Le cerveau de la détective découlait des mirages. Dans le désert du Sahara, au Sud de l'Algérie, à Ghardaïa, vivaient les célèbres hommes bleus, appelés Touaregs, les fameux nomades de Kel Tamasheq.
Le chèche avait une distinction particulière pour les Touaregs : de quatre à cinq mètres de long, il protègeait du vent, du soleil, de la chaleur et du sable. Le chèche symbolisait le respect et se portait pendant les fêtes religieuses de l'islam. Le bleu était la couleur récurrente, symbole de l'apaisement et la confiance. Pour ces hommes d'Algérie, se couvrir le visage, mettre le voile, c'est d'accéder à l'âge viril, une beauté inacessible que l'on nommerait la maturité. Rayan était d'un charisme légendaire dans son costume berbère.
Nora portait un voile long et blanc. La tenue était accompagnée d'un gros collier de perles, le bekhnouk ou bekhnek. Pour agrémenter sa coiffure, des tresses baignées à l'encens et aux huiles parfumées étaient posées. À Ghardaïa, les femmes se maquillaient à base de produits naturels : safran, khoul et henné. L'algérienne était parée de bijoux en argent couvert d'or, sans oublier les hauts bracelets de chevilles ornés, en forme de fleurs. Les femmes du Sud algérien s'habillaient de la même manière que les chaouias.
Située à 600 kilomètres de la capitale du pays, Ghardaïa était l'une des cinq portes du Sahara. Cette ville s'inscrivait dans notre patrimoine mondial. Elle fut considérée comme le site touristique majeure d'Algérie, par le biais de son architecture et son histoire.
Ghardaïa conservait une légende populaire, une histoire d'amour : le nom Ghardaïa, signifiait, en arabe « Grotte de Daïa ». Il était une fois, une jeune fille, du nom de Daïa, qui vivait seule dans une grotte. Elle avait été abandonné volontairement. Elle restait donc seule, dans la grotte qui servait de grenier à sa tribu, c'est-à-dire où celle-ci entreposait les dattes et le grain qu'elle avai reçu pour salaire d'un travail agricole, des terres. Daïa ne manquait donc de rien si ce n'est de compagnie. Le soir, pour effrayer les bêtes et se réchauffer, elle allumait, dans le m'zab (son trou), un grand feu. Les nomades croyaient cette grotte hantée et craignaient son approche. Le cheikh Sidi Bou Gdemma passait par là. Il demanda à son esclave noir de trouver cette lueur qui effrayaient tant les gens de cette vallée. L'esclave trouva Daïa. Elle lui disait ces mots captivants : "Je suis femme, tout ce qu'il y a de plus femme. Va le rapporter à ton maître." Tout ému, l'esclave courut et dit la nouvelle à son roi. Le cheikh Sidi Bou-Gdemma médita longuement, les yeux sur la lueur qui s'était faite plus brillante. Finalement, il dit à son esclave : "Va demander à cette femme si elle accepte de m'épouser". Le Noir y courut vers Daïa pour apporter le message de son maître. Elle répondit en deux mots : "chose facile !". Daïa avait pour surnom "Madame Facile". Séduit par la beauté de cette créature, Sidi Bou-Gdemma en fit, d'elle, sa femme. Il décida de fonder la ville en l'honneur de sa reine qui a vécu, pendant des décennies, dans une grotte. Quel beau récit !!!
Nora et Rayan quittaient la wilaya pour se rendre à Biskra. La distance, entre ces villes, était de 500 kilomètres. Le climat était désertique et chaud. La pluie était rarissime : elle tombait, généralement, en automne et en hiver. Il y avait de grands écarts climatiques. Seuls la chaleur et la sécheresse dominaient le pays. À dos de chameaux, le couple traversait le désert du Sahara. Le voyage était long. Il faisait plus de 40 degrés celsius. La nuit tombait. Rayan installait la tente. Nora préparait la taguella, la galette du désert, cuite sous les braises du feu de camp. Pour compléter ce pain, à base de farine, l'algérienne mit, à l'intérieur, des légumes du soleil, de la viande, du fenouil. Elle venait de malaxer le pain avec le sable. La taguella demandait du temps, de la patience et de la minutie. Ce savoir-faire était unique.
Une fois le repas terminé, le couple contemplait les étoiles devant la tente. Ils prièrent en arabe. Nora avait peur des bêtes qui rodaient dans le coin : le genre d'animaux effrayants, capable de piquer une femme innocente. Rayan la rassura :
— Tout va bien, houbi ?
— J'ai peur des scorpions et des serpents.
— Ne t'inquiète pas. Je suis là, dit le Touareg, en prenant sa belle dans ses bras.
La jeune femme respira un bon coup pour se calmer. Elle se sentit apaissée dans les bras de son mari. Ensemble, ils regardèrent dans la même direction, avec un œil nouveau. Ils prirent le chemin de la bienveillance. Le ciel avait mit sa plus belle robe d'étoiles scintillantes. Têtes perchées tout là-haut dans les étoiles, Nora et Rayan rêvaient. Ils oubliaient leurs certitudes, leurs blessures. Mais, la belle algérienne gardait les pieds sur la terre ferme. Elle eut quelques craintes concernant la vente de sa marchandise :
— Tu crois qu'on arrivera à vendre toutes nos taguellas, houbi ?
— Il faut avoir de la patience. On ne peut pas devenir des bons commerçants du jour au lendemain. Ça demande du temps.
— C'est vrai. Mais avec le temps, je suis sûre qu'on finira par réussir cet exploit.
— C'est bien, Nora. Tu ne te laisses pas faire par la peur. Courage, on réussira.
Les coeur berçaient au rythme du sommeil. La nuit portait conseil aux tourtereaux. Le marchand de sable couvrait, avec sa douce magie, leurs paupières.
Le soleil se levait au désert du Sahara. Après quelques jours de marche, à dos de chameau, le couple arriva, enfin, à Biskra. La ville algérienne était très réputée pour ses célèbres dattiers. Les meilleurs dattes du monde se trouvaient en Algérie, au Sud. Ce pays était le premier exportateur mondial des dattes. Sous un soleil de plomb, Rayan grimpa dans les arbres pour cueillir ces prestigieuses dattes, de variété Deglet el Nour (en arabe, cela veut dire "doigt de lumière"). De forme allongée, la datte brillait au soleil. Elle se rattachait à des petites branches d'une dizaines de centimètres. Ce n'était pas facile d'en attraper. Après la cueillette, Rayan tendit le fruit de lumière à sa femme. Cette dernière le goûta à ses lèvres : la datte était mielleuse et fondante. Le coeur de la jeune femme s'illumina tout d'un coup. Son histoire se bascula, en un coup de claquement de doigt, dans une autre ville du bled.
VOUS LISEZ
Une Paire d'As (Tome 2)
Любовные романы"Selon une grande passionnée de la littérature, il faut toujours jouer loyalement quand nous avons des cartes en notre possession. La vie est un jeu de cartes dont le geste ne fait pas qu'un atout majeur. Le Hasard bat cette vie de cartes.Toi et moi...