I'll reach my hands out in the dark
And wait for yours to interlock
I'll wait for youDon't give up on me - Andy Grammer
*
La fin de la journée se déroule lentement. Chaque minute dure une heure. Chaque heure en dure deux. Et l'après-midi compte plusieurs jours. Marie s'est précipitée vers moi dès que je suis revenu. Jules a demandé un compte-rendu détaillé. Et Addison m'a simplement remercié.
Je triture nerveusement le contenu de mon assiette avec ma fourchette. Camille est parti du lycée avant que la sonnerie n'annonce la fin du cours d'histoire. Je n'ai pas pu le revoir. Et, ça m'angoisse. Je suis mal et je ne l'ai jamais fait autant ressentir. J'actualise la page de ma conversation avec Camille sans arrêt. Les innombrables messages que je lui ai laissés restent sans réponse.
« Ne t'en fais pas, il lui faut un peu de temps pour se remettre d'aplomb, me glisse Marie en s'asseyant à côté de moi.
- Non, mais ça va, tente-je pour me convaincre.
- Eh, Gab ! Qu'est-ce qu'il s'est passé avec Camille ce matin ? me demande Darek depuis l'autre bout de la table.
- Laisse tomber, Darek, répond Jules en voyant mon air perdu.
- T'as vu comment Gabin paraît mal ? Tu crois vraiment qu'on va le laisser tomber, Jules, sérieusement ?
- C'est juste de la fatigue, Éric, juste de la fatigue, dis-je. »
Éric me fixe. Une lueur indéchiffrable passe dans son regard et il se lève en prenant son plateau.
« Bon, j'y vais, dit-il avant de partir.
- Quelle mouche l'a piquée ? interroge Jackson en posant son plateau à côté des nôtres. Je viens de voir Éric partir comme un fou, je crois que j'ai dû louper un épisode.
- Et Gabin qui déprime pour on ne sait quoi encore, c'est quoi cette ambiance de maison de retraite ? commence Noah en s'installant. »
Je souffle alors que les nouveaux arrivants se rendent compte de l'absence de notre équipier.
*
Le sujet Camille est vite oublié lorsque les gars se rendent compte du froid qu'il jette. La table se vide peu à peu mais je reste assis, laissant vagabonder mes pensées.
Jules se racle la gorge et je me rends compte à ce moment seulement que nous ne sommes plus que tous les deux.
« Qu'est-ce qu'il se passe ?
- Il se passe que personne n'a l'habitude de voir le Gabin toujours souriant dans cet état, et que même si je ne remets pas en doute le fait que toi aussi tu puisses avoir des coups de mous, je commence à m'inquiéter, débite-t-il en me toisant.
- C'est... C'est Camille. Je m'inquiète pour lui...
- Oh, fait-il surpris. C'est donc ça.
- Il ne répond pas.
- Il est fatigué après ses crises. Il me semble qu'il m'a dit te l'avoir confié.
- Oui, mais...
- Mais quoi, Gabin ? Oui, Camille est mal. Oui, sur le moment c'est flippant pour tout le monde. Oui, tu l'aimes. Mais non, ça ne sert à rien de jouer la mère poule dans ces moments-là.
- Mais, c'est ton pote, non ? Tu dois savoir ce que c'est d'avoir peur pour lui.
- Effectivement. Je n'ai jamais eu à l'aider. Il ne s'est jamais confié à moi sur ce qui lui arrivait en détails. Mais j'ai déjà vécu ses élans de panique. Et je comprends comment tu te sens. Mais il va bien, je t'assure.
- Comment tu peux dire ça en l'ayant vu se tordre de désespoir comme ça, Jules ? Comment ?
- Parce que c'est ce qu'il m'a demandé. De ne pas m'inquiéter plus qu'il ne le fallait. C'est impressionnant. Pour lui. Pour nous. Mais ça ne l'a pas empêché de vivre jusqu'à maintenant. Je sais que vous vous êtes vus à son retour. Et je sais aussi que c'est à ce moment-là qu'il t'a confié ce qui lui arrivait. Mais retiens bien que ce Camille-là, était déjà mal quand il te l'a dit. Il était en train de vivre de manière bien plus douce ce à quoi tu viens d'être spectateur. Notre Camille, lui, une fois remis sur pieds est un battant. Et je te promets qu'il veut que tu ailles bien. Que tu vives normalement. Que tu l'attendes si tu le veux. Mais que tu continues ta vie.
- Je ne peux pas faire tout normalement alors que mon copain est en train de se battre contre des démons invisibles... C'est... Non, je ne peux pas.
- Si ! Si tu peux. Personne ne te demande de faire comme si de rien n'était, mais de continuer à vivre normalement jusqu'à son retour. Punaise, Gabin. Essaie de visualiser. Toi. Camille. Dans quelques années. Votre bac en poche. Toujours ensembles. Un amour fou. Et bien, ses crises ne lui auront peut-être pas passées. Peut-être qu'elles ne lui passeront jamais entièrement. Tu te vois vivre comme ça, le reste de ta vie ?
- Mais lui, devra certainement vivre comme ça le reste de sa vie.
- Camille est un battant. Il n'a jamais perdu totalement pied depuis l'accident. Et tu le rends heureux. Alors, il n'y a aucune raison que ça arrive maintenant. Fais-moi confiance. »
Il s'arrête en me fixant puis se corrige, coupant le silence qui s'est installé :
« Et puis, non en fait. Fais mieux : fais lui confiance. »
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Le jour où on rejoindra les étoiles
RomanceJe crois que je n'avais jamais ressenti ça. Un vide immense qui vous entoure. Une seule idée qui vous obsède. Une envie de rien, de tout, de lui. Je crois que je ne pourrais pas trouver les mots pour qualifier ce sentiment qui m'est tombé dessus. D'...