Chapitre 10 (Partie I)

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Le malaise est un sentiment profond qui nous fige, nous paralyse, jusqu'à ce qu'une présence familière ne nous en libère. La solitude peut créer le malaise, lorsque le sujet est entouré de personnes inconnues qui le noient d'informations auditives qu'il ne comprend pas.

Le sujet se verra alors forcé de cligner des yeux, offrir des sourires de politesse et faire signe qu'il ne comprend pas les demandes pour enfin avoir la paix. Avec un soupir de soulagement, je remarque que la plupart des autres personnes ici ont délaissés la nouvelle attraction du jour pour se focaliser sur d'autres tâches, comme des puzzles.

Et par « nouvelle attraction du jour », je veux dire « moi ». Il est visiblement rare de voir apparaître de nouvelles têtes dans cet hôpital, comme si tous les autres enfants s'étaient réveillés au même moment.

Dans tous les cas, j'ai été lâchée au milieu de tous ces gens par l'infirmière, avant qu'elle ne quitte la pièce pour laisser les deux androïdes gérer la foule. J'ai eu le droit à des remarques sur mes cheveux, mes yeux, mon silence, mon jeune âge...

La plupart des adultes, les plus grands, me jugeaient simplement du regard dans poser de questions, tandis que les plus jeunes semblaient vraiment intrigués. Comme si je ne devais pas être là. Mais tout ce que j'ai retenu, c'est que Benny n'est pas parmi eux. J'ai eu beau chercher ses tatouages ou ses cheveux sombres, je n'ai rien trouvé. Il n'est pas là.

J'ignore le petit pincement au cœur lors de cette constatation et baisse les yeux, fixant le sol. Je ne dois pas avoir l'air stupide, debout devant la porte, attendant de trouver un groupe qui veuille bien de moi et qui puisse communiquer avec moi.

Mes cheveux lâchés recouvrent une partie de mon visage tandis que je plaque une mèche derrière mon oreille droite, mouvement machinal lorsque quelqu'un est gêné. Avec un sourire amusé, je me rends compte que j'imite des comportements humains qui ne sont en aucun cas les miens.

J'ai juste vu des enfants le faire alors je reproduis, espérant que cela me permette de me fondre dans la masse et me faire accepter du plus grand nombre. Qui plus est, j'ai vite abandonné l'idée de m'intégrer parmi les adultes. Ils ont l'air d'être très regardant sur l'âge de ceux qui les rejoignent. Je ne sais même pas à quel âge on devient officiellement des adultes !

Si ça se trouve, j'en suis une et je devrais me mélanger à eux. Si ça se trouve, leurs airs méchants cachent juste une sorte de méfiance, comme celle qu'a Benny pour les androïdes. Est-ce que Benny est un adulte ? Question stupide. Evidemment.

Ça se voyait à ses réflexions et sa manière de penser, ou de me répondre. Où est-il ? Est-ce qu'il va venir, ou est-il dans un autre groupe, dans une autre pièce ? Avec un soupir, je relève la tête et efface le sourire de mes lèvres.

Reportant mon attention sur la foule, je distingue un petit groupe de trois personnes, deux filles et un garçon, qui discutent. Ils semblent être les plus jeunes du groupe et pourtant, hormis l'une des filles, ils ont l'air beaucoup plus vieux que moi.

Lentement, je m'approche d'eux et m'assois à leurs côtés sous leurs regards étonnés. Leur conversation s'est stoppée net tandis que la blonde tient encore une pièce du puzzle dans sa main, ses yeux bruns posés sur moi. J'esquisse un sourire timide et observe le sol, sur lequel le jeu repose.

Je ne connais pas le nom de ce monument, mais il me dit quelque chose. C'est en métal, très grand et vraiment très haut. Le ciel autour est bleu, il y a de l'herbe verte en bas et c'est à peu près tout. La vision semble simpliste mais pour autant, on comprend. Je penche légèrement la tête sur le côté, comme j'ai tendance à le faire désormais, lorsque je veux comprendre quelque chose.

Felidae [Parties I et II]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant