Lucas

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Le lendemain matin, à sept heures tapantes, je me mets en route pour la bibliothèque. C'est peut-être les vacances, mais entre les deux dissertations que je dois rendre, la lecture obligatoire pour le cours de Mme Bloom, et les exercices donnés par mes autres professeurs, je n'ai pas le temps de flemmarder devant une série. Et j'ai bien l'intention de rester concentrer sur mon objectif. Je ne laisserai rien, je dis bien rien, me distraire. Pas Zach avec son besoin d'admiration, pas Sophia-Rose pour aller manger, pas...

Mon téléphone sonne dans la bibliothèque. Mortifiée d'avoir oublié de le mettre en silencieux, je me jette dessus, rouge de honte. Là, je fige complètement quand je vois le prénom de Lucas s'afficher à l'écran.

Il m'a laissé un seul message.

Il me faut une bonne minute pour rassembler le courage de l'ouvrir. Contre toute attente, c'est une image qui se révèle à moi. Pas de texte, pas d'émoji triste ou en colère. Juste une image. Je plisse les paupières et me penche en avant pour mieux la discerner. Ce n'est pas très clair ce que j'ai sous les yeux, mais je crois deviner la façade d'un bâtiment.

Oh.

Mon.

Dieu.

Le choc est tel que je manque de lâcher mon téléphone des mains. C'est effectivement un bâtiment, mais pas n'importe lequel. Celui-ci est fait de pierres grises. Je le connais bien, puisque je passe devant presque tous les jours.

Greystone.

Lucas est ici ! Je ne sais pas si je dois m'écrouler d'horreur ou me cacher de peur. S'il a fait toute cette route, ça ne peut être que par rapport à mon message de rupture. Oh non, quel désastre... Qu'est-ce que je vais bien pouvoir lui dire ? Je peux déjà commencer par le fait que Greystone n'est en réalité pas ma résidence. Que j'ai vécu pendant plus d'un mois dans ma voiture, jusqu'à ce qu'un ami vienne à ma rescousse. Que depuis, je vis dans une coloc de mecs. Que je partage le lit de l'un d'eux. Pire, que j'ai embrassé ce dernier !

Ou alors je peux ne rien dire. Je l'ai quitté, je n'ai plus de compte à lui rendre. La vraie question, c'est qu'est-ce que lui veut me dire ?

Je prends de profondes inspirations pour me calmer, puis je l'appelle.

Chaque bip m'emmène un peu plus au bord de la crise de panique. Je suis tentée de raccrocher et de l'ignorer complètement. En fait, plus j'y pense, plus je me dis que c'est exactement ce que je devrais faire. Il suffirait de m'enfermer à l'appart pendant l'entièreté des vacances. Il ne saurait pas où me chercher, et à la rentrée, il aurait disparu.

Pas vrai ?

— Salut princesse.

J'écarquille les yeux. Ça aurait été tellement plus simple s'il n'avait pas répondu. Attendez une minute... « princesse » ? C'est quoi ce délire ? Il n'y a d'amertume ou de chagrin dans sa voix, rien de plus que l'intonation réjouie qu'il utilise au début de chacun de nos appels. Soit il nage en pleine illusion, soit il n'a pas reçu mon message hier soir. Ce serait une drôle de coïncidence tout de même... et un sacré cauchemar de devoir tout lui répéter en face. J'ignore si j'en aurais la force.

— Lucas ?

— Je suis en bas de chez toi, tu viens m'ouvrir ?

— Non... enfin, c'est que... tu n'as pas reçu mon message ?

Je l'entends soupirer. Je crains le pire pour la suite.

— Je l'ai bien reçu. Je ne savais pas quoi te répondre et... je n'ai pas dormi de la nuit. Allez Aurore, laisse-moi entrer. On ne va pas en rester là, sur un simple message ? Il faut qu'on parle face à face.

The love theory [Tome 1/2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant