Chapitre 17 (Partie II)

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C'est lui-même qui m'a appris cette expression, « sans rire ». J'espère que je l'utilise correctement ! Vu son sourire à la fois fier et admiratif, je suppose que oui. Le jeune homme hoche la tête et pose une main sur son cœur, avouant de manière totalement exagérée qu'il ne ferait plus cette erreur, car il refuse d'éveiller "la colère de la jeune amnésique". 

Si je comprends bien, c'est le surnom qu'il m'a trouvé, puisqu'il me nomme ainsi depuis quelques jours. Je ris avec lui quelques secondes, mettant de côté ma fatigue qui n'en reste pas moins présente. 

Mais mon esprit n'y est pas. Et le sien non plus, si j'en crois ses yeux éteints et ses muscles raidis. C'est presque comme s'il s'attendait à ce qu'un robot nous tombe dessus. Ici. Au milieu de nul part. 

Les robots ne peuvent pas sortir de leurs lieux attribués, pas vrai ? Je n'ai jamais posé la question, cela me paraissait naturel. Je n'en ai vu que dans l'hôpital, c'est donc qu'ils ne peuvent pas en sortir ! 

Alors de quoi Benny pourrait-il avoir peur ? Peut-être que ce sont juste de mauvais souvenirs qui le taraudent, sans qu'il ne puisse les lire clairement ? Il m'a dit lui-même ne se souvenir que de sensations ou d'émotions, mais rien de totalement lisible. Peut-être qu'il se trompe, qu'il n'y a aucune raison d'avoir peur !

— On continue de marcher ?

Sortant de mes pensées, je reporte mon attention sur le brun. Continuer de marcher ? Pour aller où ? Cela fait des jours que l'on marche sans que je ne voie autre chose que des troncs, quelques brins d'herbe, un peu de trèfle et un mince filet d'eau souvent très sale ! 

Je veux bien continuer, mais je ne pense pas que Benny sache où aller. Alors que Benny se baisse pour refaire son lacet droit, qui, soyons honnête, va bientôt totalement lâcher, je reste plantée comme un piquet. Il lève les yeux vers moi quand je lui assène une petite pression au niveau du bras. Son regard m'interroge et je souffle.

« Pour aller où ? », je réponds.

Fronçant les sourcils, le jeune homme se relève entièrement, s'étire une demi-seconde le dos en effectuant une grimace étrange et cligne des yeux. Il ne semble pas comprendre ma question, comme si pour lui, c'était évident. 

Et oui Benny, c'est un peu le problème. Si tu partageais tes plans, je ne serais pas obligée de te poser la question tout le temps ! 

« C'est ironique, de la part de quelqu'un qui cache la petite voix qui habite sa tête », ironise-t-elle. Je l'ignore et la laisse continuer son monologue sur le fait que je n'ose dire à personne qu'elle me parle et qu'elle habite dans ma tête et que c'est un flagrant manque de confiance en Benny, ce qui, sans le vouloir, me blesse. 

Mon cœur se serre et je dois me retenir de baisser le regard en signe de honte. Est-ce vraiment un manque de confiance ? Ce n'est pas intentionnel ! Je ne veux juste pas paraître pour une fille totalement folle face à la seule personne qui tient suffisamment à moi pour me sauver la vie ! 

« Est-ce que c'est vraiment ça ? Ou c'est juste par fierté, parce que tu veux comprendre la première ce que je suis réellement ? Imagination ou réalité ? Hein Felidae... », se moque-t-elle. Je ferme les yeux et souffle fortement avant de porter mon attention sur Benny qui m'observe, intrigué.

— Je te l'ai dit. Si on suit la rivière, on va arriver jusqu'à l'océan. Il y aura de quoi survivre près de l'océan. Je ne sais plus exactement quoi cependant. Je sais juste qu'il faut continuer de longer l'eau, parce que tant qu'on en a, on ne peut pas mourir. Alors imagine si on est près d'un océan, on aura de l'eau pour le restant de nos jours ! Et puis... Tu sais... Parfois, j'ai des flashs... Rien de bien important, rien d'incroyable, juste des images et des sensations et je... Je crois que j'habitais près d'un océan, révèle-t-il.

Felidae [Parties I et II]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant