Une étrange légèreté accompagna Fusae pour le reste de son week-end, et les quelques jours qui suivirent. Bien sûr, elle restait encore un peu contrariée par l'annonce de son père – à laquelle elle avait répondu par un simple « O.K. » – mais il lui semblait être libérée d'un poids qu'elle avait trop longtemps porté seule. Oikawa n'avait rien dit : il ne l'avait pas contrainte à parler, ne l'avait harcelée de questions comme il ne lui avait pas demandé de se taire. Son voisin s'était contenté de lui payer un okonomiyaki et de l'écouter monologuer sur ses misères d'enfant de divorcés, sans une seule fois lui dire qu'elle lui cassait les oreilles. Et si elle se sentait ridicule à l'idée d'avoir déballé toute sa vie à ce garçon qu'elle ne connaissait pas si bien que ça, en plus d'avoir raté une superbe occasion de le dessiner, elle ne pouvait s'empêcher de lui en être reconnaissante.
— Donc t'es libre pour mon anniversaire, jubila Yuna, à la pause déjeuner du lundi midi. Cool, le karaoké aura sûrement lieu du vendredi soir !
La noiraude hocha la tête distraitement, tandis que sa meilleure amie s'enthousiasmait déjà de tout ce qu'elle avait prévu de faire pour le jour de ses dix-sept ans. Fusae venait de lui raconter en quelques mots rapides son week-end. Elle avait répondu aux questions de Yuna sur le match à Aobajohsai, et résumé sa conversation avec Otsuka Mao – ce qui ne manqua pas de surprendre Yuna, mais avait volontairement passé sous silence son passage au restaurant d'okonomiyaki en compagnie d'Oikawa, peu désireuse de lui avouer qu'elle avait manqué de fondre en larmes devant le volleyeur. Ce dernier ne manquerait pas de la taquiner dessus à l'avenir, et elle n'avait pas besoin que Yuna se joigne à lui dans cette tâche douloureuse. Alors elle préféra changer de sujet.
— Et toi, ton date avec Yoshita-san ?
— Oh, bon sang, j'avais l'impression d'être la Reine Amidala protégée par mon beau jedi ~
— À ce point ? s'étonna l'autre, un peu sceptique.
Il n'en fallut pas plus pour que des étoiles pétillent dans ses yeux. Aussitôt, elle s'empressa de raconter les moindres détails dudit date. Si elle dut la faire taire avant d'avoir les détails des roulages de pelle et des pelotages dans le train fantôme de la fête foraine, Fusae réprima un sourire, fière d'avoir tapé dans le mille – et surtout d'avoir réussi à détourner la conversation de son voisin.
— J'te jure, il était tellement drôle, et il connaît toutes les répliques de La Revanche des Siths ! Meuf, j'ai rencontré mon âme sœur, annonça-t-elle sérieusement.
— Ah ? Mais attends, Yoshita-san est dans la même classe que nous depuis deux ans.
— Oui bon, c'est qu'un chiffre ça !
Elle balaya l'air de la main, une moue vaguement agacée sur le bout des lèvres. Bien qu'un peu incrédule, l'artiste ne chercha pas à comprendre. Cela ne concernait qu'eux, et en dépit de toute sa curiosité de petite fouineuse, elle était parfaitement consciente de ne pas réussir à saisir les fondements de cette relation dont elle avait découvert l'existence seulement quelques jours auparavant. De toute façon, quand bien même elle l'aurait voulu, elle n'aurait pas pu le faire car l'entrée fracassante d'une de leurs camarades de classe dans la pièce attira soudain toute leur attention.
— Marika-chan ? Qu'est-ce qu'il t'est arrivé ? s'exclama Yuna, en s'apercevant que la demoiselle claudiquait, en équilibre instable sur des béquilles.
— Cheville foulée, répondit la jeune fille avant de se laisser tomber sur sa chaise, tandis que les deux autres se précipitaient à ses côtés. À l'entraînement pour la Fête du Sport, j'ai voulu sauter et j'me suis mal réceptionnée.
— Pas trop mal ? grimaça Fusae, penchée vers sa jambe déjà prisonnière d'une attelle.
— Un peu mais ça va, j'ai eu de la glace et des cachets. Par contre ça m'embête pour lundi...
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La Fenêtre d'en face |HQ!!|
FanfictionFusae, lycéenne introvertie, est passionnée par le dessin. Chaque soir, elle dessine à son insu des portraits d'Oikawa Tooru, un inconnu au charme irrésistible qui habite dans l'immeuble en face du sien. Rien ne les destine à se croiser, jusqu'au so...