— Tiens-toi droite, les pieds fermement ancrés dans le sol.
Fusae s'exécuta avec concentration. Les mots d'Oikawa coulaient sur sa peau pour s'infiltrer jusqu'au plus profond d'elle-même, jusque dans des recoins de son esprit dont elle n'avait jamais soupçonné l'existence. Elle avait le visage droit, orienté vers l'avant, vers le filet de volley-ball qui quadrillait la moitié de son champ de vision. Un coup d'œil furtif vers la gauche lui permit de s'assurer que son voisin était toujours là, même si, au fond, elle savait parfaitement qu'il était tout proche. Grâce à sa voix qui ne cessait de ronronner des conseils et des recommandations, à ses rires discrets qui secouaient l'air quand elle échouait à les appliquer, ou encore à sa main chaude qui se posait sur son épaule ou sa taille pour mieux la positionner. Ses chaussures de sport crissèrent sur le parquet quand il s'éloigna, et la balle rebondit une, deux, trois fois contre le sol avant qu'il ne la lui envoie. Elle bougea trop tard, et ne l'effleura que du bout du majeur. Soupir de dépit.
— C'est rien Sae-chan, s'exclama son voisin entre deux rires tandis qu'elle bougonnait. Dis-toi au moins que tu l'as touchée, cette fois.
— Oui, mais ça m'énerve. Ça fait une semaine qu'on s'entraîne tous les soirs...
— Ah ça... je te l'ai dit, que tu pouvais pas apprendre à jouer en une semaine.
— Je m'attendais quand même à plus de résultats, pesta-t-elle contre elle-même, avant de lui lancer la balle dans un geste rageur.
Il la rattrapa agilement, cet impitoyable sourire au coin des lèvres. Voilà maintenant cinq jours qu'Oikawa apprenait à l'adolescente à jouer au volley-ball. Si, pendant la semaine, les deux lycéens s'étaient retrouvés dans le parc près de chez eux après l'entraînement du volleyeur, pour répéter des gestes basiques ; ce samedi-là, il l'avait emmenée à Aobajohsai afin d'utiliser un de leurs gymnases, qu'il jugeait mieux adaptés. Impressionnée qu'il y mette autant du sien pour l'aider, Fusae redoubla d'efforts à cet entraînement si particulier. Ce n'était pas très fructueux, toutefois : elle était incapable de renvoyer la balle, ratait les trois quarts de ses passes et chacun de ses services atterrissait soit dans le filet, soit hors des limites du terrain. Sa nullité dans ce sport n'avait d'égal que son talent en dessin. Elle allait définitivement faire perdre sa classe au tournoi de la Fête du Sport.
— Tu veux qu'on fasse une pause ? lui proposa son voisin, en la voyant ronchonner sur place. Ça ira peut-être mieux si tu souffles un peu.
En nage et les muscles fatigués, la noiraude accepta l'offre bien volontiers. Elle se laissa tomber sur le sol du gymnase, dos contre le mur, et vida la moitié de sa bouteille d'eau pour tarir sa soif. Très vite, Oikawa vint la rejoindre, tandis qu'elle haletait en raison de son endurance inexistante. Le garçon eut la décence de ne pas la railler sur ce détail et s'affala près d'elle.
— Tu auras beaucoup de matchs, lundi ?
Sa question lui valut un coup d'œil surpris de la part de Fusae, mais il ne releva pas, gardant le regard fixé sur le mur opposé au leur. Elle se perdit un instant dans la contemplation de son profil régulier qu'elle n'avait que trop dessiné sans jamais se lasser, avant de se ressaisir.
— Hum, deux ou trois. Ça dépendra de combien on en gagne, répondit-elle en haussant les épaules.
— Ou plutôt combien vous n'en perdez pas, tu veux dire ?
L'adolescente leva un regard blasé vers son voisin, dont le sourire narquois s'agrandit dans un frisson à la commissure de ses lèvres. Elle leva ensuite les yeux vers son regard mordoré.
— Je suis artiste, pas sportive, répliqua-t-elle comme si cela pouvait tout justifier.
— J'le vois bien ça, Sae-chan, ou tu ne serais pas aussi rouge qu'une écrevisse.
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La Fenêtre d'en face |HQ!!|
FanfictionFusae, lycéenne introvertie, est passionnée par le dessin. Chaque soir, elle dessine à son insu des portraits d'Oikawa Tooru, un inconnu au charme irrésistible qui habite dans l'immeuble en face du sien. Rien ne les destine à se croiser, jusqu'au so...