CHAPITRE 4 : TORTIONNAIRES (2)

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Jeudi

Morgann me tire à nouveau contre lui, m'étouffant sous son bras musculeux alors que j'essaye de rouler hors du lit. Rien à faire, il dort à poings fermés, et ses cauchemars le font trembler et convulser contre moi.

J'essaye difficilement de relever mes bras retranchés sous les siens, en vain.

La sueur perle à son front alors que le soleil commence à pointer le bout de son nez.
S'il ne se réveille pas, on va être en retard.

-Morgann, je chuchote en essayant de remuer pour glisser hors de sa poigne.

Ma sauvegarde m'a l'air sabordé par son harponnement féroce. Il grogne, pris de spasmes soudain, le corps bouillant, dents serrées et lèvres pincées. Ses sourcils se froncent une nouvelle fois, tous ses muscles bandés.

-Morgann, je réitère un peu plus fort, ne sachant que faire.

J'ai peur de l'effrayer. Il a déjà eu plusieurs cauchemars, et les réveils n'en sont pas des plus tendres. Ça annonce une mauvaise journée.

Il me comprime si fort que je peine à respirer correctement. Il faut que j'essaye de m'échapper de son oppression.

Ses convulsions se font plus sévères, il commence à glapir entre ses lèvres serrées, quelques grognements qui me fendent le coeur.

J'opte alors pour une stratégie différente et me glisse vers le bas, stratégie qui s'avère aggravante, mais nécessaire : son bras attrape à une vitesse fulgurante le mien, le frappant de toutes ses forces alors qu'il me tire violemment vers son visage.

Je couine de surprise, et de douleur.

Ses yeux s'ouvrent enfin, secoués, complètement angoissés, écarquillés d'horreur, courant autour de moi. Il reste comme ça, et je fais de même de peur qu'il ne soit somnambule et ne m'assène un coup par erreur. Ses pupilles à quelques centimètres des miennes, sa mine adopte un teint triste et pâle, complètement livide.

-Je suis désolé, il soupire, haletant, desserrant enfin sa prise.

Son souffle saccadé recouvre un rythme plus normal alors qu'il se renfonce dans le lit, la tête contre le coussin.

Ses muscles se détendent, éreintés, surmenés d'émoi. Je porte naturellement ma main à son visage pour caresser sa joue transpirante.

-Je t'ai fait mal ?

Je secoue la tête et il clôt ses paupières, me libérant enfin de son empire. Physiquement seulement.

-Ça faisait longtemps que tu n'en avais pas fait, je relève alors qu'il se tourne dos à moi.

L'affichage de l'heure sur la radio, posé sur la table à chevet, finit par le secouer. Il se redresse de tout son séant.

-Dépêches-toi, il m'ordonne en marchant d'un pas rapide vers la salle de bain.

Il s'y enferme, et je me hisse à mon tour, péniblement, hors du lit. Je passe doucement ma main par-dessus mon bras douloureux, puis l'oublie complètement lorsque j'aperçois ma serviette posée sur le banc au pied de son lit. Je l'attrape, me dirigeant vers la salle de bain du rez-de-chaussée.

La maison possède deux étages : le rez-de-chaussée comportant la cuisine, l'immense salon, et une salle de bain sous les escaliers. Le premier étage accueille deux chambres, et le deuxième étage, lui, deux de plus : c'est Morgann qui me l'a dit. La maison est d'une ampleur démesurée, quand bien même personne, autre que le propriétaire, son fils, et moi à l'occasion, ne met les pieds ici.

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