Chapitre 7 · Tarée de fangirl

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On avait souvent dit à Fusae que le ridicule ne tuait pas. On lui avait aussi répété que ce qui ne la tuerait pas la rendrait plus forte. Au vu des événements récents, la lycéenne en était venue à cette conclusion : elle était une fontaine de jouvence.

Deux journées s'étaient écoulées, étonnamment calmes par rapport au tumulte des précédentes. Ni chute mémorable devant la moitié du lycée, ni projection de suc gastrique sur un camarade innocent, ni perte de carnet au contenu compromettant. Tout s'apaisait enfin. La lycéenne ne revit d'ailleurs pas Oikawa, que ce soit le matin au moment de partir au lycée, ou en rentrant chez elle le soir. Elle ne se risquait plus à le guetter par la fenêtre de sa chambre, trop effrayée à l'idée de se faire surprendre, mais elle l'avait entendu à chaque fois. Un peu naïvement sans doute, la jeune fille aimait à croire que son voisin avait renoncé à retrouver l'auteur de cette trentaine de portraits de lui.

Ce soir-là, Fusae ne le reverrait pas non plus. Alors qu'elle sortait d'un karaoké en ville avec Yuna et quelques copines de sa classe, la jeune fille avait été réquisitionnée par sa mère pour un passage express au supermarché avant de rentrer. Le soleil était déjà en train de se coucher dehors, et vu le monde qui s'agglutinait aux caisses, même avec ses quelques articles, elle comprit bien vite qu'elle ne serait pas rentrée chez elle avant dix-neuf heures.

— Tu as bien regardé dans le rayon des nouilles ?

La voix de sa mère l'arracha à ses réflexions et Fusae fut brutalement ramenée dans le brouhaha du commerce. Le téléphone contre l'oreille, elle fit un tour sur elle-même pour fouiller les étagères du regard à la recherche du seul item qu'il lui manquait. Elle ne pouvait même pas dire de partir sans, car une soupe Miso sans miso n'en était plus vraiment une.

— Quelle idée de mettre ça dans les nouilles aussi... maugréa la jeune fille.

— C'est juste à côté, tu devrais le trouver, répondit sa maman à l'autre bout du fil, comme si c'était évident pour tout le monde. Et ne te trompe pas, c'est du miso de riz qu'il me faut !

Si elle leva les yeux au ciel en l'écoutant dire ça, car ce devait être au moins la dixième fois qu'elle le répétait, l'adolescente promit de le trouver avant de raccrocher. Non sans un soupir fatigué, elle vérifia l'heure sur son téléphone – le dix-huit heures trente indiqué la déprima encore plus – et se mit en quête du rayon réservé aux nouilles. Elle n'avait pas un sens de l'orientation particulièrement mauvais, mais restait quelqu'un de très casanier, préférant largement les commandes en ligne aux achats en personne – notamment car ça lui évitait bien des situations ridicules. À force de zigzags aléatoires dans les allées du supermarchés, l'adolescente finit par trouver ce qu'elle cherchait. Elle s'autorisa même un sourire victorieux devant sa boîte de miso, quand son regard s'arrêta sur la personne qui se tenait à quelques pas d'elle.

Une figure élancée, des épaules larges, la posture droite, des yeux sombres en amande au milieu d'un visage débordant de sérieux. Iwaizumi Hajime, l'un des meilleurs amis de son voisin, et celui qui l'avait ramassée le jour de leur rencontre, se tenait à quelques pas d'elle. Et il venait de la remarquer lui aussi. Leurs regards se croisèrent sans que l'un ou l'autre ne prononce le moindre mot, puis quelques secondes s'écoulèrent avant que le silence ne soit rompu.

— Fukami, c'est ça ? s'enquit-il alors en la pointant du doigt.

— Euh... non ?

Blanc. La jeune fille fronça les sourcils, interloquée par ce nom sorti de nulle part. Puis le garçon soupira et secoua la tête, tout en se rapprochant d'elle.

— Désolé, j'ai pas la mémoire des noms.

— T'inquiète, murmura-t-elle dans un sourire poli. On ne s'était pas vraiment présentés, non plus.

La Fenêtre d'en face |HQ!!|Où les histoires vivent. Découvrez maintenant