Chapitre 15 (Partie I)

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Quinze minutes. C'est -selon l'infirmière de garde- le temps de répit que j'ai eu. C'est si peu, et pourtant si long... Après le départ de Benny, j'ai simplement pleuré un moment, sans me poser plus de questions, avant d'arrêter de manière très soudaine. Tel un robot.

Cette pensée me donne la nausée. Je ne suis pas comme eux. Je ne suis pas un robot ! Je ressens. Je pleure. Parfois, j'ai même envie de tout casser, de crier, de partir loin d'ici. Je suis cassée. Et les robots ne cassent pas, pas vrai ?

C'est le principe même du robot je crois. Ne pas casser. Faire les tâches indiquées par... Par quoi ? Aucune idée. Juste faire les choses. Rien de plus. Moi, je décide d'arrêter, de commencer, de faire les choses. Pas comme eux.

Si je pouvais parler, je suis sûre que je pourrai dire des choses qu'eux ne peuvent pas. Je... Je crois ? Une sorte de vertige me prend, ma tête commençant doucement à tourner tandis que mes yeux luttent pour rester ouverts, lorsque je réalise qu'il y a quelques temps, je pensais être exactement comme eux.

Je ne me souviens même plus de la raison pour laquelle je pensais ainsi. Probablement parce que je ne connaissais pas encore Benny, ou aucun autre être humain.

La porte claque et je lève la tête, brisant mon train de pensée. Un androïde entre dans la pièce, ses cheveux blonds attachés très haut sur sa tête, en un cercle serré que je découvre lorsqu'elle ferme la porte, me tournant le dos.

Elle est habillée comme n'importe quelle infirmière, se comporte comme n'importe quel androïde que je connais mais... Elle paraît différente. Plus distante, plus froide que les autres. Elle s'approche à peine de mon lit, ce qui n'est pas pour me déplaire, me jette un coup d'œil et se contente de noter des choses dans tablette, en silence.

Je n'entends désormais plus que le bruit de ses doigts frappant sur l'écran, ce qui me fait frissonner. Je suis incapable de retrouver un train de pensée cohérent maintenant. Est-ce qu'elle est muette, elle aussi ?

Cette pensée fait naître un mince espoir dans mon cœur, le sentant accélérer doucement sous mon vêtement. Puis je secoue la tête, me maudissant mentalement de penser de la sorte. Les robots ne peuvent pas être cassés Felidae. Elle ne peut pas être muette. Comme si elle m'avait entendu penser, elle marmonne quelque chose que je n'entends pas, avant de lever à nouveau ses yeux vers moi.

- Felidae, c'est bien ça ?, me demande-t-elle calmement.

Je cligne des yeux, surprise de l'entendre enfin me parler. Sa voix est grave, bien plus que celle des autres androïdes féminins que j'ai pu entendre. Elle est aussi plus froide et détachée, mécanique, exactement comme j'imaginais la voix d'un robot avant d'en entendre un.

Je ne sais pas pourquoi c'est cette voix que j'entendais quand je pensais « robot », mais ça me semblait logique. Et maintenant que je l'entends, je suis simplement mal à l'aise, légèrement apeurée même.

Puis, doucement, je réalise qu'elle vient de me demander mon prénom. Qu'est-ce qu'elle notait, si elle ne savait pas qui j'étais ? Qu'est-ce qu'elle a mis dans sa tablette ? Est-ce qu'elle a croisé Benny, en arrivant ? Oh non... Ne me dites pas qu'elle a croisé Benny !

Je n'imagine pas ce qu'elle pourrait dire à mon médecin, ou à l'infirmière, ou pire, à Aira ! Je pourrais être privée de sortie pendant un bon moment... Enfin, je crois. J'ai un peu l'impression que c'est la seule « punition » valable dans un hôpital.

Vu que Benny n'a pas demandé la permission avant de venir... Mais est-ce qu'il en avait besoin ? Je crois. Je n'en sais rien. Personne ne me dit jamais rien ! Ça en devient insupportable au bout d'un moment !

Felidae [Parties I et II]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant