Un avenir incertain

Chapitre 32 - Faillir à son devoir

Salomé se réveilla seule sur son canapé, nue. Elle se frotta le visage encore engourdi par le sommeil. Un léger mal de crâne la fit grimacer. Les pintes de la veille y étaient pour quelque chose. Elle lança un regard circulaire sur son appartement à la recherche de Kal-El, mais au fond d'elle-même, elle savait qu'il n'était plus là.

Une semaine s'écoula. Une semaine pendant laquelle Salomé tenta de reprendre ses esprits, de continuer sa vie après la tempête Kal-El et de ne pas trop se demander quand est-ce qu'il reviendrait la voir. « Il a besoin de temps », se disait-elle pour se rassurer. Chaque soir, elle s'asseyait à sa fenêtre, par où il était entré à nouveau dans sa vie, et guettait le mouvement des étoiles et les ombres dans la nuit noire. Elle s'imaginait comment la vie devait être là-bas, et ce qu'il pouvait bien s'y passer. Elle voyait Kal-El, libre d'être tel qu'il était sur Oyessa, et réalisa la discrétion qu'il devait adopter sur Terre. La voix grave du Kryptonien résonnait comme une berceuse avant qu'elle ne s'endorme « Je crois que je serai prêt à renoncer à vivre parmi les miens pour être avec toi ». Et Salomé s'endormait, le sourire aux lèvres.

Deux semaines après sa visite éclair, aucun signe de vie n'était à déceler. La jeune femme s'était faite à l'idée qu'elle ne pouvait s'arrêter de vivre juste en l'attendant. Elle était allée voir une exposition de peinture avec John après avoir crapahuté dans la ville toute la journée. Lorsqu'elle rentra chez elle, éreintée, elle s'effondra sur le canapé. La lumière des réverbères de la rue éclairait faiblement son salon. La pénombre l'apaisait. Ses yeux se fermèrent petit à petit, et elle laissa la fatigue la happer dans sa danse languissante.

Une vive lumière la fit sursauter. Lorsqu'elle rouvrit les yeux, plusieurs silhouettes s'engouffraient par la fenêtre de la pièce. Son sang ne fit qu'un tour, et elle se leva précipitamment. Salomé reconnu les combinaisons des quatre Oyessadiens. Mais surtout, elle reconnu la chevelure rousse qui venait à son tour d'émerger dans son appartement.

« Bonjour Salomé », s'exclama-t-elle un sourire insolent aux lèvres.

« Sélène ». La jeune femme déglutit. Elle n'était pas sereine. Un étrange pressentiment qui lui disait que la situation n'était pas normale lui tordait le ventre.

« J'aurais dû m'en occuper depuis bien trop longtemps », déclara-t-elle en s'avançant vers elle.

« T'occuper de quoi ? », Salomé reculait, de plus en plus méfiante.

« Montrer à nos peuples quel homme est réellement Kal-El ».

« Comment ça ? »

Elle parut agacée par sa question.

« Un homme qui trompe son épouse, qui découche, et qui ne respecte pas ses engagements ». Une sueur froide descendit le long de la colonne vertébrale de Salomé.

« Vous n'êtes pas divorcé ? »

Un rire sec claqua dans la nuit.

« Il a peut-être lancé la procédure, mais rien n'est fait. Le divorce ne peut être proclamé si aucun successeur n'a été trouvé. Ce qui veut dire qu'il est encore bel et bien engagé avec moi. Lorsque le conseil apprendra sa trahison, Kal-El sera déchu. Il n'aura plus aucun droit. J'aurais les pleins pouvoirs, comme le stipulait l'une des causes de notre contrat ».

« Tu le hais à ce point ? ». Les traits de Sélène se crispèrent.

« Ça ne te regarde pas »

« Tu te venge parce qu'il ne t'aime pas ? ». Les oreilles de Salomé bourdonnaient tellement fort à cause de la colère et du dégout qu'elle ressentait qu'elle entendait à peine ce qu'elle répondait.  Le coup partit tellement vite qu'elle n'eut pas le temps de l'esquiver. Surprise, Salomé retomba sur son parquet dans un bruit sourd. Elle passa une main sur sa joue endolorie et fusilla la rousse du regard. Celle-ci la fixait avec dégout et rage.