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SAJID


Me concentrant dans la cuisine, je m'appliquai au mieux dans ma recette. Cuisiner ne faisait pas partie de mes passe-temps mais je voulais avoir un truc à faire pour ne pas broyer du noir. J'avais passé la journée dans mon lit à regarder le plafond, attendant un retour de mon petit frère mais il ne s'était pas manifesté...

Tentant lamentablement de me donner bonne conscience, je lui faisais le plat qu'il préférait quand il était petit, des spaghettis à la sauce bolognaise. Je faisais sûrement ça pour rien mais ça me tenait quand même à cœur de m'y pencher.

Samir n'était pas encore rentré du travail, mais il m'avait dit que Said serait là ce soir suite à un message qu'il avait reçu. Je souhaitais qu'on soit tous là pour qu'on s'explique mais j'allais devoir faire ça seul. Après tout c'était un peu de ma faute si on en est arrivé là.

Laissant la casserole mijoter à feu doux, je partis me reposer dans le salon en attendant que quelqu'un rentre. La boule au ventre, j'entendis la porte d'entrée s'ouvrir, laissant apparaître mon plus petit frère, avec la même tenue que la veille.

Il m'aperçut mais m'esquiva, prenant directement le couloir. Me pinçant les lèvres, je me résolus à le suivre jusqu'à arriver dans notre chambre. Said enleva ses chaussures vulgairement avant de se coucher sur le ventre, le nez dans son oreiller.

Je m'approchai et l'interpellai.

- Said.

- ...

Je me tins la tête, me disant que ça allait être compliqué. Il avait pas beaucoup de défauts mais il était très têtu. Fallait que je m'arme de patience. Je vins m'asseoir sur le coin de son matelas et lui, prit son téléphone, qui était neuf semble-t-il.

- Où t'as passé la nuit ? Je me suis inquiété comme un malade.

- Fais pas semblant d'être gentil.

- Pourquoi je ferais semblant, j'ai toujours été gentil avec toi. Je t'ai toujours mieux traité que les autres...

Il se tût, verrouillant son téléphone, mais il esquivait encore mon regard.

- Said, je suis désolé je te le jure.

- C'est pas en étant désolé que tu vas rattraper les sept ans que j'ai perdu de ma vie sans pouvoir voir Baba.

Je soupirai et me frottai les mains.

- Tu penses que j'en ai pas souffert ? Quand il a dû partir, je me suis tué pour vous. Autrement t'allais te retrouver en famille d'accueil et Samir ainsi que Neyla auraient été en foyer. Et t'as toujours été celui que j'ai favorisé. Ça t'as déjà oublié ?

Il se redressa sur ses coudes avant d'enfin affronter mon regard.

- Ça compense pas le fait que tu m'aies privé d'un truc si important.

Je me levai pour mieux le dominer et m'écriai.

- C'est incroyable à quel point tu peux penser qu'à ta petite personne, t'es qu'un putain de gosse pourri gâté et égoïste !

Il secoua la tête, exaspéré.

- Ça me donne même plus envie de t'écouter.

- J'avais que vingt ans ! J'ai même pas pu faire d'étude, ma mère était morte, mon père avait pété les plombs et j'étais responsable de vous trois. J'étais tellement malheureux sah vous restiez ma seule raison de vivre. Si je t'en parlais, tu perdais le peu d'insouciance qui te restait. Tu crois que ça m'a fait quoi quand je rentrais tard du taff pour m'occuper de vous et que j'entendais ta sœur pleurer dans son lit ?

Samir - Par amour pour les miens [𝐵𝓍𝐵]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant