Chapitre 14 - Gabin

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« Maman, je vais bosser avec un pote, je reviens pour manger ! je hurle à qui voudra l'entendre en enfilant une veste. »

Je distingue une vague réponse alors que je ferme la porte derrière moi. Mon téléphone s'allume dans mes mains lorsque je reçois un message de mon copain.

De : Cam'

OK, je t'attends alors :)

Je souris et monte sur mon vélo. J'en ai pour cinq minutes à le rejoindre, heureusement qu'il se trouve dans un quartier proche du mien. Je laisse l'air frais fouetter mes joues et mes bras nus sous le t-shirt que j'ai enfilé avant de partir. Le vent me glace le sang et je pédale encore plus rapidement jusqu'à arriver devant un jardin familier derrière lequel se trouve une grande bâtisse.

Un garçon souriant se lève du perron quand je pose mon vélo dans l'herbe. Il s'avance et m'embrasse doucement. Je souris contre ses lèvres et pose mes bras de part et d'autre de son corps pour l'enlacer.

« Tu n'es pas gelé ? m'interroge-t-il en pointant du menton mon t-shirt tout en se recroquevillant plus encore dans son pull.

- Un peu, mais je savais qu'en arrivant ici, je trouverais de quoi me réchauffer... j'énonce avec un regard qui signifie tout. »

Il ne relève pas, bien que j'ai le temps d'apercevoir ses lèvres remonter en un sourire compris. Nous rentrons dans la maison laissée vide par sa famille, partie faire des courses. Le salon n'a pas changé. Si on ne compte pas le nombre de photos d'Hazel qui ont disparues.

« Comme tu peux le voir, ça n'a pas beaucoup bougé ici, me sourit-il.

- Je ne suis pas perdu au moins, dis-je en enlaçant nos mains. »

Il m'emmène dans le couloir et je reconnais la porte de la chambre de sa sœur où j'aperçois les murs couverts de clichés. C'est donc là qu'ils se trouvent tous. J'ai le coeur serré au souvenir du Camille effondré d'il y a quelques années. Il semble remarquer mon trouble parce qu'il pose ses mains sur mes joues et fais dévier mon regard dans le sien.

« Suis-moi, indique-t-il en basculant sa tête vers une pièce que je me souviens être sa chambre.

- Jamais le premier soir, dis-je en tentant de faire redescendre l'ambiance pesante qui s'est installée.

- Allez, viens. »

Je ne cherche pas à rétorquer et avance jusqu'à la porte au bout du couloir. Il ouvre et je prends le temps de me familiariser avec cette vue qui a un goût amer de passé. Sa chambre n'a pas beaucoup changée non plus. Très peu de déco exceptée un cadre photo où on peut voir deux enfants qui jouent ensemble. Je n'ai pas besoin de sa confirmation pour savoir qui s'y trouve. Hazel est comme dans mon souvenir. Et certainement, comme dans le sien aussi. Un lit défait trône au centre de la pièce, un bureau dans un coin où sont entassés plusieurs dessins d'enfants signés d'un certain Charlie, et un clavier se détache du décor.

« Tu continues ? demande-je surpris.

- Le piano ?

- Oui.

- Effectivement.

- Tu pourras me jouer quelque chose ?

- Un jour, si tu veux, répond-il en fixant le tas de partitions annotées. »

Je m'avance dans la pièce. Tout dans cette chambre me donne envie d'y rester toute ma vie. Soudain, un poids me fait basculer en avant, tête la première sur le lit alors que Camille rit aux éclats, au-dessus de moi.

« Arrête de réfléchir un peu et embrasse-moi plutôt, tu es trop sérieux, déclare-t-il.

- Vos désirs sont des ordres, monsieur, je m'esclaffe en utilisant mes avant-bras pour me soulever.

Le jour où on rejoindra les étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant