V. La lame

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Un silence pesant régnait dans la voiture qui fermait le convoi. Martin était au volant, aux côtés de Emma. Ils roulaient sur une belle ligne droite, sous un ciel qui recommençait à se couvrir doucement. De chaque côté de la route se dressaient des champs immenses où poussaient ici et là quelques arbres aux feuilles mortes. Ils allaient vers une petite ville maintenant proche près de laquelle ils étaient passés quelques jours plus tôt.

- Je suis désolé, se décida Martin à mi-voix.

- Il s'est passé quoi avec Noham ? Demanda-t-elle. Lorsque vous étiez en expédition pour le camion.

Elle tourna la tête vers lui, qui préférait garder les yeux sur la route.

- Rien de plus que la mort de Louis, et c'est déjà suffisant. C'est juste que la tête de ce gars ne me revient pas. Je ne l'apprécie pas du tout. Il a changé en si peu de temps... C'est devenu un de ces gars qui se prennent pour les meilleurs. Il est loin d'être le meilleur.

- Je sais. Tu n'es pas le seul à le penser. Mais essais de te contrôler, il y a des tensions dans tout le groupe en ce moment. Les gens apprennent à se connaître et... ils découvrent des points négatifs qu'ils n'avaient pas vu au début.

- Ouais... exactement.

Le camion freina brusquement.

- Merde. Il se passe quoi là ? Ça fait à peine une demi-heure qu'on roule.

Un klaxon retenti, puis quelques cris devant le camion. Martin reconnu les hurlements menaçants de Malcom. Sans attendre, il ouvrit sa portière et bondit hors du véhicule. Il dépassa la voiture de Noham, puis le camion avant d'arriver près du véhicule de Amélie et Malcom, qui étaient sortis, ce dernier un fusil d'assaut pointé en avant.

- Un conseil ne tente rien ou je refais la route avec ta cervelle.

Au milieu de la route, les mains en l'air, se tenait un petit homme barbus avec de longs cheveux bouclés qui lui tombaient sur les épaules. Il semblait surpris est stressé par ce convoi sur lequel il venait de tomber.

- Je... je...

L'homme tentait de parler mais il ne trouvait pas ses mots. Il tremblait, de peur probablement. Amélie saisit une paire de jumelle dans la voiture et observa les environs.

- Tu es seul ? Demanda Malcom.

- Oui... Oui je...

- Comment tu as tenus jusque là ?

- Je... j'ai marché, voilà. Oui c'est ça, j'ai marché.

Même sa voix tremblait. Martin n'était pas satisfait de la réponse. Cet homme semblait en très mauvais état, il n'avait pas pu survivre depuis le départ comme ça, seul.

- Retourne toi, ordonna Malcom.

L'homme obéit, les mains toujours en l'air. Amélie approcha doucement, un beau 9mm en mains. Malcom continua de poser des questions.

- C'est quoi ton nom ?

- Albert.

Amélie le fouilla. Martin plissa les yeux. Il y avait quelque chose d'étrange chez cet homme. Il puait le mensonge. « Ne panique pas, tu devient juste parano, alors n'alerte pas tout le monde pour rien... », pensa-t-il. Il approcha à son tour.

- Mmmh... Et c'était quoi ton job avant Albert ?

- C'est quoi vos questions ? Quelle importance ?

Martin se plaça face à lui, à environ un mètre. Son visage était crispé, il semblait vraiment terrifié. Et pourtant...

- JE pose les questions. Alors, c'était quoi ton p'tit boulot ?

Martin le regarda droit dans les yeux et lui murmura :

- Toi, je te sens pas.

En une fraction de seconde, l'homme apeuré se transforma en soldat formé pour le massacre. Ses yeux devinrent sévères, ses sourcils froncés, il avait un grand sourire de ces clowns qui font si peur. Martin recula de quelques pas et serra son arme plus fort encore. Avec ce même visage que seul le jeune homme voyait, Albert répondit :

- Je bossais dans un cirque.

Sa voix était devenue celle d'un fou furieux qui trouvait la situation comique, apparemment. Amélie fit de gros yeux surpris au son de la voix. Malcom haussa les sourcils, redressant le fusil d'assaut. Le reste du groupe était juste derrière, eux aussi semblaient surpris de la transformation.

- Mon rôle, repris l'homme, c'était celui du tueur.

Il avait prononcé ces derniers mots en regardant Martin dans les yeux, avec son grand sourire terrifiant. Martin senti les battements de son cœur prendre de la vitesse. Il avait toujours eu peur de ces clowns. Ces monstres. Il entendait son cœur battre, d'ailleurs il avait l'impression de n'entendre que ça. Mais il entendit aussi son souffle, tout cela au ralenti. Il entendait le vent froisser les feuilles d'un arbre planté dans le champ à sa gauche. Il entendait la lame qui glissait doucement le long d'un bras. Il entendait ce bruit métallique juste devant lui. Puis il baissa les yeux.

Et il comprit trop tard...

- Amélie !

Le clown venait baisser les bras pour faire glisser une fine lame de sa manche, puis il s'était simplement retourné et avait planté le morceau de métal dans l'estomac de la jeune femme qui se pencha en avant sous le coup. Elle s'écroula, le clown retirant la lame de son corps devenu un pantin inanimé.

BAM! BAM !

À son tour l'homme s'écroula, percuté par les deux balles tirées par Malcom. Martin ne bougeait plus. Un bruit sourd empli ses oreilles. Il pouvait brièvement entendre les cris autour de lui. Il vit Malcom jeter son arme et courir vers le corps au sol. Mike avait les mains sur la tête, l'air terrifié par ce qui venait de se passer. Jean enlevait déjà sa veste, Franck restait penaud, regardant les autres sans savoir quoi faire. Martin lui-même ne savait pas. Il resta planté là quelques secondes avant que Noham n'arrive face à lui et se mette à crier :

- Martin, merde ! Bouge !

La vitesse redevint celle habituelle. Malcom serrait le visage d'Amélie contre lui.

Noham faisait les cent pas. Il semblait ne plus savoir quoi faire. Au loin, une explosion retenti, laissant soulever quelques instants plus tard un épais nuage de fumée. Noham s'arrêta et regarda dans cette direction. Cette direction qui était celle de la ville dans laquelle ils comptaient se rendre. Elle ne devait se trouver qu'à quelques kilomètres. Il hocha la tête puis se dirigea vers le premier véhicule :

- Franck, ramène toi, on va trouver de quoi l'aider.

- T'es malade ?

- On a pas le choix !

- Je veux bien... commença Emma.

- Non, on a besoin de personnes fortes ici, on ne sait pas combien de rôdeurs ont été attirés par les coups de feu. Ni même combien d'Hommes.

La route fût dégagée rapidement et le véhicule s'éloigna à grande vitesse sur la ligne droite. Allongée le plus confortablement possible à l'arrière du camion, Amélie gémissait, son sang s'évadant de son corps avec toujours plus de menace chaque seconde. Martin le savait, ce coup de couteau avait condamné l'un des leurs...

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Bonne journée/soirée à toutes et à tous ! :D

Humanité : Tome 2 - PouvoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant