Chapitre 11 (Partie I)

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Allongée sur mon lit, les yeux rivés sur le plafond, je n'entends que le bruit des pas qui passent parfois dans le couloir. Mon bras blessé est posé le long de mon corps, blessure vers le plafond afin de ne pas souiller les draps. Je ne sais même pas pourquoi j'y fais attention, mais c'est la première réflexion que je me suis faite lorsque je me suis décidée à m'allonger. Toutes ces révélations, bien qu'étalées sur un mois, ont raison de mon cerveau et de mon énergie, qui s'éteint brusquement, laissant derrière elle un corps sans vie. Une coquille vide. Vide de sens, surtout. 

Plus rien autour de moi n'a de sens, si ce n'est la couleur étrange de mon sang. Là, je connais le sens de cette couleur : manipulation. Benny, ma petite voix, ils avaient raisons. Et j'ai refusé de les écouter parce que je voulais absolument pouvoir avoir confiance en quelqu'un, que cette personne soit robotique ou non. Mes yeux sont secs et rigides. Je ne crois pas avoir cligné des yeux, en dix minutes, tellement la perte de mon énergie vitale m'a vidée. 

Lentement, je fais cependant remonter mon bras vers mon visage pour examiner la blessure, constatant avec un certain soulagement qu'une boursoufflure a remplacé la coupure et qu'un petit point bleu indique qu'il y a eu un contact profond avec l'aiguille. Ma bouche s'ouvre avec difficulté pour souffler sur la trace rouge et gonflée, avant de laisser retomber mon bras. J'aimerai pouvoir parler. Exprimer ma colère, ma déception. Mais j'en suis incapable. Est-ce permanent ? M'ont-ils menti sur ça aussi ? C'est possible. Probable ? Je n'en sais plus rien.

Finalement, mes yeux se ferment et le noir se fait autour de moi. Petit à petit, mes oreilles cessent d'écouter les pas dans le couloir et semblent presque se fermer du monde extérieur, se concentrant sur ma respiration. Mon corps se détend et je me sens plus ou moins partir. Je ne sais pas vers où, mais n'importe où me semble plus beau qu'ici. 

D'un seul coup, mon corps semble retrouver un vrai poids et mon énergie est revenue, me faisant frissonner. Je sens le soleil réchauffer mes joues, mes yeux clos savourant la chaleur qui enveloppe mon corps. Je sens des brins d'herbe frôler le bout de mes doigts, tandis que le vent balaye mes cheveux, dont l'une des mèches m'atterrit dans le visage. Mes lèvres s'étirent, formant un grand sourire, puis je laisse échapper un rire. 

Je me sens bien, là, assise dans ce jardin. Réglée comme une horloge, je suis toujours la première levée, à sept heure vingt-huit, pour me faufiler dans le jardin et profiter des premiers rayons de la plus belle étoile de notre galaxie. J'y reste cinq, parfois dix minutes, avant d'oublier le temps et juste apprécier les sensations. J'ouvre les yeux, béate d'admiration. 

Ce paysage me dit quelque chose. Je ne saurais pas mettre de mots dessus, mais il y a quelque chose de familier. D'agréable. De rassurant. Je saisis un brin d'herbe et le casse, savourant avec émotion la sensation à la fois râpeuse et douce de la feuille contre mes doigts. Un sanglot étouffé traverse mes cordes vocales et je laisse le brin tomber, ne pouvant plus retenir les quelques larmes qui témoignent de mon bonheur.

Je ne sais pas où je suis, mais quelque chose me dit que je connais cet endroit. Que je l'ai déjà vu plusieurs fois. Etait-ce dont là que je passais mes rêves, qui s'effaçaient à mon réveil ? Pourquoi est-ce que je ne semblais pas m'en souvenir d'ailleurs ? Peu m'importe. Je me lève et tourne la tête, apercevant alors une maison en brique blanche et au joli toit rouge. 

Elle semble presque...irréelle. Fausse. Il y a quelque chose à propos de cette maison qui me semble impossible, inconcevable. Pourtant, mes jambes m'y portent aussi vite qu'elles le peuvent, me faisant courir à grande vitesse pour la première fois depuis presque un mois et demi. Enfin, techniquement, depuis cinq ans et un mois et demi. Les larmes s'arrêtent lorsque je touche enfin l'un des murs de la maison, découvrant la dureté de la pierre, ses crevasses et irrégularités, tout en admirant la couleur plus blanche que les murs de ma chambre d'hôpital. 

Felidae [Parties I et II]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant