Points de suture

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— August ! Oh mon Dieu, s'exclama Wilhelm. Comment as-tu fait pour casser ce verre ? Attends, mais tu saignes ! Fais-moi voir.

Le jeune lord, qui avait plusieurs rasades de scotch de prises, n'avait pas ressenti la douleur de l'éclat de verre logé profondément dans sa paume.

— Tu dois immédiatement te faire soigner, ordonna le prince. Je vais te chercher une serviette.

Wilhelm sortit précipitamment en zigzaguant fortement. Il avait but encore plus que son cousin et quand il débarqua enfin dans la salle de bain où Félice et Érika se trouvaient, ses émotions l'avaient littéralement emporté sur le bon sens.

— Fée ! August saigne beaucoup trop ! Il faut l'aider, cria-t-il sans se rendre compte de la peur qu'il faisait à sa femme. Donne-moi une serviette, avant qu'il ne se vide de son sang. La jeune femme, prise de panique en voyant son mari tituber, s'était prestement exécutée, croyant que Wilhelm avait couru. L'étoffe sortie, elle se précipita pour rejoindre le jeune lord qui attendait sagement de l'aide.

— August ! Où es-tu blessé ? hurla la princesse en s'agenouillant auprès de lui.

Afin de diminuer les saignements, le brun avait tenté d'essuyer sa main blessée et avait taché sa chemise, à la hauteur de sa poitrine. Il avait aussitôt regretté son geste en sentant le verre s'enfoncer plus profondément. Malheureusement, ce que Félice put voir était bien plus alarmant que ce qu'il en était vraiment. La chemise imbibée formait un cercle imparfait de couleur écarlate qui s'étendait à la hauteur de son cœur.

— August ! August ! s'écria avec épouvante la jeune femme.

Elle lui attrapa les deux joues pour qu'il la remarque enfin. Elle continua de l'examiner, soucieuse pour son état. Grand Dieu, ses pupilles était dilatées. Il devait être sur le point de s'évanouir.

— PARLE-MOI ! DIS-MOI OÙ TU ES BLESSÉ ? S'il te plaît August, tu n'as pas le droit de me faire ça.

Elle commença à déboutonner la chemise pour vérifier l'état de sa poitrine. Surprise de ne rien y trouver, elle voulut parler à Wilhelm, mais il était encore bien loin, essayant de se rendre en frôlant les murs. Voyant qu'elle devrait attendre le retour de son mari, elle se concentra à nouveau sur August. À peine eut-elle retourné sa tête, qu'elle reçut un baiser enflammé de son ancien amant.

Étonnée, cela lui prit quelques secondes avant de comprendre et elle le repoussa du mieux qu'elle le put. Son haleine sentait l'alcool à plein nez.

— Je suis désolé... Félice. Je n'aurais pas dû, s'effondra le brun en reniflant.

— Dis-moi juste ou tu es blessé ? répéta la princesse, ne sachant trop comment interpréter le geste précédent.

Sans rien dire, il releva sa main droite d'où coulait encore beaucoup de sang.

— Je suis un monstre, finit par dire August entre deux sanglots. Je ne comprends pas pourquoi vous me parlez encore. J'aurais dû faire comme mon père. Comme ça, je ne pourrais plus blesser personne. Vous me détestez tous !

— Personne te déteste, voyons! Viens, relève-toi. Tu dois te faire faire des points de suture. Je t'amène à l'infirmerie.

— Comment fais-tu pour ne pas me détester ? Je me hais moi-même à longueur d'année, gémit le brun en marchant au côté de la princesse.

— Tais-toi ! On en reparlera quand tu seras soigné et surtout, sobre.

— Tu pars toujours quand j'arrive dans la pièce. Tu ne me laisses jamais la possibilité.

— Je te promets d'écouter ce que tu as à dire, mais pour l'instant, on va voir Sara. Elle va te soigner. Je ne veux surtout pas t'entendre te plaindre d'elle. Tu as compris ?

— Non ! Je vais tout faire pour remettre les choses en ordre, affirma le jeune lord alors que Félice poussait la porte de l'infirmerie.

Assise à son bureau de travail, Sara lisait un manuel avec concentration. Elle fut dérangée par des voix qui semblaient venir vers l'infirmerie. Elle se leva immédiatement et attendit de voir qui serait son patient. Elle resta de marbre en apercevant August. Il était dans un état déplorable et c'est son instinct de soignante qui prit le dessus.

Félice lui raconta qu'il était blessé à la main et que ce n'était qu'une tache sur sa poitrine.

— Merci, mon amie, je vais m'occuper d'August. Retourne avec Wilhelm et Érika. Il est entre bonnes mains.

La princesse hésita sachant l'historique entre le lord et l'infirmière. Le regard confiant de Sara ainsi que les paroles prononcées par August avant d'entrer dans l'infirmerie eurent raison de sa réticence et elle finit par partir rejoindre sa famille.

— Dis-moi comment cela s'est produit, demanda l'infirmière en enfilant des gants chirurgicaux.

— Je suis tellement désolé Sara. Je ne voulais pas faire de mal à personne, mais j'étais tellement en colère contre mon père et cette... femme que j'ai tout gâché. J'ai réussi à détruire ce que j'avais de plus précieux, s'exclama finalement August. Félice a épousé mon cousin, qu'elle n'aime pas, par ma faute. Et... et... Wilhelm, il ne va pas bien du tout... Il ne fait que survivre sans ton frère. Je l'ai placé dans une situation bien trop lourde à gérer pour lui. Il l'aime tellement. Je ne veux pas le perdre comme mon père.

— Mais c'est un peu tordu, ta façon de penser. Wilhelm n'a jamais dit qu'il était amoureux de Simon, voyons. Tu t'imagines des choses.

— Non ! Je sais de quoi je parle. Il aime Simon comme un fou, même après six ans. Tu ne peux pas ne pas t'être rendu compte de ça. Simon était complètement atterré le jour du mariage et je vois bien comment il essaie de survivre avec tout ça. Il change de mec sans arrêt, pour les montrer au monde entier. Il veux montrer à Wilhelm qu'il l'a oublié, mais au fond, il veut juste le rendre encore plus jaloux pour lui faire mal; comme lui a souffert.

— Hem, Disons que je te crois. Tu as quoi en tête ? Wilhelm est marié.

— Le prince Charles et lady Diana ont bien divorcés. Il faut que tu demandes à ton frère d'organiser un concert au Friends Arena. Dis-lui que ça fait longtemps que tu ne l'as pas vu et que ta mère s'ennuie à mourrir. Invente ce que tu veux. Tu lui demandes deux billets pour Wilhelm et moi en avant-scène et un laisser-passer VIP en arrière scène, après le spectacle. Dis-lui que c'est pour toi. Il faut qu'ils se parlent. On peut pas les laisser se détruire par ma faute. Je dois les aider, s'il te plaît.

— Tu sais que tu es difficile à cerner ?

— Oui, j'ai parlé à Wilhelm aujourd'hui et un jour je t'en parlerai, mais c'est encore difficile. C'est pour ça que j'ai cette blessure, résuma-t-il en montrant sa main.

— Je ne te promets rien, mais je vais essayer. Si on s'occupait de ton problème maintenant ?

— Merci, Sara ! Je sais que j'ai été abominable avec toi et je te promets de changer, jura le lord en accrochant ses bras autour de l'infirmière. Je suis vraiment désolé, souffla-t-il avant d'appuyer sa tête sur l'épaule de Sara qui était restée figée par le geste inhabituel du jeune homme.

— Ça va, August. Je ne suis pas rancunière. Il faut vraiment te soigner maintenant, tu étales ton sang partout.

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