Chapitre 36- Intégration

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Les jours qui suivirent, Salomé et Kal-El les passèrent à découvrir le monde à deux. La jeune femme lui fit visiter la capitale Irlandaise sous de rares rayons de soleil. Ils allèrent se promener dans le parc de St Stephen Green où ils purent croiser quelques biches, montèrent dans des bus à deux étages, prirent le café au Trinity Collège, et finirent par la visite de la Guiness factory. Une semaine s'était écoulée depuis leur retour sur Terre, et Kal-El était presque métamorphosé. Une barbe naissante recouvrait le bas de son visage, ses boucles brunes avaient poussées et son style vestimentaire n'avait plus rien à voir avec celui qu'il revêtait lorsqu'elle l'avait connu. Désormais, il s'habillait dans un style à mi-chemin entre le Canadien et le Londonien. Seules sa haute silhouette et sa carrure herculéenne n'avaient pas bougé et trahissaient sa force surhumaine.

Salomé le sentait heureux, bien dans ses baskets, comme s'il débutait une nouvelle vie. Comme s'il avait toujours eu, au fond de lui, l'envie de revenir là où il avait vu le jour. Là où il avait grandi. L'environnement qui l'avait façonné, éduqué, influencé. La nourriture, les habitudes, les coutumes des humains, le Kryptoniens les réintégra dans son quotidien avec une facilité déconcertante. Il avait réactivé le compte bancaire qu'il avait possédé lorsqu'il vivait sur Terre, mais avait prévenu Artier de peur d'éveiller des soupçons, ou de se faire repérer par les américains. Les deux hommes avaient eu une longue conversation au téléphone, qui s'était soldée par un soupire de soulagement de la part de Kal-El. Artier prendrait des dispositions pour que la transaction du compte américain vers un nouveau compte français se fasse sans bruit. Il avait tenu parole.

Alors qu'ils flânaient à l'Irish Museum of Modern Art, Kal-El s'arrêta longuement devant un bureau, appartenant à une œuvre d'art contemporaine.

« Il faut que je travaille », dit-il d'une voix tellement faible que Salomé peina à l'entendre distinctement. Elle le rejoignit et glissa sa petite main dans la sienne.

« Qu'est-ce que tu aimerais faire ? ». Son front, plissé, présageait d'une réflexion profonde.

« Je pourrais peut-être... Utiliser mon master en sciences-politique... »

« Bien sûr », s'exclama Salomé. Il la regarda de ses yeux bleus profonds.

« Je pourrais m'engager dans les politiques publiques »

« Et utiliser ton savoir académique, mais aussi du terrain que tu as récolté à Oyessa ! ».

Ils perdirent le fil de la visite, perdus dans leur discussion, et se retrouvèrent dans les jardins. Un peu plus tard, ils rentrèrent et se mirent à confectionner un CV pour Kal-El, puis, à chercher et postuler aux offres d'emplois.

« Je me sens bien ici », lui avait-il dit lorsque la question géographique de la recherche d'emploi s'était posée.

« Moi aussi », avait répondu Salomé. L'écriture de son livre avait pris du retard, mais elle pouvait travailler à distance avec sa boîte d'édition. Et elle aimait trop l'Irlande pour la quitter tout de suite, cette île des merveilles.

Le visage sérieux de Kal-El, penché sur l'ordinateur, rappela l'autorité naturelle et le côté professionnel qu'il pouvait revêtir et dégager. Ecrire sur l'ordinateur lui prenait plus de temps, mais l'habitude allait vite revenir. Ils se couchèrent en refaisant le monde.

Les jours qui suivirent, le Kryptonien continua de postuler, à distance mais aussi en physique. Salomé en profitait pour écrire, puisque quand il revenait, elle ne pouvait s'empêcher d'être près de lui, de le toucher, d'entendre sa voix. Il la déconcentrait parce qu'il l'attirait comme un aimant. Parfois, elle le soupçonnait de sortir faire un tour juste pour lui laisser un peu de temps seule et qu'elle puisse continuer son livre. Il était prévenant et pensait à elle, ce qui la touchait encore plus. Lorsqu'il sortait seul de l'appartement, les premiers jours, Salomé ne pouvait s'empêcher de ressentir une petite pointe au cœur. La peur de ne pas le voir revenir. Mais quand il poussait la porte avec ses cheveux mouillés et son regard illuminé, elle oubliait tout.

Un avenir incertainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant