Aujourd'hui, nous avons passé la journée chez Miss Barry, et comme espéré nous y avons trouvé compréhension, écoute et patience.
Autour de la table, Cole, Diana, Miss Barry et moi-même décachetions une à une les enveloppes, pendant que le majordome était aux petits soins pour nous en servant des boissons chaudes et des délicieux biscuits.Diana mit discrètement de côté une ou deux lettres et sa tante l'interrogea.
- Ma tante, le contenu de celle-ci n'est pas très... agréable, et je ne voudrais pas que Anne...
- La critique est ce qui fait avancer, jeune fille ! On ne peut évoluer si on n'écoute jamais l'avis des autres. Faire face à leurs mécontentements permet de se forger un caractère et d'éviter de faire les mêmes erreurs !
La sagesse de Tante Joséphine avait encore parlé. Certes, il n'était pas facile d'entendre les mots que certains crachaient dans leurs lettres, emprunts de haine raciale et de préjugés bien ancrés. Certains mécontents avaient une verve bien plus aiguisée que les quelques opposants au mariage de Bash et Muriel à Avonlea, et je n'y étais guère préparée. Était-ce là ce qu'on appelle avoir le métier qui rentre? Si tant est que écrire des articles deviendrait un jour mon métier !Mais ces lettres agressives étaient loin d'être légion, bien heureusement ! La majorité restante félicitait Robin pour son article, le choix du sujet ou la manière de l'aborder. Les uns faisaient part de leur propre expérience, les autres philosophaient sur ce qu'il y aurait lieu de faire pour changer les lois ou les mentalités. Le débat était lancé, j'avais atteint mon but!
Le plus étrange était de lire ces courriers envoyés par des dizaines d'inconnus à l'attention d'une personne qui n'était pas moi mais ce Robin que j'avais inventé un soir. Je prenais conscience que c'était derrière ce nom que je me protégeais lorsque l'on me critiquait mais c'était également Robin que l'on félicitait. Quelle dualité troublante et rassurante à la fois!
Toutes ces courriers étaient si différents comme le sont sûrement ceux qui les ont écrits. L'un d'eux provenait d'une femme avouant aimer en secret un homme depuis des années mais ils n'avaient jamais pu faire éclore leur amour au grand jour. Ou celui-ci qui avait été écrit par homme de loi qui confirmait malheureusement qu'un tel mariage est considéré comme illégal sur le territoire canadien, alors qu'un autre disait habiter sur un territoire français où ils y disposaient d'une législation bien plus ouverte. Nous avons même lu les mots touchants d'un pasteur itinérant prêt à faire le voyage pour bénir les amoureux.
Je soupirai en repensant à Bash resté à Avonlea avec Delphine alors que Muriel était je-ne-sais-où. De ce que j'en savais, elle n'aurait laissé ses nouvelles coordonnées à personne et n'aurait écrit qu'à Bash depuis son départ, uniquement pour lui expliquer celui-ci. J'ignore même si elle a lu mon article et ce qu'elle pourrait en penser.
Comme tu le vois, cher journal, la journée fut très riche en émotions pour nous tous et je suis heureuse d'avoir été si bien entourée.
Je vais très vite écrire à Gil pour tout lui raconter !
Il me restera ensuite à répondre à ce cher pasteur afin de lui expliquer la situation et lui informer que dans une certaine petite localité du New Brunswick il manque cruellement d'un révérend.
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Anne avec un e - Lettres et confidences
FanfictionFanfiction épistolaire qui fait suite à la dernière saison de Anne with an E. Les personnages sont issus du roman de Lucy Maud Montgomery et/ou de la série télévisée qui en est inspirée diffusée en trois saisons sur Netflix (2017-2020). Illustration...