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 Mais aujourd'hui, ça commence bien, les chats, c'est peut-être un thème qui conduit à une formidable copie, mais au moins ce n'est pas de l'art abstrait.

Quand la musique est finie, il y a encore trop de possibilités d'œuvre représentant un chat pour que je sache si j'en suis la créatrice ou non, je continue donc en enchaînant sur une autre musique à propos de chat, que je choisis alors avec beaucoup de soin. L'air hautain du matou lové dans son panier sur le papier m'incite à mettre une vieille chanson française, Le Chat de Pow WoW. Dès les premiers accords, Elijah me regarde surpris, ne comprenant pas bien qu'est-ce que c'est que cette chanson, ce que je comprends très honnêtement.

— Mais... C'est quoi ce truc ?! s'exclame-t-il après le premier couplet qu'il n'a sans doute pas compris.

— Une musique de 1992 que mon père aime bien, je crois qu'il l'a entendu lors de son premier voyage à l'étranger, en France pour être plus précise.

— Mais les paroles sont vachement étranges non ? demande-t-il un peu surpris en reconnaissant sans doute le mot vodka.

J'ai vraiment envie de voir sa tête en comprenant les paroles, même si ça me distrait un peu plus de mon dessin, ce n'est pas très grave.

— À peine, tu vas voir, affirmé-je en remettant la musique à zéro.

Je ne sais absolument pas si c'est une bonne idée, mais j'en ai envie, alors ça ne doit pas être une véritable mauvaise initiative. La musique n'était pas extrêmement populaire dans les pays anglo-saxons, pour ne pas dire clairement inconnu, il n'existe aucune reprise ni cover en anglais, ni même dans une quelconque langue étrangère. Le seul vrai moyen de lui faire comprendre le sens, c'est donc de le traduire, mais il faut avouer que les paroles d'une chanson sur papier, c'est un lamentable gaspillage, on perd toute la mélodie, les rythmes, les intonations, c'est une véritable catastrophe. Je me suis donc chargée moi-même de le faire, les possibilités à partir de là n'étant plus infinies.

Je commence alors à fredonner les paroles, remplaçant la voix du chanteur. J'ai conscience que j'aurai pu faire la même chose sans montrer que c'est moi, ça aurait été tout aussi simple, il n'aurait même pas forcément deviné que c'était moi, il aurait été facile de changer de voix. Mais je ne vois pas bien l'intérêt et surtout, ça ne sert à rien de cacher mon lien avec la reprise. Elijah me regarde de plus en plus surpris, comme s'il ne m'aurait jamais cru capable de faire une chose pareille. Ou alors comme si j'étais une folle, mais ça, je pense que ce n'est pas dû à ce que je fais, mais plutôt à ce que je dis, mes paroles de cette chanson ont une très légère tendance au « What The Fuck ». Devant son air hébété, je commence honnêtement à me prendre au jeu, commençant aussi à claquer des mains pour faire le rythme et si j'étais debout, j'en viendrais peut-être même à danser, après tout, j'ai bien le droit de m'amuser.

— Tu es complètement folle ! s'exclame-t-il en rigolant, comme s'il me faisait un sublime compliment, je le prends d'ailleurs comme tel.

— Merci, ça fait partie de mon charme. Ou pas du tout, mais en tous cas, c'est comme ça que mes parents me voulaient un peu « particulière ». C'est sans doute l'un des critères de personnalités que je suis certaine de respecter.

Je ne sais pas vraiment pourquoi je parle de ça, en ce moment, je ne sais pas grand-chose quand ça implique Elijah et de toute manière, je ne veux pas y penser.

— Les consignes de tes parents sont si précises que ça ? demande-t-il étonné.

À chaque fois que nous effleurons le sujet, il semble toujours aussi surpris, comme si une telle précision lui paraît complètement impossible.

— Oui, on peut le dire.

— Je pourrais les voir ?

Qu'est-ce qu'il chante là ? Je l'apprécie beaucoup et je commence à lui faire assez confiance, mais il ne faut pas abuser non plus. Là, il est quand même en train de demander les instructions d'un projet confidentiel, c'est déjà largement suffisant qu'il soit au courant du projet confidentiel en question, il ne veut pas non plus tous les détails, sinon à un certain stade, c'est un abus. Surtout que la base de tout, c'est mes plans ou au moins les consignes que mes pères ont donnés, c'est pire encore que de demander les scientifiques qui y ont participé, ça, ça peut presque passer pour de la curiosité.

RONII (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant