. Synsivik vit alors une petite troupe de quatre hommes, tout en armes et armures, qui s'approchait de lui d'un pas vif, visiblement alertés par ses cris. Il se remit à genoux et les regarda, la détermination n'ayant pas quitté son regard.
— Qu'est-ce qu'tu fais, toi ?, gronda l'un des hommes.
— Je... Je cherchais une fille et...
— Encore un qu'a pas compris qu'on doit pas emmerder Jaka.
Les quatre soldats rirent à gorge déployée tandis que l'Élu baignait encore dans la boue. Il se releva lentement, ses yeux se voilant de colère. Serrant les poings, il regarda les gardes de Talen.
— Cela vous fait-il rire ?, s'agaça-t-il.
— Oh, petit, on va s'calmer.
L'un d'entre eux s'avança pour le pousser – pataugeant dans la fange, Synsivik glissa et s'y écrasa à nouveau. Au milieu du bruit d'éclaboussure, il entendit à nouveau les rires gras des gardes. Il releva la tête pour les regarder et capta le blason qui marquait leur armure. Un griffon, qui semblait scintiller dans la nuit, sous la lumière éternelle de Lux. Se jetant en avant, il saisit le tabard entre ses doigts maculés de boue, comme tentant de l'arracher pour le voir de plus près. Jamais son regard n'avait semblé lui envoyer de signes divins auparavant, et pourtant il en était sûr, cette aura lui était apparue par la volonté de sa sainte mère.
Le garde se débattit et deux autres vinrent saisir Synsivik par les bras, le tirant vers l'arrière pour qu'il lâche leur compère. Ils le soulevèrent et, si proche d'eux, l'Élu perçut l'odeur de vinasse qui émanait d'eux. Il plissa le nez avec dégoût, se débattant farouchement et ordonnant qu'on le lâche.
— J'en connais un qui va passer la nuit dans les geôles, tiens !, grinça celui dont le tabard était tâché.
Ils entraînèrent Synsivik avec eux, le maintenant avec force tandis qu'il ne cessait de hurler et se débattre, l'emmenant vers le château. On le fit entrer dans la caserne, où il traversa les corridors glacés qui le menèrent aux geôles. Là, on le poussa dans la première cellule vide et il s'y écrasa, poussé par les gardes furibonds. Sur le sol, son visage fut mordu tant par la douleur que par la froide morsure de la pierre. Il tâta autour de lui, ses yeux fouillant nerveusement la semi-obscurité de la geôle pour trouver une issue. Mais ses mains comme ses yeux ne trouvèrent qu'une grille, et de la paille autour de lui. Le cliquetis d'une serrure lui fit lever les yeux.
Haletant, il se redressa et croisa le regard moqueur d'un garde. Celui-ci riait déjà, allant vers l'une des tables de la caserne où l'attendait un pichet de vin.
— Laissez-moi sortir !, beugla Synsivik en se jetant contre les barreaux.
— Calme toi, ou c'est moi qui vais t'calmer !
— La lumière de Lux vous brûlera pour ce péché ! Vous n'avez pas le droit !
Il n'entendit, pour seule réponse, qu'un rire gras dont l'écho se répercuta sinistrement à travers les geôles. S'accrochant aux barreaux de sa prison, Synsivik hurla, enragé. Il entendit alors les grognements exaspérés d'autres prisonniers, ainsi que ceux des gardes – cela ne fit que l'encourager, et il recommença, espérant qu'on le tire de là. Il entendit alors le grincement d'une chaise et des pas s'approchant vivement de lui.
Un garde lui apparut, ce qui le fit soupirer, soulagé. Il reconnut alors celui qu'il avait maculé de fange, et à travers les barreaux, il reçut un grand coup de poing en plein visage.
Et l'ombre se fit reine à ses yeux fermés. Il n'y eut plus qu'une voix lointaine à ses oreilles, au ton maternel, comme une voix venue des cieux – des cheveux noirs et des yeux d'océan, la griffonne est fille de Nox. Puis tout ne fut plus que noirceur.
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Nokrov, Tome 1 : Les Ombres du Pouvoir (terminé)
FantasySur les terres de Nokrov, la noirceur a tôt fait de dévorer l'âme de chacun. Le peuple ravagé par une famine presque permanente voit les grands du monde se gaver lors de fastueux banquets, les hommes des îles Vatner sont en conflit perpétuel, les fo...