The love theory [Tome 1/2]

Le rancard amical

— Zach, je suis sérieuse. Laisse-moi conduire.

Et je ne dis pas ça parce que je rêve de mettre les mains sur le volant de sa sublime Jeep depuis le premier jour. Je ne suis juste pas à l'aise à l'idée d'avoir un chauffeur sous l'influence de l'alcool, même s'il prétend être en-dessous du seuil légal.

— Lâche-moi miss pudibonde, c'était qu'une bière.

— Non, deux bières. Autrement dit, deux stupides décisions de ta part.

Main sur la poignée de la portière, il fait volte-face dans l'intention, je le sens venir, de m'incendier.

— Tu sais quoi ? T'as qu'à monter avec Tarik !

— Lui aussi a bu !

— Viens Aurore, intervient l'intéressé en héros. Je te laisse conduire. Je suis crevé de toute façon.

Il me lance les clés de sa Clio. Avant de tourner les talons, j'adresse un court sourire hypocrite à Zach. La voiture de Tarik n'a pas la prestance d'une Jeep, mais c'est toujours mieux que mon tas de ferraille qui rouille à vue d'œil.

Rylan s'endort à l'arrière aussitôt que je me mets à rouler, bercé par les douces vibrations de la voiture sur la route. La musique est calme et ne me perce pas les tympans.

J'inspire profondément pour me donner du courage. C'est le moment ou jamais d'avoir une discussion à cœur ouvert avec Tarik. Ça fait un moment que j'en ai besoin.

— J'aimerais parler d'un truc avec toi.

Je sens son regard inquisiteur se poser sur moi.

— Je te trouve parfois... distant, avec moi, et je ne suis pas certaine de savoir pourquoi. Est-ce que c'est parce que j'ai intégré la coloc ?

Ça fait deux semaines que je me pose la question. Est-ce que ça dérange les garçons qu'une femme ait pénétré dans leur écosystème masculin ? Rylan est irréprochable envers moi, à l'inverse de Tarik. Ça m'a fait bizarre de le voir aussi ouvert avec moi aujourd'hui.

— Ce n'est pas ça, Aurore. Mais je connais Zach, je sais qu'à tout moment ça peut partir en couille et qu'on va plus jamais te revoir dans la coloc. Si ça arrive, je veux pas être partagé entre vous deux.

— J'ai conscience qu'il est ton meilleur ami, je n'ai pas l'intention de m'immiscer entre vous.

— Ouais, peut-être bien... Quoi qu'il en soit, je suis content que t'aies trouvé refuge chez nous quand t'avais nulle part ailleurs où vivre.

Comme je n'ai rien à répondre à cela, je garde le silence. Je médite un instant sur ses paroles, cherchant à les comprendre.

C'est alors qu'il reprend :

— En tout cas, t'as l'air de l'atteindre comme personne d'autre avant toi. C'est surprenant.

Je fronce les sourcils, le regard fixé sur la route.

— Pourquoi ça ?

— Ça lui ressemble pas, ce genre d'initiative. Mais peut-être qu'il t'aime bien. Genre, vraiment bien. Et le fait que l'idée vienne de Zach montre bien qu'il tient à toi.

— Ouais, ça se voit.

Je l'entends souffler à ma droite. Quand je tourne la tête pour l'examiner, je repère un demi-sourire sur son visage.

— Est-ce qu'il t'a dit pourquoi il s'est battu avec Junior hier soir ?

— Non, il m'a juste dit que c'est un... connard.