Humanité : Tome 2 - Pouvoir

XLIII. Division

Amélie soupira. Elle observa les alentours en silence. La nuit était particulièrement sombre. Ni la lune ni les étoiles n'éclairaient, et le froid persistait. La ferme n'avait jamais été plus calme et silencieuse que depuis le départ d'Emma. Amélie avait beau être soulagée qu'elle ne soit plus là, il régnait une ambiance des plus pesantes. Il n'y avait plus de conflits, plus de disputes, chacun faisait ce qu'il avait à faire. Mais l'absence d'Emma était omniprésente malgré tout, dans l'air. Qu'avaient-ils donc tous avec elle ? Elle avait commis des atrocités sans nom, elle avait mit tout le groupe en danger.

Et pendant ce temps, qui gérait réellement la communauté ? Qui donnait tout son temps, toute son énergie, juste pour maintenir un semblant de stabilité... ? « C'était moi », pensa amèrement Amélie. Pourquoi... Pourquoi après tout ça, autant de monde continuait d'apprécier Emma ? Avec tout ce qu'elle avait fait...

Amélie était à l'entrée de la ferme, au portail, montant la garde, seule. En réalité, elle avait tenu à être seule, afin de pouvoir réfléchir, de pouvoir penser. Elle ferma les yeux un instant. Dès le départ, elle s'était retrouvée seule, isolée. Elle avait été à deux doigts d'abandonner, et malgré tout, elle avait prit les choses en main, elle avait permis à plusieurs personnes de cohabiter, mettant en avant les points forts de chacun... Mais aujourd'hui tout était différent. Elle continuerait de se battre pour les siens, pour que chacun ait sa place dans ce monde. Mais pour cela, elle devait s'assurer que le départ d'Emma soit oublié. Que les gens acceptent cela.

Un mouvement attira l'attention d'Amélie dans les arbres, de l'autre côté de la route. Elle serra le fusil d'assaut qu'elle portait et se mit en position, le canon pointé vers l'endroit d'où provenait le mouvement.

- Ne tire pas, dit une voix avec froideur.

Amélie ne pu s'empêcher de faire une grimace en reconnaissant la personne qui apparaissait devant elle : Emma.

- Alors comme ça tu es toujours vivante, dit Amélie d'un ton qui montrait distinctement l'avis qu'elle se faisait d'elle.

- Comme tu peux le voir.

Emma était couverte de sang, le visage creusé par la fatigue. Et pourtant, elle se tenait droit, le regard affichant toujours autant de détermination. Elle s'avança lentement vers la grille qui faisait office d'entrée dans la ferme. Amélie se mit face à elle, de l'autre côté de cette même grille.

- Tu as perdu notre prisonnier... remarqua Amélie. Emma, je sais que tout cela partait d'une bonne volonté, mais tu mets notre groupe en danger, tu comprends ?

Emma secoua la tête.

- Bien au contraire Amélie, dit-elle. Je pense avoir trouvé un moyen de sauver notre groupe. Un endroit où nous pourrions aller. Un endroit que l'on pourrait défendre beaucoup plus facilement, où l'on pourrait mettre en place une véritable organisation.

- Comment ça ?

Amélie n'aimait pas ça. Emma était définitivement prête à tout pour essayer de reprendre les commandes. Même à « trouver » par magie un endroit miracle.

- Je ne peux pas en dire beaucoup plus dans l'immédiat, répondit Emma. Hormis le fait que sur ce coup, tu peux me faire confiance sans la moindre hésitation.

Amélie eut un rire intérieur. « Mais oui Emma, bien sûr », pensa-t-elle. Et pourtant, une petite voix en elle lui disait qu'elle devait tout de même laisser sa chance à la jeune femme. Comment autant de monde aurait continué à la suivre si elle n'avait pas déjà montré à quel point elle pouvait apporter du bon ? En réalité, Amélie ne supportait plus Emma. Et pourtant, elle ne pouvait juste écarter la jeune femme pour cette raison, cela allait à l'encontre de tous ses discours sur la communauté, l'union...etc. Amélie se décida à jouer la carte de la sincérité :