1. Meera

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«Entre le présent et le passé, je ne préfère que ce que je vois»

Encore une fois, je devais aller chercher mon père dans un mauvais état. Il était encore plus ivre que les jours passés. Seigneur ! Jusqu'à quand ce supplice ? Et je me demandais encore ce que j'avais fait au bon Dieu pour mériter un tel père. J'en avais ras la casquette de ses éternelles escapades de beuveries. Il avait une famille, bon sang ! Il était plutôt âgé pour faire de telles frasques. Je ne le reconnaissais plus.
Je me stationnais sur le parking de ce fichu bar rempli d'hommes aussi louches que ma sacoche sortie tout droit des friperies de Djamé. Je prenais mon temps afin de respirer profondément et ne pas faire de bêtises à la moindre pique que ces charognards d'Abdoul et sa clique feraient sur moi et mon ivrogne de père.
Je devais être à l'école et non pas à jouer les nounous pour ce type. Qu'est-ce que maman lui trouvait encore ? Pourquoi restait-elle encore accrochée à cet homme ? Il n'était plus lui depuis dix ans maintenant. Si c'était le cas, il prendrait ce qu'elle ressentait face à cette situation, en considération mais non. Depuis sa chute du sommet, il était devenu méconnaissable.
Il s'était vautré dans une mélancolie absolument sombre et dégoûtante qui le rongeait à petit feu. Lorsque je le regardais, il n'était qu'un pauvre homme devant moi, et pas dans le sens de la compassion.

Et mon aîné Raphaël qui me reprochait de ne pas l'estimer ! Le fait est que j'estimais toujours mon père voilà pourquoi j'étais chaque fois énervée lorsque j'apprenais où il traînait. C'est juste que lui-même ne s'estimait plus, et ça c'était pitoyable ! Que pouvait-on tirer d'un homme qui avait perdu de son aplomb ? Rien du tout !
Mon téléphone sonna:

Meera je t'en prie dis-moi que tu l'as retrouvé ? S'alarmait ma mère au téléphone. Cette chère Jeannine s'inquiétait tellement pour mon père qu'elle en devenait malade. En plus, elle tenait la maison vu que mon père manquait clairement de lucidité pour s'y atteler. Elle se chargeait d'apporter de l'argent et de nous entretenir nous qui étions encore avec eux.
Je vous présente ma famille. Nous sommes les Key. J'épargnerais les oreilles de tout le monde en omettant le triste récit dégringolant qu'a eu ma famille.
Ce serait revenir dans le passé, et ça c'est ma mère qui savait bien le faire. Même si lorsque je me souvenais de notre ancienne vie, je voyais un père beaucoup trop différent et respectable que l'ivre que j'allais prendre dans quelques minutes.
Je sortis en claquant la portière de ma voiture. Je vis le videur.

Alors ma petite, toujours ? Me demanda Armel le vieux. C'était une des connaissances de ma famille. Il avait été là quand la catastrophe autour de nous a commencé. En ce temps, il n'était qu'un simple vigile. Le temps évoluait, il devenait le garde de corps des gens louches et trempait dans de sales coups. Cependant, il ne nous avait jamais fait de mal. Alors je le considérais comme un ami de la famille.

Oui, dis-je dans un soupir.
Il hocha la tête compatissant presque et m'ouvrir la porte.

Ne dure pas dans le coin. Samuel viendra aujourd'hui ici. Tu sais qu'il n'arrive toujours pas à décrocher de ta personne. Et te connaissant je sais que tu n'iras pas de mains mortes avec lui.
Je remuais ma tête de haut en bas pour lui faire signe que je comprenais et que je ferai rapidement. Je m'engouffrais dans cet endroit à l'allure crasseuse mais qui amenait les plus grands riches du coin qui fricotaient avec la racaille.
Devant la police, ce n'était qu'un bar décrépis avec des chaises presque rongées par des termites. Mais ceci n'était qu'un leurre. La vraie vie de ce bar se passait dans les toilettes. Plutôt derrière les toilettes...

Le gérant était futé de camoufler son business ainsi, même pour moi c'était futé. De plus, en analysant tout le tapage que les baffes faisaient j'étais sûre qu'il s'était fait construire des murs insonorisés histoire d'empêcher les gens des toilettes d'entendre ce qui se passait derrière. Et ces messieurs avaient leur parking souterrain, rien à voir avec celui où était garée ma vieille Mercedes.
Armel avait activé la porte qui s'ouvrait illico lorsque je me pointais devant elle. J'étais obligée de plisser mes yeux pour m'accoutumer aux lumières tamisées de cet endroit.
Je retins un saut de nausées quand j'hinalais sans faire exprès le parfum boisé, alcoolisé et de drogue de ce lieu. Comment pouvait-on fréquenter un endroit qui sentait aussi mauvais ?
Je cherchais du coin de l'oeil mon père et surtout dans les espèces de suite.
Je vis des gens assis sur lesquels se mouvaient des espèces de filles retouchées. Ça me débectait.
J'entendis mon nom vers la gauche. Je soupirais d'agacements. C'était un autre problème qui pointait son nez. Darius !

Meera que fais-tu ici ma belle ? Je croyais que ce genre d'endroits ne te plaisait pas.

Bonjour Darius, je vais aussi bien ! Et toi ? Ironisais-je. Je n'aime toujours pas ce lieu paumé.

Il ricana: mais viens t'asseoir, laisse-moi te faire démentir ce que tu as dit. Me dit-il en attrapant mon bras pour me forcer à le suivre. Je me dégageais rapidement de son bras et lui sommais de me laisser tranquille s'il ne voulait pas se retrouver castré.
Il se recula en levant ses mains de manière innocente.

Arrête de vouloir te comporter comme ces bougres. T'es une fille de la cité alors...

Je me comporte normalement et tu ne me connais pas alors laisse-moi tranquille Darius!

T'es une vraie bête toi !

Il paraît. Lui dis-je en le plantant là dès que je vis des filles agglutinées autour de celui qui avait perdu le titre de père dans le fond avec moi.
Je l'appelais juste ainsi par habitude.
Je rageais rien qu'en le voyant sortir son portefeuille pour leur remettre l'argent. Ce vieil ivrogne chômait mais il trouvait encore assez d'argent pour dilapider. Je le lui arrachais d'un geste fluide et rapide. Ce qui leur fit tourner la tête vers moi.

Eh si tu veux aussi de l'argent, faut que tu travailles comme nous ! Se plaignait l'une des filles.

Travailler ? Parce que ce que tu fais c'est travailler. Fichez le camp d'ici avant que je ne vous étripe bande de vautours. Leur dis-je en serrant les dents.

Ma...fille... Je... Tenta mon père. Mais je l'arrêtais avant qu'il continue. Même dans son état, il baissa la tête honteux. Il avait intérêt à ne pas plus m'énerver que ça. Je lui présentais la sortie d'une main puis il se leva péniblement. Il fit une autre tentative lamentablement. Je n'osais pas l'aider. Il s'était débrouillé pour venir ici, alors qu'il se démerde aussi pour sortir. Darius voulut l'aider mais mon regard l'en dissuada.
J'étais chargée de venir le récupérer pas de l'aider. Je n'en avais pas envie et je ne voulais pas pleurer. Oui car si je partais l'aider j'allais pleurer. Et il ne le méritait absolument pas.

Mee...ra... Meera je...

Ne dis rien et ne me parle surtout pas. À cause de toi, je suis obligée de venir dans cet endroit dangereux que tu nous avais interdit de fréquenter. T'en souviens-tu ? Lui dis-je en lui tirant violemment les cols. Tu ne peux pas t'en souvenir père, vu l'état pitoyable dans lequel tu te retrouve une fois de plus. Maintenant lève-toi !
Je le devançais me dirigeant vers l'autre sortie. Malgré ma colère, je voulais lui épargner de se traîner dans ces toilettes merdiques. Je n'avais pas envie qu'il s'attrape une maladie.
Nous étions presqu'arrivés à la porte lorsque celle-ci s'ouvrit sur Samuel...
Mince !

Meera: Secrets De Famille - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant