La vie reprit son cours avec la délicatesse d'une brise printanière. Fusae ne vit pas passer le week-end, ni le début de la semaine qui suivit, emportée par la cadence assommante du quotidien. Elle ne revit pas beaucoup Oikawa, à l'exception de quelques brèves minutes le soir, entre leurs deux immeubles qui luisaient sous le soleil couchant. Le temps d'une ou deux taquineries, le volleyeur aimait à lui chantonner son sempiternel « Sae-chan » avant de rentrer chez lui sur ce sourire qui avait le don de lui retourner l'esprit.
Il n'y eut aucune mention de leur étreinte. Si les souvenirs tanguaient dans l'esprit de l'adolescente, irrémédiablement présents, pas une seule fois ils ne vinrent animer leurs conversations, la troublant plutôt jusque dans les tréfonds de ses rêves. La chaleur de sa peau contre la sienne, la tendresse qui s'en était dégagée, le besoin irrépressible et spontané qui les avait poussés l'un vers l'autre, et bien d'autres détails si nombreux que la nuit ne suffisait jamais à tous les lister. Tout se répétait en boucle, et le matin la noiraude se levait avec un nouveau détail de cette embrassade pour lui emmêler les pensées. Et ce sujet, lui ne l'abordait pas non plus, que ce soit en face ou dans des messages – car ça, il y en avait, des messages. Principalement des memes, que le volleyeur lui envoyait et qu'elle ne comprenait pas toujours, auxquels elle s'efforçait de répondre à chaque fois ; la bonne humeur de Tooru était revenue, et ça, pour rien au monde elle n'aurait su l'ignorer.
Ce jour-là n'échappait pas à la règle. Fusae rentra éreintée de sa journée au lycée, où elle avait raté son plat en cours de cuisine après avoir rêvassé un peu trop longtemps, et où elle s'était vue obligée de rester après le tout dernier cours pour recevoir un sermon par son professeur principal pour « utilisation abusive de son téléphone portable ». Ce n'était que la deuxième fois qu'elle se faisait surprendre à l'utiliser en cours, et pour sa défense, elle avait simplement cherché à comprendre la dernière vidéo que lui avait envoyée son voisin, rien de bien méchant. Cependant ça avait été suffisant pour que l'enseignant menace d'appeler sa mère. C'est donc un poil démoralisée qu'elle pénétra dans sa rue, le pas traînant, presque las.
— Coucou, Sae-chan ! la salua comme à son habitude Oikawa, quelques pas derrière elle.
Elle n'aurait pas su dire pourquoi – enfin, bien sûr qu'elle aurait su, mais plutôt mourir que de se l'avouer – les étincelles pétillèrent dans sa poitrine au son de sa voix. Lentement, Fusae pivota vers lui. Il se tenait à quelques pas d'elle, rayonnant dans son uniforme beige à tartan, le sac sur l'épaule. Son regard mordoré lui courut sur le visage, sur ses yeux puis ses taches de rousseurs, avant d'aviser sa moue dépitée.
— Ça va pas ? s'étonna-t-il, sans se départir de son sourire. Je te manque tant que ça, au lycée ?
— Hum, pas vraiment, tu m'attires surtout des ennuis, marmonna-t-elle en cessant néanmoins de marcher pour l'attendre, les joues rosissantes face à son sous-entendu.
— Quel genre d'ennuis ? s'enquit curieusement le volleyeur, une fois à sa hauteur, visiblement amusé par l'idée de réussir à l'enquiquiner jusque dans son lycée.
— Je me suis pris un sermon à cause de tes vidéos débiles, figure-toi.
— Mes vidéos ? Ton prof aime pas les théories des anciens astronautes, c'est ça ?
— Mais non, pesta-t-elle en roulant des yeux, même si elle n'était pas réellement agacée par ses remarques. Il a surtout pas aimé que j'en regarde pendant le début du cours.
Un « oh » de compréhension lui échappa, avant que ses lèvres ne se fendent d'un sourire goguenard – ce sourire qui avait le don de lui taquiner les nerfs. Et, appuyant un bras sur son épaule frêle qui lui arrivait sans mal au niveau du coude, il se pencha pour lui répondre à voix basse.
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La Fenêtre d'en face |HQ!!|
FanfictionFusae, lycéenne introvertie, est passionnée par le dessin. Chaque soir, elle dessine à son insu des portraits d'Oikawa Tooru, un inconnu au charme irrésistible qui habite dans l'immeuble en face du sien. Rien ne les destine à se croiser, jusqu'au so...