Simon fut complètement pris au dépourvu lorsque Sara changea le poste du téléviseur et que la voix incertaine de Wilhelm emplit la pièce. Il avait toujours cette attitude confuse qui l'avait tant hypnotisé, il y a quelques mois. Incapable de le quitter des yeux, il l'observa avec avidité. Le prince avait développé un tic nerveux depuis leur séparation, repoussant sans cesse un mèche de cheveux derrière son oreille.
— Allez bébé, tu peux le faire, lui souffla-t-il dans sa tête, avant de se rendre compte qu'il le surnommait encore comme s'il allait se voir immédiatement après.
La famille royale offrait son discours hivernal, donnant le coup d'envoi aux festivités de Noël et du jour de l'an. En sa qualité de prince héritier, on lui avait fait clore l'allocution. Wilhelm était resté figé quelques secondes à déglutir et replacer à nouveau sa mèche. Il hésitait vraiment, semblant vouloir quitter son siège à tout moment.
Les caméras ramenèrent un instant les visages bienveillants de la reine qui était assise dans son propre fauteuil, puis celui du prince consort avant de revenir à Wilhelm, encore crispé. Malgré leur séparation, Simon se sentait désespérément impuissant face à l'incertitude du blond. Avoir été présent, il lui aurait donné du courage pour affronter cette nouvelle tâche.
Il joignit ses mains et lui envoya de l'énergie positive. Il avait beau essayé de lui en vouloir pour sa décision irrationnelle, il restait désespérément amoureux de lui et ne supportait pas de le voir aussi mal à l'aise.
Comme s'il avait ressenti que Simon était avec lui, le prince s'exécuta. Malgré tout, les mots sortirent avec fluidité, laissant même apparaître un sourire aux moments d'offrir ses vœux. Cela se terminait généralement toujours ainsi. Cette fois-ci, par contre, on laissa tourner la caméra et Wilhelm continua sur sa lancée.
— J'aimerais vous inviter à festoyer pour une troisième fête, cette année. La famille royale est fière de vous présenter sa future membre, ma fiancée, Félice...
Simon avait perdu tous ses repères, dès l'instant où le blond avait présenté Félice au peuple. Le visage angélique de la jeune femme était apparu à l'écran. Il savait que Wilhelm continuait à la présenter, mais son cerveau avait interdit à ses oreilles d'assimiler les paroles qui suivirent. Le seul mot qu'il distingua était « mariage ». Mon Dieu, il allait réellement le faire. Félice deviendrait la future princesse de la Suède. Le prince abandonnait définitivement leur relation pour satisfaire sa famille.
Simon regarda désespérément sa mère, la seule qui connaissait ce qui devait se passer dans la tête de son fils. Elle lui retourna un visage désolé. C'est comme un automate qu'il se releva du fauteuil dans lequel il s'était installé pour jouer une partie de Monopoly. Wilhelm disparu enfin de l'écran pour laisser place à un message publicitaire. La seule vision qui lui restait, c'était la main du prince qui avait rejoint celle de Félice. Tout était terminé. Les larmes firent surface, mais il s'était juré qu'il ne pleurerait plus pour lui. Afin de faire passer sa rage, il poussa le plateau de jeu vers le téléviseur, se foutant carrément des dizaines de pions, maisons et hôtels qui y prenaient place.
— C'est quoi ton problème, hurla Sara. Tu es tellement mauvais perdant. Je peux t'assurer que je ne suis pas prête de rejouer en ta compagnie.
— De toute manière, personne ne veut de ma compagnie, rétorqua immédiatement le bouclé en songeant au blond qui venait de l'abandonner.
— Quoi ? T'es pas sérieux là ? Tu oublie Wilhelm ! Il n'aurait jamais pu s'en sortir sans toi, quand Erik est décédé.
— Il est comme August. Un vrai égoïste qui ne pense qu'à lui.
— Mais qu'est-ce que t'as, bon sang ? Wille est ton meilleur ami.
— ÉTAIT !
— Je te jure que tu vas le regretter si tu décides de lui en vouloir pour une pacotille. Vous êtes inséparables, tous les deux. Et puis d'ailleurs, on est invités au mariage.
— Je n'irai certainement pas faire partie de cette mascarade.
— Tu m'accompagnes, point final. Ce sont nos amis qui se marient. Pas question de rester ici.
Simon disparut vers sa chambre, laissant sa sœur continuer à débattre sur le fait qu'ils n'auraient plus jamais la chance d'assister à un événement aussi grandiose.
Pendant ce temps, au palais, Wilhelm et sa famille se dirigeaient vers leurs invités. En fait, August ainsi que sa mère et son beau-père étaient du lot. Quand August avait compris que son cousin se mariait avec sa belle Félice, il s'était senti trahi. Le jeune écoutait le discours dans une pièce adjacente et, tout comme Simon, il avait complètement figé en l'entendant l'appeler « la future princesse ». Pourquoi avaient-ils fait cela derrière son dos ?
Tout le monde les avait félicités en souriant alors qu'ils donnaient une grande poignée de main. Malheureusement, il dut faire comme tout le monde et congratuler les fiancés. La jeune femme le supplia silencieusement de changer d'avis et de lui revenir. Il pencha la tête pour chasser cette vision et passa à son cousin.
Wilhelm, celui à qui il aurait donné sa vie afin qu'il survive, venait de faire un sacrifice, tout aussi important. Ses lèvres pincées racontaient davantage encore que les yeux de Félice. Il les mordillait machinalement afin de se donner contenance. August savait très bien que le prince n'allait pas bien. En deux jours, il avait énormément changé. Son stress avait fait apparaître de l'acné un peu partout sur son visage. Ses mains étaient plus froides qu'un mort. Et que dire, enfin, de ses tics nerveux qu'il répétait à l'infini ? Il ne se souvenait pas d'avoir vu Wilhelm aussi vulnérable, même lorsqu'ils avaient soulevé le cercueil d'Erik devant ses yeux.
— On peut se parler en privé, quémanda le jeune lord.
Le blond lui désigna une porte à l'opposé de la grande salle et ils s'y dirigèrent sans conviction. Dès qu'il eut franchi le seuil, August se retourna pour entamer la conversation, mais il se ravisa aussitôt. Un garde du corps les avait suivi et le prince n'avait pas demandé à ce qu'il s'éloigne. Il voyait que le blond ne désirait pas s'éterniser. Ouvrant et fermant à plusieurs reprises ses mains bien enfouies dans ses poches de pantalon, August piétina un peu sur place et se décida enfin à parler. Un seul et unique mot fut prononcé.
— Merci!
Le prince vérifia si son garde du corps était toujours présent puis, il fixa avec intensité son cousin. Ses yeux parlaient à sa place. Ils lui criait son désarroi.
— Ne me remercie pas, répondit-il après plusieurs secondes. Quelqu'un devait le faire.
— Je suis désolé, Wille.
— Tu seras parrain, August. De ce côté, J'attends de toi la perfection, souffla le blond à son oreille avant de tourner les talons et de repartir.

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OB Royal
FanfictionWilhelm est le prince de Suède et second à la succession du trône, après son frère Erik. Obligé d'étudier dans un nouveau pensionnat, suite à un esclandre avec des camarades, le prince rencontrera Simon, issu du peuple et ouvertement gay. Lors d'un...