Orel #7. 53

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- Ta mère a appelé aujourd'hui, me glisse Capucine en caressant mon torse tandis que je fixe le plafond en jouant avec ses cheveux. Elle... Elle nous invite à manger, la semaine prochaine.
- T'as parlé d'Alma ?
- Non. Je pense que c'est à toi de le faire, et pas par téléphone.
- Tu vas voir que ça va pas passer. Mon père va jamais accepter que j'ai eu une gosse cachée et il va aller porter plainte.
- Tu iras lui parler Aurélien. Je refuse qu'Alma se sente coupable de quoi que ce soit.
- Ça me fait rire comment c'est ta pote, toi, maintenant. Tu disais pas ça avant.
- J'ai changé. Je sais m'adapter aux situations et j'ai appris à les accepter. Pas comme toi.
- C'est pas pareil. J'ai des raisons.
- Aurélien...

Quand ma Capute m'appelle deux fois de suite par mon prénom, c'est qu'elle est fatiguée et qu'elle voudrait que je l'écoute.

Mais l'écouter, je le fais déjà tous les jours. J'essaie de prendre des conseils auprès d'elle pour Alma, pour qu'elle se sente à l'aise ici, et avec moi. J'essaie de prendre des conseils pour rattraper le temps perdu et essayer de devenir un bon père pour elle.

Je ne veux pas prendre exemple sur le mien. J'en ai trop souffert, et trop de souffrance conduit à la perte.
Oui bon, j'exagère, mais l'idée est là.

Je soupire.
Que la vie est compliquée. Belle aussi, mais faut les trouver les ptits moments de bonheur simple.

- Ouais. Bah écoute, je leur dirai d'ajouter un autre couvert au dernier moment.
- Non Orel, pas au dernier moment. Tu appelles ta mère demain, ou ce soir si t'es sûr qu'elle dort pas, et tu lui donnes des nouvelles. Ça fait trois mois au moins qu'elle t'a pas entendu. Tu pourrais faire un effort, putain. Elle t'a rien fait, elle.
- Ma famille c'est pas des bisounours comme dans la tienne Capucine.
- Oké j'ai compris.

Et sur ce, elle se tourner, éteint sa lampe de chevet et ramène la couette sur ses seins dénudés.

Même pas un bisou ou un bonne nuit.

Je crois que je l'ai vexée.

Ou alors elle a ses règles.

Blague à part, vous emballez pas.

Le lendemain, quand j'ouvre les yeux, jsuis tout seul dans le lit.
Je tâte son côté. Il est froid.
Trop froid.

Putain.

Je me lève en sursaut. Ses affaires sont encore là.
Elle a juste dû aller courir.

Faut que j'arrête de regarder des séries je deviens parano moi.

Je retourne me rallonger.
Huit heures.
Jme suis pas réveillé aussi tôt depuis le lycée.

Puis la conversation que j'ai eu avec Capute cette nuit me revient en tête.

Appeler ma mère. C'est le programme de la journée.
Flemme.
Procrastination.
Procrastination ?
Nan.
Je vais tenter de me prendre en main au moins une fois dans le mois.

Capucine a raison, ma mère ne m'a jamais rien fait. Elle a juste épousé le connard qui me sert de père.

Oh, quoique... "connard" c'est un peu exagéré. C'est mon daron, et même s'il a été rarement cool avec moi je lui dois la vie.

Je remercierai jamais assez le Bon Dieu d'avoir foutu Capucine Jalony sur ma route.



Vers 14 heures, après m'être rendormi plusieurs fois puis après avoir expliqué la situation à Alma (juste les trucs que j'estime qu'elle doit savoir, c'est à dire on va aller voir ta nouvelle famille bientôt), je prends mon iPhone qui reposait sur ma table de nuit puis cherche le numéro de ma mère.
C'est là que je me rends compte que j'ignorais presque son existence, à cette suite de chiffres.

Ma pauvre maman.

J'appuie sur "appeler" puis attends nerveusement d'entendre sa voix.

- Aurélien ?

Mon cœur se soulève.

- Salut... Maman.
- Oh mon dieu, j'avais peur de ne plus jamais t'entendre. Comment tu vas ?
- Ça va... Je taffe beaucoup, je suis sur un nouveau projet.
- Oui, j'ai vu qu'ils parlaient de toi dans Closer.

Pardon ?

- Tu lis Closer maintenant ?
- C'est pas nouveau tu sais.

Allez vlan. Elle pose ça là au calme et jsuis pas près.

- Excuse moi, je... Je lis pas ce genre de truc.
- On y apprend des trucs intéressants figure toi... Quand ton fils ne t'appelle pas, c'est un bon moyen de savoir ce qu'il devient.

Mais... Depuis quand est elle agressive comme ça ?
Ma petite maman a toujours été bienveillante envers moi, peut être plus qu'avec mon frangin et ma ptite sœur. Sûrement parce que moi j'étais sans cesse dans le viseur de mon père et qu'elle tenait à compenser.

- Bon... Et ils disent quoi de beau, dans Closer ?
- Que tu prépares un nouvel album, mon chéri.

Je respire. Quand elle m'appelle "mon chéri", c'est qu'elle n'est plus vénère et que l'orage est passé.

- Aaah... Je peux pas trop en parler, mais ouais c'est prévu, un nouveau disque.
- Ta grand mère sera contente. Capucine t'a prévenu, pour dimanche ?
- Ouep. Fallait juste... Que je te parle de quelque chose.
- Ça ne peut pas attendre qu'on se voit ? J'ai tellement hâte de te revoir Aurélien. Depuis que tu es sur Paris avec Capucine, on a l'impression que tu ne peux plus nous accorder de temps...
- Tu sais bien que c'est plus compliqué que ça, maman...
- Caen et Paris, c'est pas si loin... Tu pourrais faire un effort pour revenir plus dans le coin.
- À partir de maintenant, je le ferai, promis.
- C'est ton père qui sera heureux aussi.

Je prends le temps de digérer ces paroles.

Mon père ? Heureux de me voir ?

La bonne blague.
La dernière fois que je lui ai parlé, je me suis pris une engueulade par rapport à "Sale pute". Il déteste l'idée d'avoir un de ses fils au tribunal, et pas du côté de la défense.

- Mouais... Je vais te croire hein.
- Pardonne ton père... Et puis, si tu savais depuis combien de temps tes neveux parlent sans arrêt de toi... Ils sont fans de ton travail et rêvent de te revoir aussi.
- Aah... C'est cool. La même, hâte de tous vous retrouver...

Je me retiens de lui demander comment ils s'appellent, déjà. Pas que je les supporte pas ces gosses, mais je les ai vu trois fois depuis leur naissance et jsuis pas assez proche de Clément pour les voir plus aussi.

- Maman... Est ce que tu pourras rajouter une assiette de plus, dimanche ? Capucine et moi, on amène quelqu'un avec nous.
- J'espère que c'est pas ton ami Guillaume ?! La dernière fois il m'a rendu fou le chien et j'ai bien cru que ta sœur allait coucher avec à même la table. Quel homme grossier... Ton père le déteste, tu sais.

Je me retiens d'éclater de rire. C'était une journée mémorable.

- Qu'est-ce que mon père ne déteste pas de toute façon...
- Bref... Oui, donc qui est cette personne ?
- Je l'ai rencontrée il y a pas longtemps, et je tenais à vous la présenter.
- Vous n'avez quand même pas emménagé à trois, avec Capucine ?
- Nan, t'inquiète pas. C'est un autre délire. Je vous expliquerai tout dimanche. Tu me promets de pas oublier ?
- Oui oui, je t'en fais pas.
- OK, merci. Bon, bah... À dimanche maman. Bonne journée, bisous.
- Je t'embrasse aussi Aurélien. Bon courage, je t'attends avec impatience.

Je raccroche, presque la larme à l'œil.





Mon père et ses histoires à raconterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant