Chapitre 26 :

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- Ça ira, je peux me passer d'une soirée, pour rester avec ma nièce ! 

J'avais passé un étrange week-end. Tout le monde s'était préoccupé de mon état et s'était inquiété à chacun de mes mouvements, tous semblaient compatir mais personne ne comprenait. Le seul avantage était que Louise a recommencé à me parler. Paradoxalement, je ne m'étais jamais sentie aussi seule.

J'ai évité de parler de ce qui s'était passé à la fac, sauf avec Quentin qui savait toujours comment me remonter le moral. Même avec Clément c'était compliqué d'évoquer le sujet. 

En arrivant à mon cours particulier du mercredi, j'avais eu la surprise de constater que ce n'était pas M. Vanne qui était présent mais M. Hart. Il ne m'a pas demandé comment j'allais, ce que je préférais, ça m'évitait ainsi d'avoir l'impression d'être une personne gravement malade. Il ne m'a pas non plus conseillé d'oublier, je lui en étais également reconnaissante. Oublier c'est beaucoup plus facile à dire qu'à faire et je ne suis pas certaine que ça aide à avancer. En fait, la seule chose qu'il m'ait dite c'est d'exprimer ce que je ressentais à travers l'art. Ce n'était pas une mauvaise idée, il fallait que je me donne du temps pour me poser et balancer tout ce que je ressentais sur une feuille. Je me suis assise à table, embarrassée. J'ai attrapé une feuille à dessin, ainsi que des crayons. Heureusement pour moi, j'avais une entorse au poignet gauche et j'étais droitière, je pouvais donc continuer à dessiner. Je devais exprimer mes émotions. Sans vraiment réfléchir, j'ai attrapé un crayon et me suis mise à tracer, ne pas penser à ce que je voulais réaliser mais me concentrer sur mes émotions m'a donné l'impression de sortir de moi-même. Je ne me suis sentie mieux qu'une fois fini. J'ai pu observer le résultat. Je voyais deux parties distinctes, une très sombre et une autre beaucoup plus claire et au milieu un mélange des deux. De près j'ai vu ce que j'avais fait : un combat, un combat entre deux personnages, un plus sombre et coléreux et un autre plus clair et plus déterminé. Le coté du personnage clair était sombre et vice-versa. C'était exactement ce que je ressentais, un combat entre plusieurs émotions contradictoires, à la fois bonnes et mauvaises. J'avais l'impression que quelque chose avait changé dans ma façon de dessiner, le résultat était plus poignant, plus percutant. Je me suis perdue dans la contemplation de mon dessin durant plusieurs minutes. Puis je me suis rappelée que M. Hart était présent. J'ai rangé le dessin dans mon sac, plongée dans mes pensées. J'avais l'impression que ma vie était vide de sens, je n'y comprenais moi-même pas grand-chose. J'avais encore plus ce sentiment depuis mon agression. Personne ne pouvait comprendre ce que je pensais, ce que je vivais, ce que je ressentais.

 Personne ne pouvait comprendre ce que je pensais, ce que je vivais, ce que je ressentais

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- Je pense que ça suffira pour aujourd'hui !

Sans même y penser j'ai hoché la tête. Il avait raison, j'aurais été incapable de produire quoi que ce soit de plus. M. Hart s'est appuyé sur une chaise en face de moi.

- Comment rentres-tu chez toi ?

- En bus...

N'ayant pas de voiture, je dépendais de mes parents et des transports. De toute manière avec ma blessure je ne pouvais pas conduire avant un moment.

- Je vais te raccompagner !

Ce n'était pas une question, il avait d'ailleurs déjà enfilé sa veste

- D'accord... ai-je bredouillé avant de me lever et récupérer mon sac.

Je l'ai suivi jusqu'à sa voiture. Le trajet fut plutôt calme jusqu'à ce qu'on arrive devant chez moi. Il s'est garé devant la barrière. Il y a eu un petit moment de silence, avant que je ne me décide enfin à bouger et à me détacher.

- Merci de m'avoir raccompagnée Monsieur...

Je m'apprêtais à sortir lorsqu'il m'a doucement retenue par le bras.

- Je crois... que tu peux m'appeler Yann...

- Y... Yann !?

- Oui, c'est mon prénom... a-t-il simplement répondu en souriant.

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