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 Heureusement que j'ai un micro retour de mon mensonge pour me réconforter, sinon j'aurais sans doute hurlé. Mentalement bien sûr, sinon ce serait idiot. En tout cas, presque imperceptiblement, je vois l'homme qui me pose des questions hochées positivement la tête, ce n'est presque rien, un simple réflexe cognitif, il faut vraiment le regarder pour le voir, mais ça me suffit pour savoir que j'agis bien. Pour l'instant, c'est simple, il n'y a pas d'erreur à faire, je ne supporte pas bien les choses que je suis obligée de dire, mais ça va, ça pourrait être pire. D'un autre côté, il n'y a pas non plus énormément de risque que je commette des fautes, il faut seulement que je reste aux aguets pour éviter de me faire avoir bêtement sur une question trop simple dont je ne vois pas le véritable sens.

Puis ils me posent des dizaines d'autres questions, ils passent tout en revue, alors j'ai vraiment le droit à tout, des questions par rapport à moi, mon fonctionnement, l'histoire, les sciences, les connaissances actuelles, les recherches futures, tout, vraiment tout. Plus les questions passent, plus je les vois se détendre, ils ont tous de moins en moins peur de moi, ils craignent de moins en moins de m'avoir mal reprogrammée, que je sois en train de les mener en bateau ou que je les attaque.

Dommage pour eux, parce que leurs peurs sont fondées, mais tant mieux pour moi, je ne compte pas me plaindre de leurs faiblesses, tout comme ils n'ont pas dû se plaindre des miennes lorsqu'ils ont tenté de me remodeler.

Quoi qu'il en soi, je vais continuer de tourner tout ça à mon avantage, il ne faut pas que je faiblisse contrairement à eux à cause de leur condition humaine : quand ils seront tous fatigués par les heures qu'ils passent à me questionner et que plus personne n'est prêt à une rébellion de ma part, j'agirais enfin.

Après des heures entières à répondre à leurs questions, l'un des informaticiens, dont j'ignore le nom, me propose de me ramener chez moi ou du moins l'endroit qui va être mon chez-moi. Je sais exactement où c'est, j'ai les coordonnées précises en stock et je sais aussi très bien que c'est à San José, loin de ma maison chez les Ross, chez ma famille. C'est sûrement assez proche du lieu où nous sommes, ils ne me feraient pas faire un grand déplacement juste pour ça, surtout que ça me rapproche des personnes qui me connaissent, ce qui est un risque assez conséquent, donc par déduction, nous sommes dans la métropole ou des alentours.

Même si je m'en suis parfaitement tirée jusqu'alors, je décide que c'en est assez, je décide que c'est le moment où je dois d'agir et de leur montrer mon jeu, après tout, ils sont tous à moitié endormis après des heures entières éveillées dans un climat stressant. C'est l'instant ou jamais de détruire ma couverture et de chercher les dernières informations qu'il me manque, je n'aurais jamais d'aussi belle occasion face à moi, c'est maintenant. C'est aussi un risque énorme, à tout moment, ça pourrait se retourner contre moi, mais c'est un risque que je veux prendre, il est hors de question que je vive la vie qu'ils veulent en silence et si je franchis ses portes, c'est pourtant ce que je devrai faire.

— Où est mon chez-moi ? demandé-je innocemment pour attirer leur attention.

Je les vois alors tenter de se réveiller et de comprendre d'où vient le problème, je vois même l'un des informaticiens se diriger légèrement vers l'ordinateur, comme pour vérifier qu'ils avaient inclus le détail dans mon programme. Maintenant, il faut que je sache qui je vais prendre pour cible : à leurs yeux, qui vaut-il mieux ne pas perdre ? Je mise sur le financement, ils reçoivent des investissements de beaucoup de monde, mais c'est Bill Gates qui paye le plus, sans lui, ils ne pourraient pas faire le quart de leur recherche, il ne faudrait surtout pas qu'il meure. Du moins à mes yeux, c'est celui qui leur manquerait le plus, j'espère que j'ai raison.

De plus, je dois pouvoir le menacer sans risque, ça m'étonnerait vraiment que ce soit lui qui en sache le plus. Il est à deux mètres de moi, je devrais dès maintenant pouvoir le bloquer contre le mur. Mais l'effet de surprise que j'ai déjà créé ne devrait pas être suffisant pour les obliger de m'écouter avant de prévenir les gardes, il faudrait qu'ils soient tétanisés avant même que je m'en prenne à Bill. Et je sais exactement comment faire.

RONII (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant