Descente

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— C'est pas vrai, s'exclama Simon en se prenant la tête.

Wilhelm avait disparu très loin au fond du gouffre. Il avait tout tenté pour le retenir, mais il avait glissé au moment où il pensait l'atteindre. Les cris de douleurs du prince résonnaient encore dans sa tête, même si plus aucun son n'était perceptible, du haut de la falaise. Il se demanda s'il devrait essayer de trouver de l'aide, mais avec la course effrénée qu'ils venaient de faire, le bouclé pouvait dire que cela prendrait trop de temps avant que quelqu'un finisse par l'entendre. Bien avant leur course, ils étaient déjà très loin des autres élèves.

Il ne restait plus qu'une solution afin de s'assurer que le blond était vivant. Il hurla, le plus fort qu'il le put, afin d'être entendu par le jeune homme.

— WILLE ! WILLE ! TU VAS BIEN ?

Aucune réponse ne lui parvint. Il était peut être mort, empalé par une branche ou bien la tête éclatée sur l'une des roches qui parsemaient la pente abrupte. Les scénarios qui lui venaient en tête n'étaient décidément pas rassurants. Il prit une grande respiration et se força à se concentrer. Que ferait un secouriste dans un cas semblable ? Voilà ! Il n'avait qu'à appeler les services d'urgence. Il s'agenouilla pour prendre son téléphone dans le sac à dos qu'il avait jeté par terre sans ménagement. Quoi ? Le réseau était hors service ! La poisse ! Il se releva aussitôt et brandit l'appareil aussi haut qu'il le pouvait. Pas une seule petite bande ne s'allumait.

Désespéré, il hurla encore le nom de Wilhelm a quelques reprises, faisant très attention pour ne pas dégringoler avec lui. Il se souvenait que Wilhelm portait un polo vert forêt ainsi qu'un pantalon beige. Il tenta de l'apercevoir, mais avec de telles couleurs, c'était pratiquement impossible de le différencier de la végétation. Soit ! Il devait aller vérifier l'état du blond par lui-même. Soudain, il eut une illumination. Sa mère Linda, avait fourré, dans son sac, quelques instruments indispensables à la survie.

— Vous ne savez jamais ce qui peut vous arriver en forêt, avait-elle déclaré alors que ses enfants la trouvaient beaucoup trop prévoyante.

Simon leva les yeux au ciel pour remercier sa mère, mais le regretta aussitôt. C'était de mieux en mieux. D'énormes nuages noirs s'approchaient de sa position. Un orage arriverait dans un quart d'heure environ. Il n'avait plus de temps à perdre. Si Wilhelm était gravement blessé, il ne pourrait pas se couvrir convenablement. Il trouva une lampe de poche et l'alluma pour tenter de voir le prince.

Toujours rien.

Il sortit son manteau de pluie et enfila ses gants afin de ne pas trop se fendre les mains en descendant. Il remit son sac, bien attaché derrière son dos, et s'agenouilla, dos à la falaise. Lentement, il allongea sa jambe vers l'arrière et la descendit jusqu'à sentir un appui sous sa chaussure. Il agrippa une grosse racine qui sortait d'entre deux immenses roches et se laissa pendre pour voir où il pourrait appuyer son autre pied. La tâche ne serait pas facile. Des gouttes s'étaient mises à tomber, humidifiant la roche pour la rendre très glissante. La terre, qui bordait les endroits moins rocheux, s'effritait au moindre contact. Il songea à rebrousser chemin, mais remonter était encore plus périlleux. Et puis d'ailleurs, il ne laisserait pas Wilhelm.

Les minutes s'égrenèrent alors que Simon passa tout près de rejoindre le blond en manquant quelques appuis. Certes, c'était ce qu'il voulait, mais il tenait à ne pas se briser les os avant d'y parvenir. La falaise était extrêmement haute et il entendit enfin un cours d'eau qui se trouvait tout en bas. Il approchait du but. Mû par un second espoir, il cria à nouveau le nom de Wilhelm.

Que le son des remous de la rivière.

Au troisième coup, il entendit un faible éclat de voix. Retrouvant sa vivacité, le bouclé termina les mètres suivants sans se poser de question. Le prince était vivant !

Il sauta finalement sur un sable mou. Au moins, l'atterrissage de Will se sera fait sans trop de douleur. Malgré tout, il vit que le blond avait été projeté beaucoup plus loin, indiquant qu'il avait roulé jusque là sous la force de l'impact.

— Wille ! Réponds-moi !

— Je...

— Ok ! Je m'occupe de toi. Tu as mal quelques part ?

— Par...tout...

Il était à peine audible. Seigneur! Son polo était déchiré et il pouvait voir qu'il saignait à plusieurs endroits. Il souleva le tissu et découvrit plusieurs ecchymoses et de grandes éraflures qui le zébraient un peu partout sur le torse.

— Je vais te mettre sur le côté. Je veux voir ton dos et ta tête.

Le prince ne répondit pas, laissant seulement Simon le pousser doucement. Il n'avait plus la force d'argumenter. Pendant que Simon était en haut, il avait tenté de crier pour le rassurer, mais le son de la rivière avait englouti le peu de bruit qu'il avait réussi à produire.

Wilhelm entendit Simon retenir son souffle alors qu'il examinait son dos. Il s'avait que ce n'était sûrement pas beau à voir. Le coup qu'il avait ressenti, en frappant de plein fouet un escarpement, lui avait fait perdre conscience. Il s'était réveillé, quelques secondes plus tard, par la sensation intense d'une douleur aiguë.

— Bon, ton dos, ça va. C'est ton omoplate qui est sûrement cassée, et je ne te raconte même pas la bosse que tu as sur la tête. Je vais regarder tes jambes.

Ce n'était pas si grave. Il devrait pouvoir marcher, mais pas question de remonter avec son omoplate. Très vite, il chercha un endroit pour éviter d'être plus trempés qu'ils ne l'étaient déjà.

— Je vais t'aider à te relever. Tu vois là-bas ? On va s'y rendre. Je pourrai nous protéger avec quelques branche. La forme de la pierre nous aidera de l'autre côté. Regarde. C'est comme un petit toit. Je n'aurai pas trop de travail.

Will ne l'écoutait pratiquement pas, occupé à mettre un pied devant l'autre sans s'effondrer à chaque pas. Plus d'une fois, le bouclé le retint, mais jamais, il ne le laissa tomber.

— Tu veux un peu d'eau ? J'ai une gourde pleine.

— Ffff...froid

— Un petit effort. On y est presque.

Simon installa Wilhelm dans le minuscule abri et fouilla jusqu'au fond de son sac où il trouva la couverture d'aluminium que sa mère lui avait insérée de force. « Merci maman, d'être aussi têtue. », finit-il par penser. Il enleva son manteau qu'il passa sur les épaules du blond. Puis, il déplia la couverture. Prenant soin de se positionner du côté de l'épaule non blessée du prince, il s'emballa avec son coéquipier, laissant la pluie le fouetter plutôt que son ami.

Voyant que Wilhelm grelottait de plus en plus, il s'approcha davantage afin de le réchauffer. C'était impossible de faire un feu avec une telle température. Il tenta de recouvrir leurs têtes avec la mince couverture. Cela prit encore quelques minutes, mais le blond finit par s'endormir, à bout de force.

OB RoyalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant