CHAPITRE 20

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Je jette un coup d'œil à travers la serrure de la porte et distingue une silhouette de dos. C'est bien ce que je pensais : quelqu'un est posté devant. Je me redresse et me tourne vers la fenêtre. Il ne reste que cette option.

J'ai pris ma décision : je vais m'enfuir de l'académie. C'est une idée totalement insensée, vous allez me dire. C'est vrai mais pas totalement. Disons que c'est la seule solution que je vois. Il est hors de question que je reste enfermée dans cette chambre à ne rien faire pendant que d'autres s'occupent des blessés et de l'académie. Surtout s'il y a un risque que je détruise tout. Ou que je reste prisonnière pendant des semaines.

Je ne sais pas ce que je vais faire une fois dehors et je sais que m'enfuir va probablement donner une preuve que je suis coupable. Mais une chose est sûre : au moins, si pendant mon absence, quelque chose arrive à l'académie, ce sera évident que ce n'est pas ma faute et bien celle d'Ethan car je n'aurais pas été là pour le faire. Dans le cas contraire, s'il ne se passe rien, alors cela prouvera que je suis le problème et mon éloignement aura été une bonne décision.

Je m'approche alors de la fenêtre et baisse la poignée. A mon grand soulagement, elle s'ouvre. Quelle idée d'enfermer quelqu'un si on ne ferme pas les ouvertures.

Je passe ma tête dehors et jette un coup d'œil aux alentours. A part quelques pensionnaires qui prennent en charge ceux qui en ont besoin, personne ne s'occupe de moi. Les conséquences de l'attaque sont plus importantes qu'une inconnue en pyjama dépareillé.

Aussi discrètement que possible, je saute sur le rebord de la fenêtre et descends de l'autre côté dans la cour. Mes pieds nus et écorchés par la bataille tombent sur le gravier et je grimace. M'enfuir ainsi va être compliqué mais je n'ai pas le choix. Je ravale donc la douleur et m'avance vers la barrière en essayant d'arborer un visage nonchalant tout en contournant les groupes de pensionnaires. J'essaye de paraître normale.

Mais malheureusement, à peine suis-je au milieu du chemin que je vois les deux pensionnaires qui m'ont amenée à la chambre apparaître au coin de l'académie. Ils parlent tranquillement lorsqu'ils me remarquent. Nos regards se croisent et ils froncent les sourcils. Je détourne les yeux et accélère légèrement le pas mais l'un d'eux s'exclame :

- Hé, toi ! Reviens !

Et merde. Ils m'ont reconnue.

Sans me retourner et sans répondre, je me mets à détaler vers la barrière, grimaçant à chaque fois qu'un gravier entre dans la peau de mes pieds. Immédiatement, les deux pensionnaires se lancent à ma poursuite.

A un mètre de la barrière, je fais appel à mon don et le projette sur les barreaux. Deux d'entre eux se courbent sur les côtés, me laissant pile la place pour sortir. Je me faufile à l'extérieur puis referme les barreaux derrière moi d'une pensée.

Je m'engouffre ensuite dans la forêt à moitié plongée dans l'obscurité, fuyant en courant, poussée par l'adrénaline. J'entends les deux pensionnaires derrière moi hurler à d'autres qu'il faut me rattraper, que je suis dangereuse, etc. J'entends ensuite des gens sauter par-dessus la barrière et me courir après. J'accélère ma course, faisant fi de ma douleur aux pieds.

Malgré mon épaule encore blessée et mon corps faiblard par l'effort que j'ai dû fournir pour le bouclier, je saute par-dessus les buissons que je croise sur mon chemin, j'esquive les branches, m'écorche les jambes sur des bouts de branches dépassant des buis... Je perds souvent l'équilibre à cause de l'obscurité, le soleil matinal peinant à apparaître à l'horizon, mais je ne m'arrête pas, courant droit devant moi sans me retourner.

Les pensionnaires lancés à ma poursuite me suivent toujours, je les entends, les branches craquant sous leurs pieds.

Soudain, l'orage gronde au loin et comme si cela avait le signal de départ, la pluie se met à tomber. Je jure mais en même temps, ça me soulage. Ils auront plus de mal à me suivre comme ça, étant cachée par un rideau de pluie entre eux et moi. De plus, le bruit de l'averse masquera mes pas. J'ai une chance de leur échapper.

Les dix MagesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant