Chapitre 38

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Le ciel s'étendait à l'infini au-dessus de ma tête. C'était une toile de maître dont on ne se lassait pas. C'était une nuit sans lune, ce qui faisait d'autant plus ressortir les milliers d'étoiles qui constellaient la nuit d'encre.

C'était à couper le souffle.

Il était assez insensé de se dire que ces petits points lumineux se trouvaient à des milliards et des milliards de kilomètres de nous. J'observais tour à tour les étoiles, en pensant à mes pairs. J'ai pensé au monde des glaces et aux Ours, aux Fleurs et aux Araignées, aux Dragons et aux Herbes-qui-voient. Je n'ai pas oublié les Chauves-Souris, et toutes les créatures qui, tapies dans un recoin de l'univers, vivaient encore leur vie sans qu'on n'en sache rien.

J'avais eu raison sur un point : ainsi allongée sous le firmament, mes problèmes devenaient dérisoires, futiles. J'étais un grain de poussière dans un univers qui dépassait ma compréhension. Ma vie dans cet hôte durerait un battements de cil, ma vie entière en tant qu'âme n'avait duré qu'une seconde. Et peu importaient mes interrogations et mes soucis, les planètes tournaient, les étoiles naissaient et mourraient, la vie s'épanouissait et dépérissait. L'univers n'en avait que faire de moi. Certains trouvaient cette pensée déprimante. En cet instant, je la trouvais rassurante.

Ian était étendu près de moi, les reliefs de notre repas entre nous deux. Si je tendais la main, je pouvais toucher sa peau. J'aurais aimé me blottir contre lui, mais j'avais peur qu'en bougeant, l'immense émotion qui me remplissait changerait, j'avais peur que le moindre de mes gestes brise cet instant particulier que je vivais. Comme si mon cœur était tellement rempli qu'il allait exploser. De toute façon, j'avais incroyablement conscience de lui. Lui et moi comme seuls au monde.

Dire qu'il m'avait fallu neuf vies avant de le trouver.

Finalement, le ciel fit lui-même éclater l'instant, en m'envoyant une étoile filante. Une simple traînée de lumière traversant brièvement mon champ de vision. Sur le moment, un petit piaillement m'échappa, et je me redressai à demi, pointant le ciel avec mon index, tandis qu'au même moment Ian s'écriait « Fait un vœu ! ».

Je récita avec conviction la première pensée cohérente qui se forma dans mon esprit. Le vœu n'avait pas été pensé au moment exact où j'avais vu la comète, mais ça importait peu, au final. J'avais conscience que ce n'était que superstition, mais j'y étais étrangement sensible. Les failles de mon cerveau humain, sans doute.

Je tourna la tête, pour voir Ian, qui s'était aussi redressé sur ses coudes.

- Alors ? Me demanda-t-il, tout sourire.

- Alors, il me semble me rappeler que je ne dois surtout pas te le dire, répondis-je fièrement.

Il fut gagné par un grand éclat de rire, qui résonna à travers le vide du désert. Nous devrions peut-être être plus discrets, plus attentifs, mais la prudence n'avait plus sa place ici, pendant quelques heures, j'avais le sentiment que tout était possible et que rien de mal ne pouvait nous arriver.

Je marchai à quatre pattes jusque Ian, repoussai doucement notre reste de repas, et me laissai retomber sur lui sans plus de cérémonie. Cette spontanéité le fit rire, encore, et il m'enlaça avec douceur. Il ne nous fallut que quelques instants pour nous réinstaller sur le sol, les yeux levés en l'air.

- Montre moi les constellations, demandai-je à Ian.

Petty ne s'était jamais vraiment intéressée aux étoiles, elle préférait les jolis parfums, les bijoux précieux et les objets délicats, quant à Mélanie, ses souvenirs étaient flous pour moi. Ian, par contre, sembla ravi de ma demande, et en quelques secondes il avait identifié une première constellation, qu'il s'appliqua à me montrer.

Les âmes indigènes [Les âmes vagabondes Fanfic]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant