REALITY - Tome 1 ; (TERMINÉ)

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      Rien n'est parfait. Ma technique ne l'est pas. Il m'arrive encore d'être distraite et de ne pas réussir à me concentrer en quelques secondes ou de sursauter, mais la plupart du temps j'arrive à anticiper quand Ulrich ou Maxance vont appuyer sur la détente et je me cale sur leur tir. Je ne parviens pas complètement à trouer le centre de la cible mais au moins les balles sont dedans et d'après L'Arbalète : « Quand tu dois tirer sur quelqu'un, même si ça n'est pas dans le coeur et que ça ne le tue pas, ça le ralentira. ». Evidemment j'espère n'avoir jamais à faire ça. C'était déjà compliqué de tirer sur quelqu'un avec des billes de peinture, alors avec une vraie balle...

      Cette semaine, encore quatre Nouveaux ont été bannis. Nous ne sommes plus que dix du groupe de départ et je comprends mieux pourquoi le Bâtiment n'est pas plein, si ils virent autant de monde à chaque fois.

      Quand je vois une silhouette s'asseoir à côté de moi, je m'attends à voir Ash.

      — On peut discuter ?

      Mais je me suis trompée et L'Arbalète est bien la dernière personne que je m'attendais à voir à côté de moi, surtout qu'on ne les a pas vus beaucoup avec Ash la semaine dernière. Ils n'étaient pas au Jardin. Sans doute sont-ils dans une Unité et doivent étudier le reste du temps. Il fait un signe de tête à Maxance et Ulrich qui se lèvent pour quitter le Réfectoire. On est le samedi matin ce qui veut dire pas d'entraînements. Je ne sais pas trop pourquoi mais aujourd'hui, le Réfectoire est plus rempli. D'habitude on est une vingtaine, les autres préférant être dans leurs chambres ou du moins à leur étage.

      Je réponds à L'Arbalète par un hochement de tête.

      — La première chose que je veux te dire, c'est à propos de ton amie.

      — Ce n'était pas mon amie.

      Sans savoir pourquoi, à lui j'ai besoin de le préciser. Il ne répond rien mais je sens qu'il a saisit ce que je voulais dire et il continue,

      — La colère qui est en toi à cause de ça n'aurait fait que te pénaliser. Ash te l'a dit, j'ai voulu te mettre la pression. Mais c'est la vérité, ce n'est pas parce que tu es douée et que tu t'améliores de semaine en semaine, que tu n'es pas en danger. Tu n'es pas dans une Unité et tu n'as pas de coéquipiers pour le moment, c'est pourquoi tu ne dois penser qu'à toi. Elle n'est plus là. Passe au-dessus et n'y pense plus.

      — Je ne peux pas.

      Voyant qu'il me regarde et attend une réponse je poursuis,

      — C'est terriblement frustrant de ne pas savoir où elle est, comment c'est pour elle maintenant et pourquoi ils l'ont banni elle. La bibliothèque ne dit rien sur ça.

      — Tu as lu leurs bouquins ?

      Etant donné qu'il esquive un peu ce que je dis, j'entreprends de faire de même, quitte à l'agacer.

      — Comment je peux la rejoindre ?

      — C'est impossible.

      — Mais... Tu as dit que...

      Son regard se voile et il lâche un juron dans une autre langue que je ne parviens pas à distinguer. Je l'ai agacé mais j'espère qu'il ne va pas se fermer et continuer la discussion.

      — N'y pense plus. Vraiment. Ne va pas tenter de te mettre les Dirigeants à dos pour te faire bannir en espérant la retrouver. Tu perdrais tout.

      C'est vrai que depuis le début je le trouve très froid et distant, mais la lueur dans son regard quand il évoque ça à voix haute me met un gros stop et une question me revient sur le devant de l'esprit : à quoi ça correspond le Bannissement ?

      J'ai envie de lui dire que j'ai déjà tout perdu quand ils m'ont réveillée ici, mais mon instinct me dit que ce n'est pas le bon moment.

      — Noa.

      Je me sens mal à l'aise de l'entendre prononcer mon prénom. Je n'ai pas souvenir que ça lui soit déjà arrivé...

      — Combien vous étiez au début ?

      — Vingt-trois il me semble.

      — Et maintenant ?

      Je prends quelques minutes pour essayer de me rappeler les visages des Nouveaux qui ne sont plus là.

      — Dix.

      — Il n'y aura pas de bannis lundi.

      — Comment ça ?

      — Ils vous ont réveillés il y a un mois et demi, en général c'est la sixième semaine qui est la dernière avant la Répartition. (Voyant que je ne réagis pas, il poursuit) Comment tu es dans tes entraînements ?

      — C'est-à-dire ?

      — Si tu devais te classer par rapport aux autres de ton groupe.

      Je ne veux pas lui mentir parce que déjà je ne le connais pas tant que ça et rien ne me dit qu'il n'est pas à la recherche d'informations pour me tester. Non, je ne suis pas parano mais méfiante. Ils nous ont assez répétés de l'être.

      — Je réussis le parcours du combattant la plupart du temps dans le temps imparti. Le lancer d'armes blanches je ne pense pas être la plus mauvaise ; j'ai des armes que je maîtrise mieux que d'autres. C'est pareil pour les armes à feu. En revanche, je suis mauvaise en tir à l'arc. Pour la course d'orientation, j'ai échoué trois fois en tout. Deux fois seule et une fois en équipe. L'entraînement physique, c'est moyen, j'essaie de mettre à profit mes défauts pour en faire des avantages.

      — Ils vont sans doute annoncer une chasse à l'homme pour faire leurs choix définitifs.

      — Définitifs ?

      Sur l'instant, je crois presque le voir sourire.

      — Depuis votre Réveil et même avant ils avaient déjà une idée de l'Unité dans laquelle vous serez. Les entraînements permettent seulement d'appuyer leurs choix.

      — C'est pour ça qu'aucun de nos tests nous demande notre avis ?

      — Tout est entre les lignes.

      — Je déteste cet endroit.

      Il ne répond rien et se lève pour quitter la table et aller en rejoindre une autre où Ash est installé. Je me lève, un peu déboussolée par cette conversation, pour rejoindre ma chambre et dormir.

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