Chapitre 29 - Camille

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I wanna be the one you're guiding
'Cause I believe that you could lead the way
[...]
I really need somebody to call my own
I wanna be somebody to someone
Someone to you

Someone to you - Banners

*

Gabin me tend un casque pour que je monte sur sa moto. Je lorgne vers lui d'un regard suffisamment compréhensible pour qu'il devine que je ne compte pas m'installer sur son engin sans savoir où nous allons. Il soupire mais me sourit avec confiance.

« Camille, le principe d'une surprise, c'est que c'est censé te surprendre. Alors si je te le dis, je gâche tout, tu comprends ?

- Gabin, commence-je en reprenant son ton, je n'aime pas être surpris, j'aime quand tout est simple, calé et sans embrouille, alors je t'en prie, arrête ta tête de mule et crache le morceau.

- Je te promets que tu vas aimer !

- On va où ?

- S'il te plaît ?

- On va où ?

- C'est notre dernière soirée ensemble avant que je ne parte à Londres. Fais-moi plaisir. Et fais toi plaisir aussi ! Pas besoin d'avoir un train de vie calé sur tous les niveaux, un peu d'imprévu ne fait pas de mal, je t'assure. »

Ah ça, pour un imprévu. Gabin en est un gros. Nous en est d'ailleurs un autant dans ma vie que dans la sienne. Et, je ne peux pas lui donner tort sur ce point, il y a parfois de merveilleuses surprises.

Peut-être est-ce à cause de ma curiosité maladive, de mon envie de dépasser mes angoisses, ou juste de son sourire auquel je ne peux pas résister, mais j'enfile le casque et passe derrière mon copain en entourant son torse de mes bras et en le serrant le plus fort possible.

« Merci, Cam. »

*

Après une demi-heure de route, nous arrivons enfin à destination. Destination dont je ne vois rien et ne sait rien puisque Gabin m'a placé un bandeau sur les yeux pour préserver jusqu'au bout le mystère. Il saisit mon casque et l'enlève de mon crâne, attrape mes deux mains et nous commençons à avancer, à tâtons pour ma part.

« Avance... Doucement. Marche en haut. Marche en haut. Marche en haut. À gauche. Marche en haut. Marche en haut. Marche en haut. Attention, elle est plus éloignée, celle-ci. Continue, vas-y. Je te tiens ne t'en fais pas. Et... On est arrivés !

- Je peux enlever le bandeau ?

- Laisse-moi faire. »

Je ré-habitue mes yeux à la luminosité du jour et fronce les sourcils en les clignant. Une fois remis, j'observe le paysage. Nous sommes en haut d'une colline qui domine la ville. Les lumières dans la pénombre offrent un rendu spectaculaire. Alors que dans nos jardins respectifs, le ciel est pollué par les lampadaires qui éclairent tous les cinq mètres, ici, il me suffit de lever la tête pour observer les étoiles qui veillent sur nous.

Pendant que je m'abandonne à ma contemplation, Gabin se rapproche de moi et je sens son souffle chaud caresser ma nuque lorsqu'il prononce :

« Je t'avais dit que tu ne serais pas déçu. »

Il sort de son sac un plaid où il installe de quoi picorer. Mon regard s'illumine quand je comprends : un pique-nique. Je saute au cou de mon adorable copain qui se met à rougir violemment.

Il s'assoit alors que je m'allonge sur lui, la tête sur ses cuisses. Je suis sous le charme. Encore une fois, il a su me montrer qu'il était attentif à tous les moindres détails. Comme lorsque j'avais évoqué le fait que j'adorerais pouvoir observer le ciel sans être gêné.

Cette fois-ci, j'ai le droit à double spectacle : les étoiles qui brillent dans le firmament et la mienne qui me fixe amoureusement.

Nous ne partageons pas de grandes discussions ce soir-là. Peut-être parce que parfois, même les mots ne peuvent plus exprimer assez d'émotions. Le silence qui règne est apaisant. Les sourires et les baisers échangés veulent tout dire. Et je ne voudrais quitter cet endroit pour rien au monde.

Par moment, Gabin me souffle des vers de ses poèmes favoris et j'essaie de les graver dans mon coeur comme ils le sont dans sa tête. J'aimerais pouvoir mettre ce moment en bouteille pour pouvoir le ressortir pendant les moments de blues. Mais comme c'est impossible, je tente juste de profiter pleinement de chaque seconde que je passe là.

*

Sur la route du retour, je me blottis contre le dos de mon petit-ami et absorbe cette sensation d'infinie qui me tord les tripes. C'est ça. Je le sens. J'en suis sûr.

C'est donc ça, être amoureux. Avoir l'univers devant soi et vouloir s'y plonger dedans, sans peur.

*

Une fois dans ma chambre, je ne me détache pas de Gabin et referme la porte d'un brute coup de pied. Une fièvre brûlante s'est emparée de moi. Jamais elle ne s'était montré si hardante. J'ai littéralement l'impression de brûler de désir.

Et la bonne nouvelle, c'est que je suis loin d'être le seul à en croire les pupilles assombries de Gabin.

Le jour où on rejoindra les étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant