remettant correctement mon sac sur mes épaules. Et crois moi, je suis pas prête de revenir. À jamais. Ah, et puis tous mes vœux de bonheur avec Claude. Si tu continues tu vas réussir ton objectif... Te faire tous les mecs de la région.

Je force le passage et cours vers la porte.

Pas de regard en arrière.

Elle n'essaie même pas de me retenir.

Sa décision est définitive. Véritablement.

Une fois sur le palier, j'essuie une larme qui hésite à tomber, prends une grande inspiration et dévale les escaliers.

Je fais une grosse connerie.

Je le sens.

Je le regretterai toute ma vie.

Parce que ma mère, même si ce qu'elle a fait est impardonnable, elle est et restera toujours ma petite maman.
Celle qui m'a mise au monde.
Celle qui m'a nourrie.
Celle qui a tenté de m'aimer comme elle a pu.
Celle qui m'a appris la vie telle qu'elle la vivait, malgré elle.

Elle aura toujours une place dans mon cœur.
Même si le contact avec elle ne reviendra probablement plus jamais.




Je ne sais pas où je peux aller. Avec 200€, je peux me payer une chambre d'hôtel pour quelques jours grand maximum, mais je peux pas tenir longtemps
Je peux toujours aller voir mamie, mais elle sera la première personne que maman ira voir. Hors de question, donc.
Carlos... Je peux pas le déranger avec ça. Il m'a énormément aidée, mais je peux pas venir m'incruster comme ça au calme chez lui.
Quant aux filles, pas la peine d'y penser. On n'est pas encore assez proches.

Bon. Va pour un motel pas cher alors.


Jamais les étages ne m'ont paru aussi longs à descendre. J'ai l'impression de mettre plus d'un quart d'heure pour arriver en bas.

Je me stoppe juste avant de descendre les toutes dernières marches.
Il y a des gens dans l'entrée.
Sûrement des ptits vieux qui sont allés chercher leur pain et qui discutent du mauvais temps de mai.

Je tends l'oreille, parce que si c'est le cas je n'ai pas envie d'engager une conversation. Ils sont gentils les vieux, mais à chaque fois que je croise ceux de mon immeuble ils me font tout un discours d'une heure sur le sens de la vie.

Mais non, là ce sont des voix de jeunes.

Enfin, celles de Gringe et Orel. Je veux dire, mon père.

Je tends le cou pour voir la scène, et constate qu'il y a Deuklo avec eux.

Soulagée de voir qu'ils ne sont pas partis, je lance :
- Ah, vous êtes encore là !









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Inchallah yaura un ptit double update dans la semaine... 🙄😉

Mon père et ses histoires à raconterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant