The love theory [Tome 1/2]

Le MG's

J'aime beaucoup ce bar, le MG's. Déjà parce qu'il est entre la fac et l'appart, avec un petit détour de deux minutes. Ensuite parce qu'il a été décoré avec goût : un magnifique comptoir arrondi prend tout le mur de gauche, avec des panneaux en bois et une surface effet marbre. Des tables dans le même style sont disposées de part et d'autre de la salle, avec un espace au milieu pour laisser aux étudiants la place de danser. Et enfin, il y a un stand de fléchettes.

C'est sur le MG's que j'ai jeté mon dévolu quand j'ai vu les photos sur Google Map. Ma stratégie est la suivante : choisir un bar, le fréquenter souvent, devenir amie avec les serveurs et, quand l'occasion se présente, ramasser les verres. L'idée est de me faire remarquer du patron afin de montrer ma motivation. Comme ça, le jour où ils auront besoin de monde, ils sauront à qui demander.

Ma méthode est risquée, et je peux attendre longtemps qu'une place se libère. Seulement je pars du principe que les bars ont toujours besoin de mains d'œuvre, donc ma stratégie va forcément finir par payer. Il le faut.

— Trésor, on a quelque chose pour toi.

Dans son enjouement, Lizzie tape des mains. J'ai emmené Sophia-Rose presque tous les soirs de la semaine au MG's, parce que j'aurais vraiment eu l'air d'une looseuse à venir ici seule (même si c'est ce que je suis convaincue d'être en ce moment). Seulement nous sommes vendredi et Lizzie est rentrée de vacances. Non seulement je dois lui rendre son lit, mais c'est aussi la dernière fois que je pourrais traîner Sophia-Rose ici.

— Ne fais pas la fausse modeste ou je ne sais quoi, juste... accepte le cadeau. Ça nous fait plaisir.

Sophia-Rose me tend une enveloppe rose pâle. Il n'y a rien d'écrit dessus, pas le moindre indice de ce qui pourrait se trouver à l'intérieur. Avec un sourire timide, je l'ouvre.

— Oh mon Dieu !

C'est une carte cadeau pour la librairie d'un montant de...

— CENT-CINQUANTE DOLLARS ! Vous êtes malades !

— On a tous participé : moi, Lizzie, ta pote Maxine, et les garçons. Regarde, on a signé la carte.

Je sors la carte de l'enveloppe avec empressement et lis :

« J'attends toujours ce paiement en nature ;) –Zach »

« Ça me fait vraiment plaisir de te filer 40 balles ma belle, mais je pense quand même que tu aurais dû porter plainte et laisser l'autre connard payer ! Essaie au moins d'acheter un livre pour le plaisir avec tout ce fric. Te quiero, Max ».

— Elle m'a tout dicté au téléphone.

— Elle est géniale ! C'est génial ! Tout est génial !

— Contente que ça te plaise !

— Ça me stressait tellement cette histoire de manuels, t'as pas idée !

— Bon et alors, t'en es où avec tes notes ?

— J'ai fait du chantage à Tobias pour qu'il me file toutes ses notes, mais il manque plein de trucs. Une fille dans mon cours de psycho développementale m'a passé les siennes, et j'attends encore les réponses des autres. C'est la cata, je suis à la bourre.

J'ai fini de rédiger une dissertation sur deux, et je dois encore retravailler les notes que m'a si généreusement données Tobias pour les adapter à mon style. Niveau mise en page et contenu, ce n'est pas du tout aussi qualitatif que moi. Hélas, mendiante que je suis, je n'ai pas mon mot à dire. Je prends juste ce qu'on me donne.

— Demain faut que j'aille m'acheter un ordinateur portable d'urgence.

Et une fois que j'aurai fait ça, je n'aurai plus que des cacahouètes à manger pour le reste du mois.