Hommage à Thierry

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J'avais un ami lorsque j'étais au lycée.
Partis à la fac, nous fumes séparés.
Il m'écrivit son besoin d'aide.
Je n'ai pas su la lire
Alors que je me faisais violer.
Je n'ai pas su répondre.
Je ne savais quoi dire.
Un jour, ce qu'il fit
Pour faire entendre sa peine
Dépassa tout entendement.
Il s'imbibât d'essence tout entier
Et alluma son briquet.
C'est ainsi qu'il mourut,
Sidérant et impensable.
Impansable en vérité.
J'en porte encore le deuil.
Ses parents, tous deux professeurs de philosophie
Et catholiques pratiquants,
Lui refusèrent l'hommage
D'un office et d'une tombe.
J'y suis allé me recueillir.
O, quelle triste tombe !
Pas une pierre tombale,
Pas un seul nom,
juste un tas de terre
Et pas une seule fleur.
Quand je souffre, et que brûle mon âme,
C'est à lui que je pense et demande pardon.
Il est trop tard, je sais,
Mais c'est pour lui que je veille.
Quand bien même l'heure est sombre,
C'est pour lui et sa mémoire,
Que je tiens la lumière et ne cède au trépas.
Et si tout devait brûler,
Et ne laisser que cendre,
Je serais là au milieu
Et je clamerais son nom.
Que je hurle, que je crie,
Que je saigne ou me noie,
Je suis toujours vivant.
J'ai une croix à porter,
Elle m'est rivée aux épaules.
Que je veuille la jeter, la détruire,
Ou même l'incendier,
Elle sera toujours là
À remonter mon échine.
Et bon dieu merde,
À tous ceux qui voudrait qu'on se taise,
Qu'on reste poli, et gentil et si courtois :
La douleur doit trouver sa voix
Pour dégager la voie !

Hauts ébats... et heurts pourpresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant