Le jour où on rejoindra les étoiles

Chapitre 4 - Camille

But in your dreams whatever they be
Dream a little dream of me

Dream a little dream of me - Ella fitzgerald & Louis Amstrong

*

Depuis que monsieur Davis m'a fait passer la fameuse date, Éric a décidé de devenir mon entraîneur personnel jusqu'à vendredi prochain. Je ne pensais pas qu'il prendrait ces moments si sérieusement et je mentirais si je disais que ça ne me touchait pas.

« Camille, t'es là pour bouger ton cul ou pour réfléchir au sens de la vie ? J'ai dit oui pour que tu ailles boire, pas pour que tu rêvasses, je te rappelle ! »

Oui, alors je vais peut-être reformuler ce que je voulais dire : j'étais vraiment heureux quand Éric m'a proposé son aide... Jusqu'à ce que je découvre qu'il prenait beaucoup trop à cœur ces entraînements.

Je souffle péniblement et rejoins mon coach particulier sur le terrain en petites foulées. J'ai à peine le temps de relever la tête que je reçois un ballon en pleine face.

« Réflexe, Camille, réflexe ! Il ne reste que cinq minutes, tu vas bien les tenir, non ? hurle-t-il en sautillant sur place. »

Son énergie me dépasse. J'ai l'impression que je vais fondre sur le terrain en une masse collante pendant qu'il est toujours en train de courir en long et en travers alors qu'il a encore son véritable entraînement de basket qui l'attend à la suite.

Après être allé chercher le ballon au fond du terrain, je m'avance en dribblant, et marque depuis le cercle du panier à trois points. Le cri que pousse Éric me fait pouffer. Je l'ai enfin réussi.

Des applaudissements résonnent soudain et nous nous tournons vers le nouvel arrivant.

« Bon, après l'exploit de la semaine, vous nous laissez la place ? commence une voix grave bien trop reconnaissable.

- Gaaaaabin, le retour ! Tu es en avance ou c'est moi ? questionne Éric en se rapprochant de son pote.

- On s'en fout, j'aimerais juste le terrain.

- Deux minutes, OK ? J'ai deux mots à dire à mon élève... déclare mon ami en insistant sur le dernier mot avec un clin d'œil à mon égard. »

Gabin reste immobile et croise ses bras, en attendant que nous finissions. Éric lui lance un coup d'œil contrarié, mais son capitaine ne relève pas.

« Bon... Tu peux être content de toi, dans moins d'une semaine les sélections et si tu veux mon avis, tu es déjà dans les Hawks... chuchote-t-il avec un air fier, mais, je sais, enfin j'espère, que tu as autant envie que moi de fermer le clapet de monsieur grognon ici présent, fait-il en pointant du doigt le concerné, alors, on va faire quelque chose : tous les soirs, rejoins-moi ici comme on le fait depuis le début de semaine, mais une heure plus tôt encore. On va bosser ton cardio' , les passes, et tout ce qui pourra te servir. Je vais te concocter un programme du tonnerre à partir de celui de Davis, finit-il en s'éloignant sans me laisser le temps de riposter. »

Je couine face à son annonce. Je ne sais plus si j'ai tant envie de remettre mon probable futur capitaine à sa place, finalement...

Ce dernier se racle la gorge pour me rappeler sa présence et je pars chercher ma veste et ma gourde sur le banc. Lorsque je me retourne, un corps m'empêche de passer et je le sens se pencher sur moi.

« Au revoir, Camille... chuchote-t-il en appuyant chaque syllabe tandis que je frissonne. »

Je ne sais plus où poser mon regard et je m'enfuis à grandes enjambées alors que j'entends un léger ricanement monter depuis l'endroit que je viens de quitter.