Le feu de camp

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Il n'existe pas de son plus doux à mes oreilles que celui des feuilles mortes qui craquent sous mes pieds, ni d'odeur plus enivrante que celle de la forêt un soir d'automne.

L'automne. Ma saison préférée. Ma bouffée d'oxygène. La lumière au bout du tunnel.

Bon ok, j'exagère... à peine. J'ai juste l'impression qu'il existe une frontière entre l'été et l'automne, comme un mur invisible que mes problèmes ne peuvent pas franchir. La preuve : ces derniers temps (et plus précisément depuis que j'ai emménagé avec Zach), tout flotte comme un bateau sur l'eau. Maintenant, je croise les doigts pour que le nom dudit bateau ne soit pas « Titanic », et que les courants vont continuer de voguer à mon avantage.

Parfois, j'angoisse à l'idée que je ne serai jamais aussi heureuse que je le suis aujourd'hui. C'est pourquoi j'apprends à vivre dans le présent et à profiter de la vie au jour le jour...

« Vivre au jour le jour », pff ! On croirait entendre Zach. À ce stade, c'est juste un mantra que je me répète pour déculpabiliser. Voyez-vous, Nous passons deux jours à la montagne avec les garçons, et je ne pourrai pas réviser de tout le weekend. J'ai quand même glissé un manuel dans ma petite valise recouverte de stickers, histoire de faire bonne mesure. Les exams sont peut-être passés, et c'est peut-être les vacances, mais c'est plus fort que moi. Je m'inquiète pour mon avenir.

— Les filles ! La dernière à l'eau est une poule mouillée !

J'arque un sourcil à l'intention de Junior. Claire et sa copine Lisa lui offrent un sourire poli. Si vous voulez mon avis, il ne mérite rien de plus qu'un doigt d'honneur. Il ne fait même pas dix degrés dehors, il s'attend à quoi ?

Ugh... j'en veux encore à Zach de l'avoir invité. En fait, il ne l'a même pas invité. Il était juste là quand les garçons ont parlé du weekend à la montagne, et d'après lui, « ce serait mal poli de le désinviter ». Vous savez ce qui est vraiment mal poli ? Les rots incessants de Junior. Ce mec me dégoûte.

— Passe devant, le provoqué-je en mangeant mon marshmallow grillé. On te rejoint.

Il accepte le défi et n'hésite pas avant de baisser son pantalon, dévoilant un caleçon à carreaux gris. Là, il se met à agiter les hanches.

Au secours, j'ai envie de vomir.

— Si tu veux en voir plus, va falloir venir avec moi.

— Mec, personne veut en voir plus ! s'exclame Tarik en lui balançant une brindille. Rhabille-toi !

Nous sommes tous assis autour du feu de camp, à une dizaine de mètres de la cabane. Le lac est tout près derrière la végétation, mais on ne le voit pas dans la nuit, pas plus que les montagnes autour de nous.

— Vous êtes bidons ce soir. Je vais pisser.

Certainement par flemme, il garde le pantalon baissé et s'éloigne en marchant comme un pingouin. Je ne sais pas si c'est l'effet de l'alcool, mais je le trouve particulièrement agaçant. Heureusement, Zach ne voulait pas de lui dans sa voiture. Non, moi j'ai dû me coltiner Claire et sa copine, à qui Zach a généreusement laissé le contrôle de la musique. Devinez qui a écouté de l'électro pendant tout le trajet ? J'en ai encore mal au crâne.

— Alors, c'est quoi le plan pour demain ? demandé-je en sirotant mon coca.

— On va grimper cette montagne.

Du bout de sa bouteille de bière, Zach m'indique la pointe rocheuse en face de nous, tout juste visible grâce à la lueur de la lune.

— C'est vachement haut, fait remarquer Claire. C'est balisé au moins ?

The love theory [Tome 1/2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant