Retrouvailles. 45

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Une main sur le ventre, une autre me frottant la mâchoire, j'avance à petits pas dans la ruelle, ignorant tous les messages et appels que je reçois. Mon seul but est de ne pas m'effondrer avant d'arriver à l'appartement.

Je croise peu de gens, encore moins le groupe. S'ils voyaient que je m'en étais sortie, ils ne me louperaient pas.

Le parking arrive dans mon champ de vision. Toujours à moitié plein. Toujours cet aspect déprimant.

Puis là, derrière, l'immeuble délabré.
Qui ne change pas après toutes ces années.

La rime était gratuite.

Je sors de l'ombre de la ruelle puis m'avance sur le parking. Le soleil est quasiment couché, les réverbères peinent à s'allumer.

Je me mets à trottiner vers la grande porte métallique puis lève la tête vers l'appartement. Une faible lumière perce les rideaux. Elle est donc ici, et vu l'heure elle ne devrait pas tarder à aller dormir. Je dois me dépêcher.
J'ai toujours une douleur qui me lance au niveau de l'abdomen. Espérons que ça ne va pas me lâcher.

Je tape le code et la porte s'ouvre. Rapidement je gravis les escaliers, et une fois posée devant la porte en bois caractéristique de mon ancien chez moi, je prends une grande inspiration.

Ce n'est plus la peine de reculer.

Je toque trois coups secs qui semblent se perdre en écho dans le vide.

J'attends deux minutes ainsi. Puis je décide d'actionner la clenche, parce qu'elle est sans doute partie se coucher.

La porte s'ouvre donc doucement.
Une forte odeur de renfermé me saute au nez. S'y ajoute des senteurs d'alcool très fortes.

Je m'avance à petits pas vers le salon, où je la découvre recroquevillée sur le canapé, endormie.
Cinq bouteilles renversées sur le sol.

Quand Rémi disait qu'elle n'allait pas bien, il n'y est pas allé à moitié.

Sa poitrine se soulève lentement au fil de sa respiration. Son visage paraît extrêmement fatigué, les cernes sous ses yeux en témoignent.

D'un coup elle les ouvre et me dévisage.

Elle reste silencieuse une poignée de secondes, plissant les yeux en ayant l'air de réfléchir.

- Saleté d'alcool, j'ai encore des visions, lâche t elle d'une voix rauque en se baissant pour ramasser les bouteilles.

Pétrifiée, je la regarde se lever et tituber vers la cuisine en marmonnant des paroles incompréhensibles. Je la suis en silence.

Ai je rêvé ou elle me prend pour une hallucination ?...

Elle est complètement bourrée.

Je l'entends poser les bouteilles dans l'évier puis se laisser tomber sur une chaise.

- Heureusement que j'ai pas gardé ce gosse, chuchote t elle en se prenant la tête dans les mains. Il aurait pas eu la belle vie ce ptiot.

Je frissonne.
Ainsi, elle a bel et bien avorté.
L'espoir de voir un petit frère ou une petite sœur s'envole.

Je viens me positionner derrière elle, en faisant toujours attention à me faire discrète.

J'observe son corps, devenu rachitique depuis le mois dernier. Déjà qu'elle n'était pas bien épaisse, sa maigreur s'est aggravée.
Elle n'est quasiment plus qu'un tas d'os.

D'un coup, son visage tombe sur la table, me faisant sursauter.

Elle dort.

Je soupire. L'alcool et ses effets.

Je m'approche d'elle et analyse son état. Elle pue la vodka, ses vêtements ont l'air de ne pas avoir été lavés depuis belle lurette. Ses cheveux également sont sales.
Une douche s'impose sûrement.

Je passes mes mains sous ses aisselles et tente de la soulever. Pile à ce moment là, je ressens une vive douleur à la mâchoire, encore.

Aouch.

Puis tout mon corps, là où ont été portés les coups, se met à me lancer violemment.

Je me laisse tomber au sol, secouée, ne pouvant plus bouger.
Je parviens cependant à prendre mon téléphone, enfoui dans ma poche, le déverrouille et appelle mon père.

- Alma, bordel, réponds au téléphone ! Tu m'as fait tellement peur...
- Je... Je suis pas bien...
- T'es chez ta mère ?
- Oui.... Elle est bourrée, j'ai mal partout...
- Reste avec moi, où est ce que t'as mal ?
- Partout...
- Ils t'ont fait quoi ces bâtards putain ? Bon j'appelle le SAMU et j'arrive. Bouge pas, empêche ta mère de faire une connerie. Tiens bon.
- Oui...

Je raccroche aussitôt et ferme les yeux.




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Préparation du triple update les gens

Mon père et ses histoires à raconterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant