Meera: Secrets De Famille - Tome 1

5. Meera

«Un fast-food avec cet homme aux yeux verts et la chevelure rebelle»

Le médecin était implacable. Je m'étais faite très mal au bras, donc je devais rester tranquille sans travailler pendant un mois et deux semaines. En plus, il avait découvert que je couvrais la malaria. C'était une raison de plus pour m'ordonner de me reposer. Un mois et deux fichues semaines durant lesquelles je devrais me reposer sans empocher d'argent. J'étais chanceuse moi ! Mes parents n'étaient pas riches pour dire qu'ils m'enverraient de l'argent. Je ne voulais pas non plus être un fardeau pour Esmel et Trey ni pour Raphaël. C'était bien assez compliqué. J'avais un arrêt de travail qui justifiait ma pause. Abel n'allait pas être content. Je soupirais en sentant ma tête me lancer.

J'étais présentement dans le fast-food mais assise en compagnie de ce Stephen qui avait l'air préoccupé par mon état. Il devrait se sentir mal pour ça mais ce n'était pas sa faute. Si je n'avais pas couru et que je m'étais reposée comme il le fallait, ceci n'arriverait pas. Je lui souris pour le rassurer. Je vis Kelly venir vers nous. Elle nous salua... Enfin plutôt Stephen. Moi elle n'avait aucun regard sur moi, du moins elle faisait l'effort de ne pas me fusiller plus que ça.

Bienvenu au fast-food d'Abel, que puis-je faire pour vous ? Quelle est votre... Elle se coupa en ouvrant les yeux sur la personne qui était face à elle. Sa réaction me parut bizarre, comme si elle voyait une superstar.

Oh mon Dieu ! Stephen, oh c'est un réel plaisir de vous avoir ici mais que...

Oui...je ne sais pas de quoi vous parlez ! Lui dit-il en insistant bien sûr sa phrase. J'eus l'impression qu'il voulait taire une information qu'elle seule détenait. C'était bizarre !
Je vais juste prendre le plat. Merci !
Elle nota sa commande toute émue et s'en alla sans prendre la mienne. Quelle peste !
Stephen la stoppa net. Elle roucoula devant lui pensant qu'il lui voulait quelque chose.

Oui Stephen ! Minauda Kelly. Elle était ridicule, la pauvre !

Ne prenez-vous pas la commande de ma compagne ? Lui demanda-t-il mécontent d'un tel manque de considération pour ma personne. Ce dernier ne devait sûrement pas être habitué à de telles manières. Mais c'était mon quotidien ici ! Sur les quinze employés de ce lieu, seul un était mon ami. Le reste me jalousait parce qu'ils estimaient que j'étais trop chouchoutée par le patron. S'ils savaient ce qu'il m'avait fait endurer les mois de ma formation, ils se tairaient. J'avais su prendre sa confiance par ma ténacité, ma détermination à avoir un boulot et mon intégrité. Depuis je faisais partie de ses proches. Il m'invitait à ses sorties de famille et compagnie. Il me prenait comme sa fille, d'ailleurs avec laquelle je m'entendais super bien. Elle s'appelait Leïla. Ce n'était pas ma faute si je faisais bien mon travail. Plusieurs fois ils avaient tenté de m'évincer, cependant leurs plans échouaient lamentablement. Quant à Kelly, elle disait que je lui avais volé la vedette et que j'étais une simplette. Bref, ses motivations de la haine en mon égard étaient trop illogiques. Je ne lui avais jamais rien fait. Cette fille avait décidé de me haïr tout simplement.

Oh ne vous inquiétez pas ! Elle peut se servir elle-même. Elle est employée ici et...

Parce qu'elle travaille ici, ela vous donne-t-il le droit de lui manquer de respect? Est-ce que vous vous êtes entendue parler ? Si je comprends bien, il y aurait une loi pour les clients et les employés. Un employé reste un employé même s'il vient consommer ici. Ne fait-il pas aussi rentrer de l'argent au même titre que les autres clients ? Et au cas vous seriez mal-voyante ou aveugle elle a un plâtre.
Elle ne broncha pas étonnée qu'il prenne ma défense. Ce qui était logique, il n'y avait pas de quoi s'effarer.

De ce fait, n'est-elle pas elle aussi un client ? Vous êtes juste débile ou est-ce que c'est un gag ? Un gag que vous allez vite cesser avant que je ne m'énerve et que j'attribue une mauvaise note à ce fast-food et par la même occasion à vous... Kelly c'est bien ça ? Finit-il par lire son prénom sur son uniforme.
Elle devint blanche, transie de peur. J'aurais pu jubiler si les menaces s'arrêtaient à elle seule, mais elles allaient aussi contre le bien de Abel, que je considérais comme un père. Je soufflais bruyamment.

Non Stephen ça va ! Lui dis-je sans remarquer que j'avais posé ma main sur les siennes. Il dirigea son regard sur elle puis sur moi avant de retirer ses mains complètement. Je ne savais plus où me mettre. Mince ! Il n'avait pas apprécié mon geste, en même temps moi-même je ne comprenais pas pourquoi je l'avais fait.
Je vais plutôt me ser...

Tu n'y penses même pas ma belle. Intervint une voix que je connaissais bien. C'était Fallone, mon seul ami du coin.

Veuillez excuser Kelly pour cette faute ! Laissez la maison se faire pardonner en vous offrant les plats que vous commanderez. Kelly nous n'avons plus besoin de toi ici. Lui imposait-il.
Elle partit la tête basse, honteuse. Elle savait qu'elle aurait des problèmes. Fallone était le second d'Abel et il lui faisait chaque fin de semaine le compte rendu de tout. Elle allait passer un sale lundi, c'est moi qui vous le dis. Après avoir fusillé du regard Kelly, il se retourna pour me sourire avec un air "encore désolé ". Puis il analysa Stephen sans émettre de cris, cependant je notais qu'il avait eu un sursaut en le remarquant nettement. Ensuite il dirigea son regard sur mon bras et fronça les sourcils.

Tu t'es fait mal ma belle. Comment est-ce arrivé ? Me demanda-t-il soucieux.

J'ai trébuché ! Après je te raconterai mais là j'ai une faim de loup. Je prendrai une petite pizza avec du soda, chéri.

Bien ma puce ! Me dit-il avec un clin d'oeil avant de se diriger à la cuisine. Je souris sans m'en rendre compte. Fallone avait un effet
apaisant. Il donnait envie de rire même dans la colère. Ce qui faisait que je ne pouvais pas me fâcher plus de deux minutes contre lui. Je reportais mon visage vers Stephen mais ce que je vis me coupa le sourire. Il me fusillait presque du regard. Et ses pupilles luisaient étrangement. Je me dandinais comme une petite fille prise en pleine faute. Qu'est-ce qui m'arrivait ?

Ça va ? Je ne vous dérange pas trop, j'espère ?
Hein quoi ?

Pardon ?

Vous aviez l'air très contents de flirter ensemble. Signalait-il.
Flirter ? Mais avec qui ? De quoi parlait-il ?

Mais de quoi vous parlez ? Demandais-je légèrement perdue.

Je parle de toi et l'autre serveur. Je dois dire que vous êtes sans gêne de flirter devant moi, alors que je t'ai invitée.

QUOI ? Hurlais-je dès que je compris ce qu'il voulait dire. Je ne flirtais pas avec Fallone. Il est juste un collègue de travail et mon ami c'est... Je me tus lorsque je me rendis compte que je me justifiais devant un parfait inconnu.
Et je ne vous ai rien demandé hein. Je pouvais très bien me débrouiller seule. Et vous n'avez pas le droit de vous comporter ainsi.

Oh que si j'ai le droit ! Me dit-il en s'avançant de ses bras sur la table. Il vint caler son visage devant moi, si près que je coupais ma respiration. Cette proximité soudaine me fit perdre pieds et me donna chaud. Mais à quoi jouait-il ? Je pus remarquer que ses yeux étaient entourés de longs cils et ses pupilles avaient des contours d'une couleur verte, plutôt étrange. Il était vrai que mon pays était un brassage de teints et de couleurs de peau mais j'étais sûre qu'il n'était pas de ma nationalité.

Vous êtes trop...trop... Vous êtes trop proche de moi. Lui fis-je remarquer tout en retenant ma respiration. Mais il ne bougea pas d'un poil. Dès qu'il entendit un raclement de gorge, il esquissa un sourire en coin avant de s'écarter lentement de moi sans cesser de me fixer.
Quand il s'assit complètement, il remercia mon ami d'un sourire alors que ce dernier ne souriait plus. Il ne m'adressa plus un regard et s'en alla après avoir déposé nos commandes.
Stephen mangea comme si de rien n'était, alors que moi j'étais totalement perdue et énervée par cette attitude.

Bon appétit ! Me souhaita ce mec bizarre en face de moi. Je fronçais les yeux. C'était officiel, il ne serait pas mon ami, ce type !