Caprices

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L'agent de Simon le regardait comme s'il était complètement dérangé. Il était certain d'avoir mal compris. Tout d'abord, le chanteur lui avait demandé de lui trouver un homme, de préférence mannequin, avec qui il pourrait se pavaner quand il aurait des sorties importantes. Il avait fait selon son bon vouloir. Après tout, c'était son argent, il faisait bien ce qu'il voulait avec.

— Je t'ai dit que je le voulais blond. Je veux aussi que tu m'en trouves un pour chaque événement. Il n'est pas question qu'on me voit en compagnie du même homme, plus d'une fois. Il faut qu'ils soient tous de vrais beautés et assure-toi qu'ils soient gays. Je veux qu'on en parles dans tous les journaux.

— T'es pas sérieux ! J'ai bossé nuit et jour pour te dénicher Cameron. Tu crois vraiment qu'ils vont tous laisser tomber leur carrière pour quelques séances photos en ta compagnie ?

— D'accord, ils ne sont pas obligés d'être gays, mais j'en veux un différent à chaque apparition publique.

— À quoi ça te sert ? Ton public risque de ne pas aimer.

— Je ne veux pas impressionner mon public. Ils aiment ma musique ou ils n'aiment pas. J'ai une seule personne que je veux rendre jaloux. Maintenant que je suis connu, il ne pourra pas passer sur une revue ou un journal sans me voir.

— Très bien, répondit l'agent sans pour autant y trouver un sens. J'ai déjà des entrevues avec une tonne de journalistes américains de prévues pour les prochains jours.

— Si tu veux rester mon agent, tu es mieux de m'obtenir la même chose en Suède.

— Simon ! L'Amérique, c'est le paradis pour un chanteur comme toi. Oublie un peu ton pays et focalise-toi sur ton avenir.

— C'est bien pour ça que tu dois éviter de me contrarier et faire ce que je te demande. Si je dis toute la Suède, tu trouves un moyen. C'est très simple.

— Avec tout ce que tu me fais faire, je devrais demander un pourcentage plus élevé, grogna le manager.

Cela ne démonta pas une seconde le chanteur qui, au lieu de se rétracter, ajouta une autre demande insensée.

— J'oubliais, dans ma prochaine tournée mondiale, tu dois prévoir un concert au Friends Aréna, en Suède, au début décembre.

— Alors là, n'y compte pas ! On est déjà en septembre et on sera en Amérique du Sud pendant cette période.

— Et bien, je t'assure qu'on sera en Suède, moi. Tu me donnes la date exacte dès que c'est fixé. Ma sœur veut me voir. Je n'ai rien de plus à ajouter.

— Simon, tu ne comprends pas que c'est impossible de faire voyager tout l'équipement pour un seul concert.

— Non ! Je ne le comprends pas. Je me suis fixé un but, il y a six ans de cela, et crois moi, je ferai tout ce qui est possible pour y parvenir, même si cela doit prendre ma vie entière.

— Je n'ai jamais vu une tête de mule pareille. Tu as de la chance que le public t'aime autant, sinon, je t'aurais laissé tomber il y a longtemps.

— Si je comprends bien, je te rapporte bien plus que tes autres clients ?

— Et comment tu peux en douter, alors que je me plie à tous tes caprices ?

— Bien ! Ta demande d'obtenir plus de pourcentage de mes revenus n'est donc pas nécessaire.

— Rraaagh ! Comment fais-tu pour toujours finir par me soutirer des informations comme celles-là ?

— Je ne suis pas devenu populaire en laissant les autres me manger la laine sur le dos. Tu devrais t'y être habitué depuis le temps.

— Tu devrais surtout te trouver un mec. Attends... non ! Je retire ce que j'ai dit. Cet homme souffrirait bien trop de toutes tes demandes impossibles à réaliser.

Simon resta muet pendant quelques secondes. Son agent venait de lui jeter une pierre, sans le savoir. Il y a six ans de cela, il avait donné un ultimatum à Wilhelm; Félice ou lui. Il semblerait que sa demande ait été impossible à réaliser et que le prince ait choisi la facilité.

Un flash-back lui revint en tête où les deux jeunes hommes étaient amoureux plus que jamais. La bouche de Wilhelm qui lui parcourait l'arrière du cou et ses bras qui l'entouraient avec toute la délicatesse dont il le savait capable. Tout cela refit surface et le frappa en plein visage. Il pouvait encore sentir son odeur et ressentir les frissons qui l'avaient parcouru, à l'époque, quand il avait glissé ses doigts jusqu'aux siens.

Wilhelm et sa tendresse s'étaient échappés de ses souvenirs et dansaient maintenant devant ses yeux. Il les ferma pour essayer de retenir ses larmes et pinça ses lèvres à en devenir blanches. Chaque fois, c'était pareil. Il ne parvenait pas à retenir ses violentes émotions.

— Tu vas bien, fiston ? demanda l'agent, inquiet pour son client.

— Je gère, finit par dire le métis. Fais-en autant et tout ira bien pour tout le monde.

Sans le regarder, il tourna les talons et alla rejoindre sa limousine dans le souterrain.

— Un autre diva qui se ruinera avant ses trente ans, bougonna le manager en prenant le téléphone.

Quand à Simon, il prit place dans son véhicule et s'étonna que quelqu'un y soit déjà.

— Bonjour, sourit le jeune homme à ses côtés. Votre agent m'a demandé de vous attendre ici.

— Voila une chose qu'il a compris . Tout d'abord, on se tutoie. Mes exigences sont simples. Tu me donnes la main en public. Si tu es à l'aise, tu peux m'embrasser sur la joue quand ça te chante, mais jamais sur la bouche ! C'est bien clair ? Je sais que tu as un emploi du temps aussi chargé que le mien donc je ne te retiendrai pas plus longtemps qu'une soirée.

Le mannequin, à ses côtés, sourit de toutes ses dents. Il s'était penché tout près du chanteur.

— Tu sais, je n'ai pas accepté pour le fric. J'aime tes chansons et puis tu es pas mal mignon. Ça m'est égal que tu m'utilises pour plus d'une soirée. On pourrait joindre l'utile à l'agréable, susurra Cameron en glissant sa main sur la cuisse du bouclé.

— Je n'ai pas été assez clair, je crois, répondit-il avec sècheresse tout en ôtant, avec dégoût, la main de sa jambe. Il n'y aura qu'une seule soirée; ce soir, en l'occurrence. Les contacts sont autorisés seulement en public. Tu oublies tout ce qui a pu te passer par la tête. Je ne le fais pas pour attirer des mecs dans mon lit. Je le fais pour en attirer un seul et, crois-moi, tu ne lui arrives pas à la cheville.

— Il n'en saura rien, beauté. En plus, tu fais tout pour qu'on ait l'air ensemble. Ce sera plus réaliste si on s'y met tout de suite.

— Ne t'inquiète pas, tu pourras me toucher autant que tu veux dans les prochaines heures, mais en attendant, tu fais des mots croisés. C'est plus clair maintenant ?

— Autant que je veux, déglutit Cameron avec un sourire en coin.

— Si c'est en public et que tu ne m'embrasses pas sur la bouche, oui, autant que tu veux. Dois-je tout répéter ?

— Je t'assure que, ce mec, que tu veux dans ton lit, il va péter un câble, rigola le mannequin.

— C'est exactement ce que je veux. Il va savoir ce que ça fait de voir l'autre avec quelqu'un.

OB RoyalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant