De la farine jusqu'aux coudes, je pétrissais avec application la pâte à pain. Je n'avais peut-être pas beaucoup de force, mais bien suffisamment pour cette besogne, qui me défoulait d'une certaine manière.
- Alors, Gaby, qu'est ce qui te tracasse tant ? demanda la voix de Mélanie -une partie de moi ne pouvait s'empêcher de se dire ma voix- d'un ton léger.
Ce jour-là, j'avais réussi à faire en sorte que nous ne soyions que toutes les deux de corvée cuisine. Cela nous permettait de discuter longuement et librement. C'était ce qui me manquait le plus, finalement. Sa présence dans ma tête, nos conversations silencieuses, les concepts échangés par images, par souvenirs. Pouvoir se contacter si facilement. Le vide dans mes pensées était parfois désarmant. Je lui ai jeté un coup d'œil sur le côté. L'avantage de la conversation mentale, c'était aussi que je n'avais pas besoin de tout formuler avec des mots, je pouvais simplement laisser les concepts et les idées s'écouler d'un esprit à un autre. Maintenant, même si nous avions développé une grand sensibilité l'une pour l'autre... Et bien, il fallait bien recourir aux mots à un moment.
J'ai soupiré.
- Je vais dormir dans la chambre de Ian, ce soir.
Une autre que Mélanie m'aurait sûrement demandé où était le problème, ou si j'étais bien sure de ma décision. Mais Mélanie me connaissait aussi bien que moi-même, et elle a vite interprété mon ton et mes non-dit, après quelques seconde,s elle m'a fixé avec des gros yeux tout en riant.
- Ah, allez, je savais que cette conversation viendrait ! J'attendais que tu l'engages de toi-même. Tu as peur ? Tu as des questions ?
J'ai soupiré de soulagement, et je lui ai répondu en gardant mes yeux fixés sur la pâte que je malmenais.
-Peur ? Oui. Non. Tu vas sûrement trouver ça idiot, puisqu'après tout j'ai eu accès à tes souvenirs, mais je ne les ai jamais... Explorés en profondeur, disons, alors...
- Gaby, je ne trouve rien de tout cela idiot, me coupa-t-elle. N'importe quel humain à des questions sur le sexe à un moment donné de sa vie, peu importe le degré d'information qu'on lui aura fourni par le passé !
J'ai grimacé en entendant le mot. C'était stupide pourtant, c'était un processus naturel, biologique, mais Petty avait toujours éprouvé beaucoup de gêne à l'évocation du système reproductif humain, et s'était même fait comme une petite promesse à elle-même qu'elle n'aurait jamais de compagnon, pas de cette manière.
- La règle la plus importante, poursuivit Mélanie, interrompant le cours de mes pensées, c'est que c'est toi la chef. Tu fais ce dont tu as envie lorsque tu en as envie, et jamais plus. Il n'est pas question de se forcer. Mais je fais confiance à Ian là-dessus.
J'ai hoché la tête, de nouveau rouge tomate. J'entendais le bruit des couverts et des assiettes que Mélanie frottait.
- Est-ce que... Ça fait mal ? ai-je finalement demandé.
- Cela dépends. Pour moi, oui, un peu, essentiellement parce que Jared n'y a pas été de main morte ». Elle a eu un petit sourire à l'évocation du souvenir. « Mais après, c'est chaque fois de mieux en mieux. Pour toi, je ne sais pas. Ce corps paraît si fragile, si jeune en comparaison de l'âge qu'il a réellement ! Mais Ian sera bien plus précautionneux.
J'ai hoché la tête, à nouveau. J'avais effectivement de vagues souvenirs de ce qu'avaient pu être les nuits de Jared et Mélanie. Je ne m'y étais jamais intéressée de trop près, cependant, par pudeur. Et par peur du courroux de Mel, je devais bien l'avouer.
- De toute façon, rien ne t'oblige à en arriver là tout de suite. Il y a de nombreuses étapes à franchir avant. Il faut prendre ton temps.
- Prendre mon temps... j'ai répété en écho.
- Oui, tu vois de quoi je parle. Les caresses, pour commencer, et petit à petit vous aller plus loin. Ian est un mec bien. Il saura attendre le temps qu'il faudra, je dois bien lui reconnaître ça.
J'ai acquiescé lentement à ses propos. Je parlais peu, mais Mélanie savait que j'enregistrais tout. Nous avons continué ainsi un long moment. Mel ne prenait pas de pincettes pour m'expliquer son sujet, mais j'étais contente de pouvoir poser mes questions et énoncer mes angoisses si librement.
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Les âmes indigènes [Les âmes vagabondes Fanfic]
Fanfic" La vie et l'amour ont continué dans le dernier bastion humain de la planète Terre". S'éveillant dans son nouveau corps pour sa dixième vie, Gaby a enfin trouvé son compagnon et sa planète d'accueil. Réunie avec tous ceux qu'elle aime, elle doit...