HEATHER FAYCE [TERMINÉ]

39/ Comme avant.

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NATHAN / BLONDINET.

Je sens mon corps se figer au moment où j'aperçois mon ex à côté de la proviseure. Lorsqu'elle passe près de ma table pour aller au tableau, nos regards se croisent. Le vert de ses iris est toujours aussi clair, son teint autant bronzé qu'avant. La seule chose qui a changé, ce sont ses cheveux longs qui lui arrivent maintenant au milieu du dos.

Lorsque la proviseure termine de la présenter, Jelly ouvre la bouche, et sa voix que j'aimais tant auparavant retentit :

- Bonjour à tous, je m'appelle Jelly Foxter et j'espère passer une belle et douce année scolaire en votre compagnie.

Les élèves sourient. Les garçons la fixent déjà avec la bave aux lèvres tandis que les filles semblent convaincues par son simple sourire. Pourtant, l'une d'elle la fixe avec une animosité qui, à ma grande surprise, est contenue.

Heather l'observe comme si un Démon était présent en face d'elle, mais qu'elle n'en avait pas peur pour autant. Je constate que le regard de Jelly est lui aussi rivé sur Heather, avant d'être dirigé vers les autres élèves.

Mes yeux restent fixés sur Heather. À chaque fois que je la vois, je pense à la douce sensation de ses lèvres sur les miennes. Le rouge me monte aux joues et je ne cherche même pas à m'en cacher. De tous les baisers que j'ai pu échanger, le nôtre était le meilleur. À travers notre étreinte, j'ai ressenti sa haine, sa douleur et sa colère, mais aussi sa peur. J'ignore pourquoi, mais je la sentais trembler entre mes bras. J'ai tenté de deviner ce qu'elle ne me disait pas, mais elle m'a filé entre les doigts à l'instant même ou ma mère et mon frère sont arrivés. De tous les trottoirs de Chicago, il a fallu qu'ils soient sur celui-là, au même moment que nous. J'étais tellement gêné que je n'ai même pas su rattraper Heather. Et depuis, à chaque fois que j'ai tenté de lui parler, elle m'a évité comme la peste. Soit elle se dirigeait vers les toilettes, soit elle faisait mine d'être pressée. Je regrette clairement que ma mère et mon frère aient été là pour interrompre le moment magique qu'était notre baiser.

Quand j'y pense, ma mère a le chic pour me trouver dans des situations embarrassantes. À neuf ans, j'avais confondu une boîte de thon avec la conserve de patté pour chat de Kitty, notre chaton de l'époque. Lorsque ma mère est arrivée dans la cuisine et m'a vu manger la nourriture pour chat, elle a explosé de rire sans que je ne sache pourquoi.

À treize ans, quand j'ai coincé mes lèvres dans mon appareil dentaire - je ne sais même pas comment j'ai fait - elle est arrivée dans ma chambre pile à ce moment là. Là encore, elle a ri.

Et à mes seize ans, un jour où j'avais oublié mes clés, je suis resté à attendre devant la maison. Ça aurait pu aller, si je n'avais pas eu l'envie soudaine et pressante de vider ma vessie. Je m'étais donc caché derrière la haie pour faire la vidange.